Peu après l'annonce de son arrestation, les appels à son jugement devant la CPI se sont multipliés sur le plan international. La CPI elle-même a souligné que les autorités libyennes avaient l'"obligation" de leur remettre le fugitif.
Jugé en Libye?
Le ministre libyen de l'Information Mahmoud Chammam a pour sa part toutefois déclaré qu'il sera jugé dans son pays plutôt que d'être transféré devant la CPI de La Haye.
Confirmant la capture officiellement en soirée, le Premier ministre libyen par intérim Abdel Rahim al-Kib a affirmé qu'il serait jugé lors d'"un procès équitable".
"Le système judiciaire va communiquer avec la Cour pénale internationale (CPI) pour examiner où Seif al-Islam doit être jugé", a-t-il souligné. Ses crimes graves sont passibles de la peine de mort, a souligné le ministre de la Justice Mohammed al Alagy.
Le procureur de la CPI Luis Moreno-Ocampo a lui annoncé qu'il allait se rendre en Libye dans une semaine pour évoquer le sort de Seif al-Islam. "Je vais me rendre en Libye pour parler de la façon dont nous gèrerons le dossier. Mais la nouvelle, c'est que Seif sera jugé. Où et comment, c'est ce dont nous discuterons", a-t-il dit à la presse.
Arrêté en plein désert
Longtemps présenté comme le successeur potentiel de son père, Seif al-Islam "a été arrêté dans le Sud libyen", a déclaré samedi Mohammed al-Allagui, le ministre de la Justice et des droits de l'Homme au sein du Conseil national de transition (CNT), sans préciser la date de sa capture.
Le chef "des opérations des thowar (révolutionnaires) de Zenten", Bachir Taïb, a précisé que ses hommes avaient "arrêté Seif al-Islam avec trois de ses collaborateurs", en plein désert, à 70 km de la petite ville pétrolière d'Obari, au sud-ouest de l'oasis de Sebha.
L'arrestation s'est déroulée dans la nuit de vendredi à samedi, vers minuit, selon plusieurs sources. Une quinzaine de combattants originaires de Zentane, circulant à bord de trois véhicules, sont intervenus sur la foi d'un renseignement faisant mention d'un fugitif de haut rang. Ils ont intercepté deux voitures transportant Seif al-Islam et d'autres personnes. Le fils Kadhafi est ensuite arrivé dans l'après-midi à l'aéroport de Zenten, à 170 km au sud-ouest de Tripoli, selon des images filmées avec une caméra par un combattant ex-rebelle.
"Il nous a demandé de lui tirer une balle dans la tête"
"Contrairement à ce qui a été dit dans certains médias, il ne nous pas proposé de l'argent, il nous a demandé de lui tirer une balle dans la tête et qu'on l'amène (mort) à Zenten", a raconté pour sa part Al-Ajmi al-Atiri, le chef de la brigade de Zenten qui arrêté le fugitif, lors d'une conférence de presse.
D'après ces images, il est descendu de l'avion dans une grande pagaille, une foule de combattants et de curieux se bousculant pour le voir, le filmer et même le frapper. Arborant une barbe poivre et sel, il portait un turban et un long manteau marrons, une partie de ses doigts était bandée. Aucune expression n'était lisible sur son visage, mais il semblait en bonne santé, malgré sa blessure aux doigts, toujours selon ces images.
Selon des chefs militaires pro-CNT il y a un mois, Seif al-Islam a été blessé dans le bombardement de son convoi alors qu'il quittait Bani Walid (170 au sud-est de Tripoli) lors de la chute de ce bastion pro-Kadhafi à la mi-octobre.
Mandat d'arrêt de la CPI
Agé de 39 ans, le fils de Kadhafi a longtemps semblé vouloir moderniser son pays et normaliser les relations avec l'Occident. Mais dès le déclenchement de l'insurrection à la mi-février, il n'a eu de cesse de tenir un langage guerrier, tentant bec et ongles de sauver le régime de son père.
Il fait l'objet d'un mandat d'arrêt de la CPI sur des soupçons de de crimes contre l'humanité, depuis le 27 juin. Il est accusé d'avoir joué un "rôle-clé dans la mise en oeuvre d'un plan" conçu par son père pour "réprimer par tous les moyens" le soulèvement populaire.
Scènes de liesse
Seif al-Islam n'était plus apparu en public depuis la nuit du 22 au 23 août lorsque, donné pour capturé par la rébellion, il avait paradé devant les journalistes étrangers en assurant que tout allait "bien" à Tripoli, quelques heures avant la chute du QG de Kadhafi dans la capitale.
Des scènes de liesse dans toute la Libye ont accompagné l'annonce de la capture. A Tripoli et Benghazi, l'ancienne "capitale" de la rébellion dans l'Est du pays, des klaxons et des tirs de joie ont par exemple retenti pour célébrer l'annonce de l'arrestation.
agences/sbo/hof
Un clan décimé... et disséminé
Seif al-Islam était le dernier des fils de Mouammar Kadhafi encore recherché en Libye.
Trois de ses frères ont été tués pendant le conflit, Seif al-Arab dans un bombardement de l'Otan en avril, Khamis dans des combats après la chute de Tripoli fin août et Mouatassim après son arrestation à Syrte le 20 octobre.
Les autres enfants de l'ancien dirigeant ont trouvé refuge dans des pays voisins, Mohamed, Hannibal et Aïcha en Algérie avec Safiya, la veuve de Kadhafi, et Saadi au Niger.