Qu'auraient pensé Morris et Goscinny de ce Lucky Luke new look,
version Jean Dujardin? Un cow-boy certes solitaire et toujours
flanqué de son fidèle Jolly Jumper, mais un brin plaisantin et
plutôt dragueur. Il pousse même le vice jusqu'à se frotter
lascivement la fesse ou à frapper une femme...
Après "Brice de Nice" et "Hellphone", Jean Dujardin et le
réalisateur James Huth livrent une troisième collaboration,
co-scénarisant ce curieux long-métrage. "Lucky Luke" enchantera les fans de
"Braïce" et de "OSS 117". Mais les bédéphiles partiront en courant,
comme souvent lors des adaptations de BD, "Astérix: Mission
Cléopâtre" excepté.
Un Dujardin très ressemblant
La qualité première de ce "Lucky
Luke" d'un nouveau genre est sans doute son casting, qui surpasse
largement le scénario. Le synopsis le dit de lui-même: le cow-boy
revient à Daisy Town pour débarrasser la ville de ses affreux
bandits. On va donc davantage assister à une suite de duels à
revolvers tirés plutôt qu'à une véritable histoire
construite.
On peut toutefois laisser à Dujardin une interprétation originale
du "poor lonesome". Avec en plus une ressemblance certaine avec le
héros du far-west. Il faut dire qu'il est aidé par un costume
parfaitement fidèle à celui de Lucky Luke (du bandana rouge au
colt, tout y est) et par des décors dignes des bons westerns.
Billy the Youn et Calamity Testud
Pour camper les méchants caïds de
Daisy Town et les belles séductrices du saloon, des acteurs
confirmés ont été appelés à la rescousse. Mais tous ne relèvent pas
le défi du revolver.
En premier lieu, Michaël Youn peine à s'imposer en Billy the Kid
immature et geignard. Son duo, qui se voulait explosif, avec Jesse
James (Melvil Poupaud), tombe vite dans la parodie. Et Alexandra
Lamy, la chouchou de Dujardin, peine à convaincre en chanteuse
cherchant à émoustiller Lucky Jean.
Le toujours drôle Daniel Prévost (qui interprète un Pat Poker
lâche et méchant) et Sylvie Testud (vraiment bluffante en Calamity
Jane rustaude) sauvent la mise de cet étrange mariage entre le
western et le comique français.
La sombre Palme d'Or de Michael Haneke
Un tout autre registre maintenant. Si
vous avez envie d'une comédie guillerette et désinvolte, rebroussez
chemin. "Le ruban blanc" de Michael Haneke n'est pas de ceux-là,
bien au contraire. Ce douloureux film encensé par la critique est
noir, sombre, blessant.
Ce long-métrage a reçu la Palme d'Or cette année à Cannes, des
mains de la présidente Isabelle Huppert, récompensée elle aussi en
2001 pour son rôle dans "La Pianiste", de Michael Haneke
justement.
De l'avis unanime, on sort étouffé et anesthésié de cette
évocation de la vie ordinaire d'un petit village allemand en 1914.
Une vie ordinaire qui laisse rapidement entrevoir la sournoise
montée de l'extrémisme nazi.
Un lourd ruban qui enchaîne les enfants
"Le ruban blanc" évoque tout d'abord les enfants d'un bourg de
l'Allemagne du Nord soumis à un protestantisme rigoureux. "Eine
deutsche Kindergeschichte", dit le sous-titre. Mais on est loin du
conte pour enfants, il s'agit plutôt un cauchemar quotidien, sans
aucune violence manifeste.
Au début du film, d'étranges accidents commencent à perturber ce
patelin sans histoire. Les notables (baron, pasteur, médecin,...)
sont sur le qui-vive. Les enfants posent des questions qui
fâchent.
L'occasion d'évoquer la mort, la liberté, la maladie, la
culpabilité. Le tout en noir et blanc, comme pour enlever toute
couleur à une vie déjà bien pâle.
Frédéric Boillat
L'agenda cinéma
Les sorties du 21 octobre
"Lucky Luke", de James Huth. Avec Jean Dujardin, Michaël Youn, Sylvie Testud, Alexandra Lamy, Daniel Prévost, Melvil Poupaud.
"Le ruban blanc", de Michael Haneke. Avec Ulrich Tukur, Susanne Lothar, Josef Bierbichler.
Les sorties du 28 octobre
"Micmacs à Tire-Larigot", de Jean-Pierre Jeunet. Avec Jean-Pierre Marielle, André Dussolier, Dany Boon, Julie Ferrier.
"Cineman", de Yann Moix. Avec Pierre Richard, Franck Dubosc.
"Michael Jackson this is it", documentaire de Kenny Ortega. Avec Michael Jackson.
"Panique au village", film d'animation de Stéphane Aubier et Vincent Patar.
L'info cinéma de la semaine
L'équipe britannique des Monty Python a été distinguée cette semaine pour l'ensemble de son oeuvre à l'occasion d'une cérémonie organisée à New York pour les 40 ans de sa création. La récompense a été remise par la British Academy of Film and Television Arts.
Sur les six membres de l'équipe d'origine, cinq sont encore vivants: John Cleese, Terry Gilliam, Eric Idle, Terry Jones, Michael Palin. Graham Chapman est décédé en 1989.
Les célèbres comiques ont créé l'émission "Monty Python's Flying Circus", diffusée à partir de 1969 à la TV britannique avant de se lancer dans le cinéma populaire avec des films comme "Sacré Graal" et "La vie de Brian".
Les cinq membres du groupe se sont pliés au jeu des questions du public. Le souvenir le plus embarrassant avoué par John Cleese fut le moment "où la reine est descendue pour voir et que mon pantalon est tombé".
Lors de la cérémonie, un nouveau documentaire a été diffusé: "Monty Python: presque la vérité".