Une étude du Zentrum Gender Studies de l’Université de Bâle révèle que les femmes sont peu présentes dans la culture en Suisse, cela aussi bien sur les scènes et dans les expositions que pour les fonctions de gestion et de direction artistique.
"Les résultats démontrent qu'au niveau culturel, il y a encore énormément à faire dans le domaine de l’égalité des chances pour les femmes et les hommes", explique Seraina Rohrer, responsable du secteur Innovation & Société et membre de la direction de la Fondation suisse pour la culture Pro Helvetia. "Des changements concrets sont importants car, sinon, le secteur culturel suisse continuera à se voir privé d’un grand potentiel."
L’amélioration de l’égalité des chances dans le secteur culturel figure parmi les objectifs de la politique culturelle de la Confédération définie par le Message culture 2021 – 2024. C'est l’une des raisons pour laquelle Pro Helvetia et le centre suisse de recherches sociales (Swiss Center for Social Research) ont mandaté le Centre bâlois en Etudes de Genre pour cette première étude, qui devrait être suivie d'autres.
Peu de femmes au pupitre
Les femmes sont minoritaires dans les directions artistiques, mais aussi en tant qu'auteures d'œuvres artistiques. Seules 31% des productions théâtrales examinées étaient mises en scène par des femmes, tandis que 15% des pièces sont l'oeuvre de femmes. Pire, s'agissant des concerts, elles ne sont que 7% au pupitre de cheffe d’orchestre. Parmi les pièces musicales, seules 2% sont l’oeuvre de compositrices.
Que ce soit dans les concerts ou les représentations théâtrales, les lectures ou les expositions, les femmes sont moins visibles que les hommes. L’étendue de leur sous-représentation est toutefois liée à la discipline: dans les arts de la scène et la littérature, la présence féminine se monte à 40-50%, tandis que dans les arts visuels, les femmes représentent environ un tiers des expositions collectives. Dans le cas d’expositions individuelles, elles ne sont que 26%.
Rock, pop et jazz: où sont les femmes?
En musique, les femmes ne disposent que de possibilités très limitées pour se produire: si la part des femmes se monte tout de même à 35% dans les concerts classiques, on ne compte que 9 à 12% de femmes dans les performances rock/pop et dans le jazz.
La faible proportion de femmes dans le secteur de la musique, objectivée par cette étude, fait réagir Helvetiarockt, une association qui s'engage justement pour une plus forte présence des femmes dans l'industrie musicale suisse. Pour changer la donne, elle préconise tout bonnement l'instauration de quotas, fait-elle savoir dans un communiqué. Il est possible de le faire "dans les structures des équipes, des conseils d'administration, des jurys, des collectifs et des organismes de financement", explique Regula Frei d'Helvetiarockt.
Les chances pour les artistes féminines de recevoir un prix ou une subvention sont donc plus faibles. Parmi les 828 remises de prix ou bourses examinées, seules 37,1% des distinctions ont été accordées à des femmes. Dans le domaine théâtre/danse/arts performatifs, la situation est plus équilibrée (50,5% des prix pour les femmes). La musique ferme une fois de plus la marche avec seulement 25,8%.
Les femmes sont également sous-représentées dans les fonctions de direction. Ceci s’applique aussi bien pour les conseils d’administration stratégiques et opérationnels des institutions et organisations culturelles que pour les associations professionnelles, d’entreprises et de production. Par exemple, la proportion de femmes dans les conseils d'administration des institutions et organisations culturelles étudiées est de 42%. En revanche, on ne trouve que 34,5% de femmes à la tête des directions et vice-directions.
L'étude souligne toutefois que les écarts entre les disciplines sont considérables: tandis que dans le domaine littéraire, les postes au niveau de la direction sont occupés par 55% de femmes, on ne trouve pas une seule femme à ces postes dans les institutions musicales examinées.
ats/ms