La crise de la Covid-19 s'accompagne d'une nouvelle rhétorique, d'un nouveau vocabulaire et d'un nouveau champ lexical. Pour Pascal Gygax, directeur du département de psycholinguistique et de psychologie appliquée de l'Université de Fribourg, cette rhétorique n'est pas nouvelle puisqu'on la retrouve dans l'histoire pour d'autres virus, d'autres pandémies.
En revanche, pour Pascal Gygax: "Ce qui est intéressant, c'est de voir à quel point les changements de rhétoriques changent notre comportement. Par exemple, lorsqu'on parle de 'déconfinement', on parle de la fin du confinement, d'un retour à la normale, pourtant, on est plutôt dans une sorte de réadaptation de mesures de confinement. Or si on parle de la fin de quelque chose, on a l'impression que les gens pensent que tout est terminé, que l'on peut faire comme avant".
Changer les termes, changer les attitudes
En changeant les termes, on aurait peut-être pu mieux sensibiliser et mieux prévenir. Le psycholinguiste rappelle qu'au départ, on ne parlait pas de la Covid-19, mais de la pneumonie de Wuhan. Ce terme de "pneumonie", s'il avait été conservé, aurait sans doute empêché les politiques de parler de "petite grippe" ou de "grippette". "Peut-être qu'on aurait évité ce déni qu'on a rencontré au départ", explique Pascal Gygax à la RTS.
Un changement de terme peut changer les mentalités, changer des attitudes. Le langage offre un nombre limité d'options pour parler d'un monde qui est illimité. Ainsi, "notre langage contraint notre attention vers des propriétés particulières qui ne sont pas forcément pertinentes. Dès le moment où l'on a cette attention particulière, on peut partir du principe que le langage est un catalyseur de comportements" souligne le psycholinguiste.
Propos recueillis par Yves Zahno
Adaptation web: Lara Donnet