La Suisse réduira son trafic aérien au-dessus du sud de l'Allemagne depuis l'aéroport de Kloten. "Nous n'avons pas encore de chiffres précis. La Suisse a obtenu en compensation plus de capacité de vols en matinée et en soirée, créneau horaire où la Suisse avait besoin de plus de flexibilité", a indiqué samedi Doris Leuthard lors d'une conférence de presse commune avec son homologue allemand Peter Ramsauer.
Les réactions à cet accord ne se sont pas faites attendre. Alors que les partis bourgeois et economiesuisse saluent le compromis trouvé, le PS se montre modérément optimiste. Seule l'UDC est mécontente.
Accord signé avant l'été
Les deux ministres se sont félicités de cette déclaration d'intention, qui se concrétisera en un accord signé avant l'été 2012. "C'est un grand pas un avant, nous tenons à parvenir à une signature avant les élections allemandes de cet automne", a dit pour sa part Peter Ramsauer. "Les deux pays ont dû faire des concessions", a souligné la conseillère fédérale.
Doris Leuthard et Peter Ramsauer comptent également sur les développements technologiques pour réduire le bruit des avions: "si les nuisances sonores diminuent par ce biais, le nombre d'avions pourra à nouveau augmenter", a assuré la ministre des transports. La compagnie Swiss entend remplacer la moitié de sa flotte aérienne avant 2020, a-t-elle précisé. Une remarque qui satisfait economiesuisse.
Le chemin est encore long
La porte-parole de l'aéroport de Zurich Sonja Zöchling estime qu'il est trop tôt pour porter un jugement sur l'accord et ses effets sur Kloten. Il est toutefois positif que les autorités en charge des transports soient tombés d'accord, même si le chemin vers un traité est encore long.
La maire de Zurich Corine Mauch se réjouit que les choses bougent enfin dans ce dossier enlisé, a-t-elle fait savoir. Reste à attendre les détails des négociations annoncées. Pour Zurich, une amélioration pour la population au sud de l'aéroport, très éprouvée par les nuisances sonores, pèse de tout son poids.
Réactions contrastées sur l'échiquier politique
"Enfin une solution a été trouvée!", a déclaré Markus Hutter, conseiller national PLR zurichois et président de la commission des transports. Ne connaissant pas tous les points de l'accord, il met cependant en garde. "Le diable se cache dans les détails".
Un point de vue partagé par Jacqueline Fehr, conseillère nationale socialiste zurichoise et membre de la commission des transports de 1999 à 2011. "C'est un bon signal, mais il faut rester prudent", a-t-elle dit. A cause de ces "détails qui comptent", elle s'attend à des négociations ardues et à un passage difficile devant le Parlement. Elle est rejointe sur ce point par le "Groupe de travail trafic aérien" (AFV), qui affiche un optimisme contenu.
Pour le PDC, il s'agit d'une percée réjouissante, que la porte-parole Marianne Binder met sur le compte de la conseillère fédérale démocrate-chrétienne Doris Leuthard. Le PBD espère quant à lui que l'accord ne se fera pas aux dépens de la Suisse.
C'est du côté de l'UDC que le mécontentement se fait sentir: "Une fois de plus, on a cédé vis à vis de l'Allemagne", a estimé à chaud Toni Brunner. Selon le président de l'UDC, il est "absurde" que ce soit la région la moins peuplée aux alentours de l'aéroport de Kloten qui soit la plus protégée. D'autant plus que "l'Allemagne profite de l'aéroport de Zurich".
Mécontentement des riverains
La grogne de centaines de personnes vivant dans des zones proches de l'aéroport s'est amplifiée peu à peu. En novembre 2011, les citoyens du canton de Zurich ont toutefois refusé une initiative qui voulait empêcher que Kloten poursuive son développement en construisant de nouvelles pistes ou en agrandissant des pistes existantes.
Suite à cette décision, Doris Leuthard avait fait part de son soulagement: la ministre craignait qu'un "oui" ne rende plus difficiles encore les négociations en cours avec l'Allemagne.
Un vieux contentieux
Le problème du bruit des avions à l'aéroport de Zurich est un contentieux vieux de plusieurs décennies entre la Suisse et l'Allemagne. En 2003, l'Allemagne avait interdit aux avions atterrissant à l'aéroport de Zurich de survoler le sud du pays, le Bade-Wurtenberg, aux aurores et en fin de soirée en raison des nuisances sonores.
La Suisse avait fait recours auprès de la Cour de justice de l'Union européenne, qui avait estimé en 2010 que la mesure de Berlin était "proportionnée". Depuis 2009, un groupe de travail germano-suisse menait une analyse conjointe du problème des nuisances sonores afin de déterminer les options envisageables.