En septembre 2020, la marque Kenzo s’achète une bonne conscience et annonce un partenariat avec la World Widelife Foundation (WWF) avec l'objectif d'aider à faire doubler la population des tigres d’ici à 2022. Des t-shirts, des hoodies et des basiques sont créés, tous en coton biologique avec le tout nouveau logo de Kenzo: la fameuse tête de tigre revisitée. A l’achat de chaque habit, 10 dollars iront au WWF.
En mettant de côté les considérations écologiques de cette démarche et sans débattre de son efficacité, la collaboration avec le WWF est surtout un merveilleux coup de pub pour la maison Kenzo et un relancement rêvé pour le nouveau logo de la marque, qui s'affiche fièrement dans la garde-robe des influenceurs tel que Kanye West ou Beyoncé.
Avant le logo du tigre, Kenzo Takada était lui-même le visage de la marque. Styliste fleuri et joyeux, il est arrivé à Paris dans les années 1960 où il a bousculé, avec d’autres, le monde "coincé" de la mode à coups de flore exubérante et pleine de couleurs.
Du Japon en France
Quand il débarque à la toute fin 1964 à Marseille, il vient de passer deux mois à bord du paquebot qui relie Yokohama à la cité phocéenne. Kenzo passe sa première nuit en France à faire la fête en discothèque, il est tout près de rater son train pour la capitale.
A son arrivée à Paris, Kenzo précède d’autres créateurs japonais à Paris, comme Issey Miyake (arrivé en 1965), Yohji Yamamoto (fin des années 1970) et la couturière Rei Kawakubo, fondatrice de la marque "Comme des Garçons".
Mais le succès n'arrive pas tout de suite. Ses cinq premières années, il vend des croquis à des maisons de couture. En 1970, il décide d'être son propre patron et ouvre sa première boutique appelée "Jungle Jap". "Jap" deviendra le nom de son label.
Alors qu'il s'apprête partir à la conquête du marché nord-américain, plus précisément New York et ses fashion shows, il réalise que pour certains aux Etats-Unis ce terme peut être offensant. Il rebaptise donc le label avec son prénom. Ce sera Kenzo.
Kenzo style
A son arrivée en France, le créateur japonais comprend que la mode ne veut plus être enfermée dans des salons de couture, ni dans le paternalisme. Finis les défilés tristes à mourir, la mode de Kenzo est colorée et fleurie, surtout pour les collections d’hiver, et s’inspire de la technique du kimono.
Ce sera pendant longtemps sa marque de fabrique et le souvenir de débuts très modestes. Son premier défilé, Kenzo l’organise pour 200 dollars de chutes de tissus récupérés. 50 ans plus tard, les 200 dollars se transforment en millions.
Son style est certes joyeux, mais il ne peut pas être réduit à la seule idée d'allégresse liée aux couleurs et aux imprimés floraux. "Très marqué par les mutations sociales de son temps, il a proposé des vêtements en phase avec son époque, qu'il voulait pratiques et accessibles", explique Xavier Chaumette, historien de la mode dans un article publié par Marie Claire.
En 1990, son partenaire Xavier décède et son associé fait un AVC. Il décide de vendre la société à LVMH en 1993. Depuis 1999, Kenzo n’est plus à la tête de sa maison de couture.
Il se retire du milieu de la mode pour s’adonner à l’art, au yoga et à des projets plus personnels dont une marque de design d’intérieur, K3, une nouvelle graine dont il ne récoltera jamais les fruits.
Sujet radio: Ellen Ichters
Adaptation web: Miruna Coca-Cozma
La vie comme un voyage
Kenzo Takada est né en 1939 à Himeji, près de la ville d'Osaka, au Japon. Il étudie la mode contre la volonté de ses parents et commence à dessiner pour un grand magasin. Les Jeux olympiques de Tokyo de 1964 vont changer sa vie: son appartement se trouve juste à l'endroit où le gouvernement construit des installations. Il est donc payé pour déménager et utilise cet argent pour gagner l'Europe.
Il établit sa marque dans le milieu de la haute couture parisienne, un monde exclusivement blanc. Il est le premier styliste japonais, ouvertement gay, à s'être imposé à Paris, où il a construit toute sa carrière.