Avec le Sénat de l'Etat d'Alabama qui vient de voter la loi la plus répressive des Etats-Unis en matière d'avortement et qui prévoit des peines de prison de 10 à 99 ans pour les médecins pratiquant l'IVG, il y a comme un air de "La Servante écarlate" qui plane. Seules exceptions: lorsqu'il y a urgence vitale pour la mère ou une "anomalie létale" du fœtus.
Comme si le roman dystopique de Margaret Atwood sorti en 1985, qui a inspiré un film en 1990 et une série télévisée, avait inspiré la réalité.
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L'oeuvre de science-fiction décrit un monde dans lequel la pollution et les maladies sexuellement transmissibles font drastiquement baisser la fécondité. Une secte, les "Fils de Jacob", a pris le pouvoir. Les femmes ne sont plus citoyennes. Celles qui sont encore fécondes portent de longues tuniques rouges. Ce sont les servantes écarlates. Elles ne sont là que pour procréer, selon les règles établies par les hommes.
Une loi hyper restrictive
La loi voté en Alabama n'est pas une exception. Depuis le début de l'année, 28 des 50 Etats américains ont mis en place plus de 300 nouvelles règles pour limiter l'accès à l'avortement, selon l'Institut Guttmacher qui défend le droit des femmes à l'IVG, cité par AFP.
La réalité rejoint la fiction
Depuis plusieurs mois, le costume rouge à coiffe blanche de la série "La Servante écarlate" se matérialise lors de manifestations bien réelles notamment en Argentine, en Irlande, en Pologne, en Alabama, au Texas, et en Belgique. Là où le droit à l'avortement est menacé, la silhouette écarlate n'est pas loin. Une appropriation de son travail qui a bouleversé la costumière de la série - elle a quitté le tournage avant la saison trois. "Je voulais que les gens aient peur. Je voulais que ce soit à la fois normal et terrifiant", déclarait-elle au journal La Croix.
Les hommes portent des blouses blanches, comme celles que portaient les médecins ou les savants. Chacun a un placard suspendu autour du cou pour indiquer pourquoi il a été exécuté: le dessin d'un fœtus humain. Donc ils étaient médecins, dans le temps d'avant, quand pareilles choses étaient légales… mais ce n'est pas une excuse: leurs crimes sont rétroactifs.
Dans la réalité, les médecins d'Alabama ne risqueraient pas la pendaison, mais jusqu'à 99 ans de prison. Autant dire, la mort. Au conditionnel, parce que ces décisions anti-avortement sont souvent combattues en justice, bloquées par les tribunaux. Mais cela ne dérange pas les "pro-life".
Leur objectif avoué c'est d'arriver, de recours en recours, jusqu'à la Cour suprême. Une instance désormais dominée par les juges conservateurs, qui auraient ainsi l'occasion de revenir sur une décision emblématique de 1973. Une décision qui reconnaissait aux femmes le droit d'avorter tant que le fœtus n'est pas viable.
La réalité qui rejoint la fiction, la fiction qui s'immisce dans la réalité. Avec cette certitude: le corps des femmes ne leur appartient toujours pas.
Sujet radio: Antoine Droux
Adaptation web: Lara Donnet
"The Handmaid's Tale: La Servante écarlate", saison 2, à voir en replay 7 jours sur PlayRTS.