Après les livres "dont vous êtes le héros", les créateurs de "Black Mirror" proposent le "film dont vous êtes le scénariste". Un film interactif pour annoncer la saison 5 de la série est disponible depuis vendredi sur la plateforme en ligne Netflix.
Intitulé "Bandersnatch" - du nom d'une créature d'un roman de Lewis Carroll- cet épisode spécial propose un concept novateur dans l'univers des séries et des films.
Des choix qui influencent la suite du récit
L'intrigue se déroule au début des années 1980. Le téléspectateur se glisse dans la peau d'un jeune programmeur informatique à qui l'on propose d'adapter un roman fantastique en jeu vidéo.
Au fur et à mesure du déroulement du film, il est amené à faire des choix qui influencent la suite du récit. Ces choix vont de la marque de céréales du petit-déjeuner à des décisions cruciales pour la narration.
"Cela permet, d'une part, de faciliter l'immersion, mais aussi de se rendre compte que, si on joue avec le film, on en devient un personnage", a décrypté vendredi sur la Première Marc Atallah, directeur de la Maison d'Ailleurs à Yverdon-les-Bains (VD).
"Mise en abîme"
"Bandersnatch" repose sur "une sorte de mise en abîme", a expliqué samedi dans Forum François Jost, professeur émérite à la Sorbonne Nouvelle et directeur de la revue "Télévision".
"On apprend dans l'une des directions que le personnage est contrôlé par un truc qui s'appelle Netflix, où les gens peuvent agir sur lui, mais il ne sait pas du tout ce qu'est Netflix (...). Il y a un jeu entre le personnage qui fait le jeu interactif, et nous qui jouons avec le personnage.".
"Certains choix sont subvertis"
Après avoir visionné plusieurs versions alternatives de "Bandersnatch", François Jost estime toutefois que les interactions possibles sont assez limitées.
Les choix que fait le téléspectateur "influencent directement sur la séquence suivante (...) mais c'est quand même une histoire linéaire sur le long terme", a décrit le spécialiste. Selon lui, certaines options n'en sont pas vraiment et l'internaute est parfois influencé.
En outre, "en avançant dans l'histoire, on s'aperçoit que certains choix qu'on a faits (...) sont subvertis" car des événements que l'on n'a pas choisis se produisent tout de même, a poursuivi François Jost.
"Le héros dit à un moment: 'les joueurs ont l'impression d'être libres mais en fait c'est moi qui décide', et on finit par avoir assez rapidement cette impression aussi."
Frontière floue entre jeu vidéo et série
Pour François Jost, ce film peut en tout cas conquérir un nouveau public car il fait du téléspectateur un joueur. "C'est une fiction, mais son plus est d'être essentiellement ludique. La frontière entre le jeu vidéo et les séries est de plus en plus floue."
L'histoire tentaculaire et ses nombreuses ramifications devraient occuper un moment les plus mordus: selon les choix qui sont opérés, le film peut durer jusqu'à cinq heures et se conclure de treize manières différentes.
ptur