Samia est une CPE, une conseillère principale d’éducation. Dans sa nouvelle école située dans la cité des Francs-Moisins, en Seine-Saint-Denis, elle va s’occuper du service de "La vie scolaire", où elle va gérer une équipe de surveillants et faire le lien entre l’administration, les professeurs et les élèves. Un rôle social qui ne sera pas de tout repos dans cet établissement réputé difficile.
Yanis, un adolescent qui n’a pas confiance en son potentiel
Le Franc-Moisin, c’est aussi le quartier d’origine de Mehdi Idir. Le personnage du jeune Yanis, élève au fort potentiel gâché par un environnement peu encourageant, est aussi inspiré de la vie du réalisateur.
"Yanis a beaucoup de talent et beaucoup d’esprit, mais je pense qu’il n’a pas suffisamment confiance en lui. Il a aussi un contexte familial difficile", explique la comédienne Zita Hanrot, qui joue le rôle de Samia. "Elle voit ce potentiel en train d’être gâché – c’est une jeune CPE qui a envie d’aider et de faire au mieux son métier, donc elle ne peut pas l’abandonner."
Des habitants et des élèves qui s’impliquent
Dès le début, les réalisateurs ont impliqué les habitants du quartier: "Le tournage s’est très bien passé", se souvient Mehdi Idir. "Ce qui est important, c’est que tous les habitants du quartier fassent partie intégrante du projet. On a fait travailler environ 400 personnes. Je pense que si tu viens juste sur les lieux et que tu n’intègres personne au projet, les gens ne seront pas contents et à raison."
Un gros tournage comme le nôtre, ça bouleverserait la vie de n’importe quel quartier.
Tous les adolescents qui jouaient le rôle des élèves faisaient leurs premiers pas au cinéma. Zita Hanrot était impressionnée: "Je les ai trouvés extrêmement professionnels et concentrés. C’était aussi grâce à Fabien et Mehdi, qui sont très généreux dans leur façon de diriger et qui nous mettent à l’aise". Cela n'a cependant pas toujours été facile pour l'actrice: "Au début, c’était très intimidant de jouer avec des adolescents. Je me disais que je n'avais pas le droit de tricher. Parce que s’il n’y a pas de ressenti quand on est en train de jouer, si ce n’est pas "vrai", ils décrochent et c’est normal. Cela m’a demandé encore plus de conviction."
L’éducation, un thème cher à Grand Corps Malade
Que ce soit à travers ses titres "Education Nationale", "Le Blues de l'Instituteur" ou son film, Grand Corps Malade s’attaque au système d’éducation français: "Selon où tu habites, dès que tu commences l’école tu rentres dans un processus inégalitaire. Tu n’as pas les mêmes moyens. Mais si je parle de ce thème, c’est aussi parce que j’aime l’école et que je la défends. J’aime le métier de professeur, et je trouve qu’il est souvent dévalué. Pourtant, les professeurs ont la responsabilité de l’avenir de nos enfants. J’ai beaucoup d’admiration pour ce système, et en même temps il ne marche pas si bien que ça."
On avait envie de rendre hommage aux profs, aux CPE, à tout ce personnel enseignant qui travaille dans des conditions difficiles et qui pourtant y met du cœur.
>>La bande-annonce de "La vie scolaire":
Petit à petit, faire bouger les choses
Lorsqu’on lui parle de la possible influence de son film sur le système éducatif français et son image, Grand Corps Malade est réservé: "On a conscience de l’impact qu’un film peut avoir. Tant mieux s’il fait bouger certaines mentalités. Après, de là à changer le système éducatif français, on s’attaque à une montagne! Malheureusement, je ne pense pas que ce soit un film qui va changer les choses."
Zita Hanrot n’est pas tout à fait d’accord: "Je pense que ce film fait bouger les lignes d’une façon plus petite, dans le sens où après le film, certains des jeunes acteurs ont eu envie de faire du cinéma. Le film leur a permis de découvrir cet univers-là, et de leur montrer qu’il est accessible."
Dans le film, il n’y a pas de clichés. Ils sont tout le temps en train d’être déconstruits, c’est ça qui est intéressant.
Une comédie avant tout
"Dans "La vie scolaire", on est dans un collège. La vanne, c’est une culture, une tradition, une façon de vivre. Nous nous sommes beaucoup amusés à écrire les blagues des dialogues", explique encore Grand Corps Malade. "Dans le film, les élèves sont mis à l’honneur: ils sont beaux, malins, ils ont de l’esprit, ils sont drôles – ce film est avant tout une comédie."
Pendant les 7 semaines qu’a duré le tournage, les élèves ont vu leur vie chamboulée. Les réalisateurs se sont sentis responsables envers ces jeunes, qu’ils ont aussi accompagnés après leur passage aux Francs-Moisins: "Depuis notre départ, on suit les jeunes avec lesquels on a travaillé. On les a faits venir en tournée avec nous. On essaie de les conseiller, et ils sont devenus des potes."
"La vie scolaire" est à voir dès le 28 août 2019 dans les salles de Suisse romande.
Thierry Sartoretti/ms