La rencontre peut paraître surprenante. Jodie Foster, la réservée qui évite autant qu'elle le peut les projecteurs médiatiques, et Mel Gibson, l'exubérant, abonné à la rubrique scandales de la presse people pour ses excès en tout genre.
Les deux stars partagent l'affiche du "Complexe du Castor", qui plus est dans la peau d'un couple avec enfants. Ce tête à tête inhabituel ne doit rien au hasard, puisque Jodie Foster, également réalisatrice de cette tragi-comédie, a elle-même choisi son mari fictif.
Comme un clin d'oeil à sa vie tumultueuse, Mel Gibson incarne Walter, un homme déprimé qui a lâché prise sur son existence, à tel point que son épouse Meredith le chasse de la maison.
Un couple sauvé par un castor
Lors d'une nuit d'errance, Walter trouve dans les poubelles une marionnette de castor qui va lui permettre de reprendre sa vie en main. C'est le cas de le dire: l'homme ne se sépare plus de sa peluche. Comme dans un spectacle de ventriloque, celle-ci devient son porte-voix grâce auquel il va renouer avec sa famille.
L'aspect comique de la marionnette laisse vite place au drame vécu par une famille brisée qui tente de se reconstruire. Les retrouvailles sont touchantes, pleines d'émotions.
Pour son troisième long-métrage derrière la caméra, Jodie Foster signe un film poignant, sans forcément tomber dans le pathos. Toujours excellente à l'écran, l'actrice-réalisatrice offre également un rôle magnifique à Mel Gibson. Vingt-cinq ans après les "Mad Max" et quinze ans après la saga de "L'Arme fatale", il rappelle qu'il est capable de se distinguer dans un autre registre que le film d'action.
Convaincant, ce deuxième rôle principal seulement en presque dix ans marque peut-être son grand retour face à la caméra. Espérons également qu'à l'instar du personnage qu'il incarne dans "Le Complexe du Castor", Mel Gibson, après ses frasques à répétition et un divorce qui a laissé des traces, soit lui aussi en train de remonter la pente, dans sa vraie vie cette fois-ci.
L'amitié entre un garçon et un pélican
La figure du père déprimé, on la retrouve également dans "Nicostratos le Pélican", d'Olivier Horlait, sous les traits cette fois-ci d'Emir Kusturica. L'artiste serbe, qui a reçu, rappelons-le, deux Palmes d'or à Cannes en tant que réalisateur, multiplie ces dernières années ses apparitions à l'écran, tout en préparant un nouveau film très prometteur.
Voilà l'inconvénient d'enrôler un tel monument du cinéma: il finit par faire de l'ombre à son propre film. Car la présence de Kusturica n'est de loin pas l'élément le plus relevant du film dont il est question ici.
"Nicostratos le Pélican" raconte l'incroyable amitié entre Yannis (Thibault Le Guellec), un garçon de 14 ans, et un volatile qu'il a retrouvé, abandonné dans des cageots. Le récit se déroule sur une île grecque isolée.
Une incroyable performance
Depuis la mort de sa mère, les relations du garçon avec son père se sont durcies. L'arrivée du pélican va bouleverser sa vie, en même temps que celle de son village. Très proches, les deux compagnons deviennent rapidement les vedettes de l'île, grâce à un numéro de dressage. Les touristes affluent pour assister à leur spectacle. Le fils renoue avec son père et se lie d'amitié avec une jeune fille.
Deuxième long métrage d'Olivier Horlait après "Sunny et l'éléphant" qui racontait l'amitié entre un garçon et un pachyderme, "Nicostratos" surprend avant tout par la performance du pélican. Plusieurs dresseurs ont participé au tournage, avec des oiseaux qui avaient été habitués à la présence humaine depuis leur naissance.
La tendresse de la relation avec l'oiseau, l'amour retrouvé avec le père et l'arrivée de la jeune fille, le tout dans la douceur d'une île grecque: tous les ingrédients sont là pour faire rêver ceux qui ne prennent pas la route des vacances.
