La tombe d'Howard Carter n'est pas ornée de décorations fastueuses, mais d'une simple stèle noire sur laquelle est gravée l'inscription ci-dessous.
Puisse ton esprit vivre, puisses-tu vivre des millions d'années, toi qui aimas Thèbes, ton visage face au vent du nord et tes yeux contemplant le bonheur.
Elle provient de l'une des coupes d'albâtre que l'égyptologue britannique trouva en novembre 1922 dans la tombe de Toutânkhamon. Une découverte qui fit de l'enfant pharaon le plus célèbre souverain d'Egypte et permit à Carter d'entrer dans l'Olympe de l'archéologie moderne.
Artiste de talent, archéologue par hasard
Artiste de talent, Howard Carter est devenu archéologue par hasard, grâce à une connaissance de son père. En 1891, âgé de 17 ans seulement et n'ayant aucune formation dans ce domaine, il est engagé comme dessinateur dans l'équipe de Flinders Petrie.
Ce pionnier de l'égyptologie dirige alors une expédition de six ans, durant laquelle Carter va visiter les nécropoles de Beni Hassan (site du Moyen Empire), Hatnoub et Tell el-Amarna ainsi que le temple d'Hatchepsout à Thèbes.
Grâce à cette expérience, Carter développe une passion sincère pour l'archéologie et hérite, au contact de Petrie, d’une attitude rigoureuse et appliquée à l'égard de cette discipline. Si les premiers égyptologues ont été à peine plus que des chasseurs de trésors, Petrie fait alors figure de pionnier avec ses méthodes de travail scientifiques: de la conception à l'exécution des travaux de fouilles, de l'annotation de la stratigraphie à la tenue de cartes précises.
La force de la persévérance
En 1905, Carter fait la connaissance de George Herbert, cinquième comte de Carnarvon, qui lui offre toutes les ressources nécessaires au financement de nouvelles fouilles dans la Vallée des rois, jadis utilisée comme cimetière pour les pharaons du Nouvel Empire. Si de nombreuses tombes royales avaient déjà été découvertes dans cette région, elles avaient toutes été vidées dans l'Antiquité. Carter pensait toutefois qu'il en manquait une.
Les premières années furent peu fructueuses. Les recherches furent interrompues par la Première Guerre mondiale, avant de reprendre de plus belle en 1917. Lord Carnarvon dépensait alors beaucoup d'argent, sans être pour autant satisfait des résultats obtenus par son archéologue. En 1922, il lui accorda un dernier financement espérant qu'il trouverait enfin le tombeau du pharaon perdu.
Le 4 novembre 1922, après avoir excavé jusqu'au substrat rocheux le périmètre situé à proximité du tombeau de Ramsès VI , Carter découvrit seize marches descendant vers une porte bloquée. Sa persévérance était enfin récompensée.
Un triomphe pour l'archéologie
"Je vois des choses merveilleuses". Tels furent les premiers mots prononcés par Carter lorsqu'il entra dans le tombeau. Et pour cause! Cette tombe abritait un nombre inimaginable d'objets funéraires: chars, lits, coffres, boîtes, objets rituels singuliers et bien d'autres merveilles encore. Autrement dit, le trousseau funéraire presque intact du pharaon.
Pour la première fois dans l'histoire, on venait de découvrir un tombeau royal ayant traversé les âges dans des conditions quasiment préservées. Aucun autre archéologue ne s'était jamais retrouvé face à quelque 5000 objets d'une extrême fragilité, y compris le sarcophage et la momie du pharaon, qui avaient un besoin absolu d'être conservés. Car à la seconde où la porte s'était ouverte, toutes les pièces archéologiques s'étaient trouvées menacées par le brusque changement des conditions ambiantes.
Il fallut à Carter une dizaine d'années pour cataloguer et conserver minutieusement tous les trésors contenus dans le tombeau, parmi lesquels des vases canopes des plus précieux, des sarcophages en quartzite, des ustensiles et des objets entièrement recouverts d'or ainsi que le célèbre masque funéraire de Toutânkhamon. Un patrimoine inestimable dont l'essentiel est aujourd'hui conservé et présenté au public au Musée égyptien du Caire.
La malédiction de Toutânkhamon
L'énorme campagne publicitaire organisée à l'époque par le Times, auquel Lord Carnarvon avait vendu l'exclusivité, contribua au succès de la découverte, mais également à son mythe. Le journal anglais était alors le seul autorisé à publier des interviews, des comptes rendus et des notes sur les fouilles les plus célèbres de toute l'histoire.
Cette exclusivité conduit à une situation paradoxale, où les autres journaux étaient contraints de publier des informations de seconde main, le plus souvent inexactes. Il s'en est suivi une énorme campagne de dénigrement à l'égard de la découverte de Carter. Alimentée par le décès de Lord Carnarvon peu de mois après l'ouverture du tombeau, elle atteignit son apogée en donnant naissance à la légende de la malédiction du pharaon.
En 2002, le chercheur australien Mark Nelson publia dans le British Medical Journal un article démontrant de façon scientifique le caractère infondé de la malédiction. En moyenne, les personnes présentes au moment de la découverte et de l'ouverture du tombeau moururent dans un délai d'une vingtaine d'années. Tel fut le cas d'Howard Carter lui-même, décédé à Londres le 2 mars 1939.
Bien qu'il ne fut jamais honoré par la Couronne britannique pour ses découvertes inestimables, il n'en demeure pas moins l'un des archéologues les plus connus de tous les temps.
Andrea Sala (RSI)/Adaptation web: Miruna Coca-Cozma
L'article a été publié sur le site de RSI (en italien).