Au lendemain de l'acceptation par le peuple de l'initiative de Franz Weber pour limiter la construction de résidences secondaires, les régions de montagne déplorent le manque de clarté du texte. Elles s'attendent à une longue période d'incertitude, tandis qu'un groupe de travail dirigé par l'Office fédéral du développement territorial a été chargé d'élaborer sa mise en oeuvre.
Respect des promesses de campagne
Alors que l'entrée en force de la loi n'est pas clairement définie, il reste "beaucoup de points incertains", notamment la définition de la résidence secondaire ou du lit froid, relève Thomas Egger, directeur du groupement suisse pour les régions de montage. Ce dernier appelle lundi dans un communiqué les initiants à respecter les promesses faites pendant la campagne, à savoir d'intégrer des exceptions dans la loi d'application.
Les régions de montagne demandent en particulier que les appartements exploités touristiquement ne soient pas pris en compte dans la limite de 20% de résidences secondaires par commune exigé par l'initiative. De même, une résidence secondaire déjà existante doit le rester lors d'une revente.
"Une autre question qui reste ouverte est de savoir s'il sera possible de transformer une résidence principale ou un mayen en résidence secondaire", ajoute Jean-Michel Cina, directeur de l'économie valaisanne et président de la Conférence des directeurs cantonaux de l'économie.
Problèmes juridiques
En Suisse centrale, les maires de Flühli-Sörenberg (LU) et d'Engelberg (OW) dénoncent aussi un "oui" à l'initiative "qui ouvre une période pleine d'incertitude avec des problèmes juridiques à la clé". A Engelberg par exemple, de nombreux propriétaires de résidences secondaires ont fini par s'installer définitivement dans la station, souligne son maire.
Seuls les Grisons réagissent sereinement. Les hauts lieux touristiques du canton ont déjà contingenté ce type de constructions, explique Carlo Decurtins, juriste au département cantonal de l'économie.
"La mise en oeuvre du texte ouvre beaucoup de questions juridiques, auxquelles l'initiative ne répond pas clairement", confirme Anetta Bundi, porte-parole du Département fédéral de l'environnement. Le DETEC a chargé un groupe de travail d'élaborer des propositions de réponse à ces questions. Placé sous la houlette de l'Office fédéral du développement territorial, il accueillera également des initiants en son sein.
Une chance pour l'hôtellerie?
L'acceptation de l'initiative devrait en tout cas faire souffrir le secteur du bâtiment dans les régions de montagne, avec une diminution de 5% à 8% des emplois selon les métiers, prévoit lundi Credit Suisse. L'hôtellerie devrait en revanche tirer son épingle du jeu.
Avec la limitation des résidences secondaires, la croissance dans les destinations touristiques passera par l'hôtellerie, estime la banque, qui s'attend en outre à un effondrement des prix du terrain.
Le développement de ce secteur est aussi l'une des pistes évoquées par Jean-Michel Cina pour passer d'un tourisme de construction à un tourisme d'exploitation: "Des solutions envisagées par le Valais sont d'augmenter les zones hôtelières, de favoriser l'hôtellerie par des réductions fiscales au niveau fédéral et de créer des Resorts", soit des complexes de loisirs hôteliers.
Indemnités demandées
Les cantons alpins voient dans la décision du peuple une restriction de leur développement économique. Ils demandent donc que soit envisagé le versement d'indemnités aux régions de montagne pour leur contribution à la protection du paysage.
Pour le directeur de la Conférence gouvernementale des cantons alpins Fadri Ramming, cette contribution pourrait être prévue dans les dispositions d'exécution de l'initiative, dans la loi fédérale sur la protection de la nature ou dans le cadre de la péréquation financière. "C'est une piste à examiner, mais elle est subsidiaire", réagit pour sa part Jean-Michel Cina.
ats/jzim
Les Banques prévoient une hausse de la valeur des résidences secondaires
Du côté du monde de la finance on estime par contre que les propriétaires d'un chalet ou d'une maison de vacances à la montagne devraient remercier Franz Weber, car l'acceptation de son initiative pourrait faire exploser la valeur de leur bien immobilier, prévoient lundi des banques suisses.
Les résidences secondaires existantes devraient pouvoir être vendues à des montants considérablement plus élevés que leur prix d'achat, écrit Credit Suisse dans une analyse des résultats des votations de dimanche. Ce genre de biens devrait se raréfier sur le marché, car les propriétaires hésiteront à vendre s'ils ne sont pas certains de pouvoir acquérir un nouveau logement de vacances.
Le porte-parole de la Raiffeisen Franz Würth arrive à la même conclusion. Il fait par ailleurs remarquer que les habitants des régions de montagne ne profiteront pas forcément de cette manne: "Ce ne sont pas les indigènes qui acquerront des résidences secondaires hors de prix". Ces derniers pourraient en revanche bénéficier de meilleures conditions pour construire une résidence