La situation restait cependant tendue, et le chef du gouvernement David Cameron, revenu précipitamment d'Italie en début de semaine, a rappelé les parlementaires pour une séance extraordinaire jeudi sur ces violences urbaines, les plus graves depuis les émeutes raciales des années 1980 au Royaume-Uni.
A la lumière de ces scènes d'émeutes et de pillage qui inquiètent les Britanniques à un an des Jeux olympiques d'été à Londres, le leader conservateur devra sans doute faire face à des pressions croissantes pour réexaminer les coupes budgétaires concernant les effectifs de police. Selon un rapport diffusé le mois dernier, ces réductions doivent se traduire par 16'000 agents de moins d'ici à 2015. Le maire de Londres, le conservateur Boris Johnson, s'est prononcé contre ces coupes sur la BBC.
Calme précaire
Au cours de la nuit de mercredi à jeudi, un calme précaire a régné dans la majeure partie des quartiers de la capitale britannique, où un important dispositif policier était présent.La police a déclaré que des objets avaient été jetés sur les fonctionnaires dans le quartier d'Eltham, dans le sud de Londres, mais que les incidents avaient été réglés et qu'un groupe avait été dispersé.
Les autres villes où des déprédations ont été commises, dont Manchester, Birmingham et Liverpool, n'ont pas connu de troubles majeurs. Mais pour la première fois, des incidents mineurs ont été rapportés au Pays de Galles.
La police a continué à procéder à des arrestations en lien avec les violences, le nombre des personnes interpellées à Londres grimpant à 820. Au total, quelque 1200 arrestations ont eu lieu en Angleterre, depuis le début des émeutes dans la capitale samedi. Les tribunaux ont fonctionné toute la nuit dans le cadre des procédures engagées contre les auteurs présumés de pillages, actes de vandalisme et vols. Parmi les jeunes arrêtés, l'un n'est âgé que de 11 ans.
Alors que David Cameron a promis mercredi que les autorités ne laisseraient pas s'installer une "culture de la peur" dans les rues, les tensions sont montées à Birmingham, où une enquête pour meurtre a été ouverte après la mort de trois hommes tués par un chauffard qui a pris la fuite alors qu'ils patrouillaient dans les rues de leur quartier pour empêcher les déprédations. Selon des habitants, les victimes, issues de la communauté asiatique, étaient âgées entre 21 et 31 ans. La police a annoncé l'arrestation d'un homme soupçonné de meurtre dans le cadre de l'affaire.
Plan de rigueur critiqué
Certains travaillistes commencent à dire tout haut que le plan de rigueur du gouvernement a contribué à faire monter la tension sociale (voir ci-contre). "Le plus grand test pour Cameron est arrivé. Est-il à la hauteur de la tâche?", s'interrogeait mercredi le quotidien "The Independent".
Considérés comme des parias par Londres et la communauté internationale, la Libye et l'Iran n'ont pas raté l'occasion pour dénoncer la "répression" des émeutiers en Grande-Bretagne, Tripoli allant jusqu'à affirmer que le Premier ministre britannique a "perdu sa légitimité".
agences/cab
L'addition sera salée
La facture des émeutes qui ont secoué Londres et d'autres villes anglaises depuis le week-end dernier atteindra sans doute le seuil des 200 millions de livres (235 millions de francs), selon des estimations provisoires jeudi des assureurs et de groupements professionnels.
Dans un communiqué, le Centre de recherche pour le commerce de détail (CRR) a estimé à au moins 80 millions de livres le manque à gagner pour les commerçants ayant dû fermer leurs magasins en raison des émeutes. Les opérations de nettoyage et les réparations pour les commerces directement affectés étaient chiffrés mercredi à plus de 60 millions de livres - qui devraient être au moins partiellement couvertes par les assurances.
De son côté, l'Association des assureurs britanniques (ABI) a chiffré la facture pour le secteur à "largement au-dessus de 100 millions de livres", en insistant sur le caractère provisoire de cette estimation. L'ABI a souligné que l'évaluation des dommages était compliquée par les difficultés rencontrées pour accéder à l'intérieur des bâtiments saccagés. Ni la police ni l'ABI n'ont encore fourni d'estimation globale sur le nombre de maisons ou de voitures brûlées durant les violences.
L'opposition britannique, tout en condamnant fermement les émeutiers accuse les coupes budgétaires sans précédent du gouvernement. Celles-ci ont selon elle contribué au ressentiment de populations déjà marginalisées.
L'ancien maire travailliste de Londres Ken Livingstone, très marqué à gauche et qui espère reprendre en 2012 son siège au conservateur Boris Johnson, a été l'un des plus clairs: "Si vous effectuez des coupes massives, il y a toujours une possibilité qu'une révolte de ce genre survienne".