Le navet de la semaine
Dans un tout autre style, "Les Tuche", d'Olivier Baroux, donne plutôt envie de rester chez soi. Sans grande richesse matérielle ni intellectuelle, la famille Tuche touche le gros lot à l' "Euroloterie" et décide de quitter son bled paumé pour aller vivre à Monaco, concrétisant ainsi le rêve de la mère de famille (Isabelle Nanty).
Le choc des classes est total quand la famille débarque dans les clubs très "select" du Rocher. Mais passé cette entame prometteuse, le film peine à convaincre. Malgré la présence de Jean-Paul Rouve en père de famille, le niveau comique reste au niveau du sol, à l'image d'un navet qui peine à sortir de terre.
Sébastien Bourquin
Les films à venir
LES SORTIES DU 29 JUIN
TRANSFORMERS: DARK OF THE MOON 3D, de Michael Bayude. Avec Shia LaBeouf, Rosie Huntington-Whiteley.
LA PRIMA COSA BELLA, de Paolo Virzi. Avec V.Mastandrea, M.Ramazzotti.
NICOSTRATOS, LE PELICAN, d'Olivier Horlait. Avec Emir Kusturica, Thibault Le Guellec, Jade Rose Parker.
THE BEAVER - LE COMPLEXE DU CASTOR, de Jodie Foster. Avec Jodie Foster, Mel Gibson, Anton Yelchin.
LES TUCHE, d'Olivier Baroux. Avec Jean-Paul Rouve, Isabelle Nanty, Claire Nadeau.
LES SORTIES DU 6 JUILLET
LARRY CROWNE de Tom Hanks. Avec Tom Hanks, Julia Roberts, Bryan Cranston
SWITCH de Frédéric Schoendoerffer . Avec Karine Vanasse, Eric Cantona
ANIMAL KINGDOM de David Michôd . Avec Ben Mendelson, Joel Edgerton, Guy Pearce.
HANNA de Joe Wright . Avec Cate Blanchett, Olivia Williams, Eric Bana
CASE DÉPART de Thomas Ngijol, Fabrice Eboué, Lionel Steketee. Avec Fabrice Eboué, Thomas Ngijol
L'info ciné de la semaine
Emir Kusturica, à l'affiche cette semaine dans "Nicostratos le Pélican", est décidément en pleine fièvre créatrice. Outre son prochain film sur Pancho Villa, cité ci-contre, le réalisateur serbe prépare un projet pharaonique dans son pays d'origine.
Il a lancé cette semaine à Visegrad, en Bosnie orientale, les travaux de construction d'une ancienne cité en pierres qu'il compte utiliser comme décor pour une adaptation du chef-d'oeuvre de l'écrivain yougoslave Ivo Andric, "Le Pont sur la Drina". "Cette cité représentera les temps passés de tous les points de vue", a déclaré Emir Kusturica lors d'une cérémonie retransmise en direct par la télévision publique de la Republika Srpska, l'entité des Serbes de Bosnie.
"Kamengrad" (la ville en pierres), ou encore "La ville d'Andric", sera construite à proximité du célèbre pont ottoman du XVIème siècle, sur quelque 17'000 m2. Les coûts de construction sont estimés à quelque 12 millions d'euros. La cité sera composée d'une cinquantaine de maisons et disposera aussi d'une église, d'une mairie, d'hôtels, d'un théâtre, d'un cinéma, de magasins, de cafés, d'un marché et d'un port sur la Drina. Cette reconstitution historique doit également servir d'attraction touristique.
Les travaux de construction ont débuté symboliquement avec l'entrée en action de plusieurs pelleteuses et bulldozers, au son de "Carmina Burana" de Carl Orff, interprétée par l'orchestre symphonique de la télévision nationale de Serbie.
Ivo Andric (1892-1975) a été élevé par la famille de sa mère à Visegrad. Il a reçu le prix Nobel de littérature en 1961. "Le Pont sur la Drina" retrace l'histoire de la Bosnie à travers les siècles, dont les communautés se côtoient, s'observent et se déchirent.
Depuis la fin du conflit inter-communautaire (1992-95), la Bosnie est divisée en deux entités, la Republika Srpska et la Fédération croato-musulmane. Visegrad se trouve dans l'entité serbe.