Le 15 mai 1889, s'ouvrait à Paris l'Exposition universelle, coïncidant avec le centenaire de la Révolution française. Clou de la manifestation, une tour en fer de 324 mètres de haut pour témoigner du savoir-faire technique de la France. Erigée en plus de deux ans, sa construction devient un événement en soi.
Quelques mois avant l'inauguration, le public se presse au Champ-de-Mars pour voir l'avancée des travaux tandis que se déchaîne une certaine intelligentsia. Guy de Maupassant parle "d'un squelette géant et disgracieux", le poète et dramaturge François Coppée évoque un "mât de fer aux durs agrès, inachevé, confus, difforme" et l'écrivain et critique Joris-Karl Huysmans la compare à "un suppositoire criblé de trous".
Une lettre signée par de nombreux artistes et "amateurs de la beauté jusqu'ici intacte de Paris" dénonce "l'érection au coeur de la ville de cette inutile et monstrueuse tour Eiffel" qui "écrasera de sa masse barbare Notre-Dame, la Sainte-Chapelle, la tour Saint-Jacques, le Louvre, le dôme des Invalides, l'Arc de Triomphe, tous nos monuments humiliés, toutes nos architectures rapetissées..."
Les polémiques s'éteignent au fur et à mesure que le public afflue devant cet édifice qui a été le plus haut du monde jusqu'à la construction du Chrysler Building, à New York, en 1930. Il faut cependant attendre les années 60 et le tourisme international pour que la tour Eiffel devienne le 3e monument le plus visité en France, et 1991 pour qu'elle soit inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco.
Sujet radio: Caroline Stevan/mcm