Bob Dylan, le vieil homme et l'âme errent en Amérique

Publier une dizaine de standards, tous déjà interprétés par l'indépassable Frank Sinatra : mais quelle mouche a piqué Bob Dylan, 73 ans, presque autant de disques, un statut de trésor national aux Etats-Unis - le Hemingway de la chanson ? - et... une voix fusillée depuis belle lurette ?

La même (mouche), sans doute, qui poussait déjà le même (Dylan) à répondre "je suis aussi bon que Caruso" à un journaliste anglais médusé vers 1965: c'est l'interprétation qui compte.

Et surtout la sincérité de l'interprétation: tout au long des 35 minutes et 22 secondes de ce "Shadows In The Night", le vieux barde, est carrément à la hauteur du projet.

Encore un petit pour la route (One For The Road)

De récents témoignages vidéo montrent d'ailleurs un Dylan très concerné sur "Stay With Me", un extrait de l'album intégré au répertoire de scène depuis quelques mois.

Le défi consistait à retravailler ces chansons, luxueusement arrangées dans leur version d'origine, pour les jouer à cinq ou six musiciens sur la route. Et ça marche. Sur le fil du rasoir - Dylan is Dylan - mais ça marche!

Le rythme est globalement lent, pas de rock ou de swing endiablé ici, mais d'une belle lenteur, qui sied à la nouvelle incarnation de Bob Dylan, le "crooner fragile". Son interprétation d'"Autumn Leaves" - les fameuses "Feuilles Mortes" - en est un parfait exemple. 

On peut donc acheter "Shadows In The Night" sans arrière-pensée. Ou alors s'abonner à la revue des retraités américains à qui Dylan a fait don de 50'000 exemplaires !

Le coup fumant de Charlie Winston

Charlie Winston fait partie de ces artistes anglo-saxons absolument pas prophètes en leurs pays mais qui décrochent régulièrement la timballe sous nos latitudes sans qu'on sache trop pourquoi plutôt "ici" que "là-bas".

Son troisième album, "Curio City" est rien moins que le virage électro-pop d'un type qui chantait l'Amérique de la Grande Dépression en faisant grande impression sur les amateurs de "variété-rock" avec un son pas trop abrasif. Une sorte de hobo pour bobos en somme.

Ce changement d'habillement sonore ne va pourtant pas larguer ses premiers fans. Les chansons, solidement écrites, sont toujours bien là.

Un véritable album solo

Dans "Curio City", Charlie Winston a tout fait tout seul. L'homme est multi-instrumentiste et il joue également fort bien du studio d'enregistrement.

Même si le son d'une chanson comme "Lately", par exemple, est susceptible d'agacer ceux qui ne veulent plus entendre parler des années 80, la composition reste accrocheuse notamment grâce à sa mélodie sifflée. Et Winston place au moins deux ou trois autres tubes potentiels sur ce CD.

L'artiste déclare que "Curio City" est celui de ses disques qu'il préfère. Celui qui lui permettra de conquérir le public de son Angleterre natale ?

"Cavale", l'échappée belle de Robi

La production francophone est tout sauf pléthorique en ce début 2015. L'occasion de se pencher sur une sortie plus intimiste mais pas moins intéressante que les disques des grandes vedettes.

Robi en est à son deuxième album, intitulé "La Cavale". Et c'est une belle surprise. Entre chanson réaliste et new-wave, pour faire court, elle évolue dans un univers émotionnel bien à elle et assez prenant.

La presse spécialisée nous apprend que Robi a su séduire des gens comme Arno, Murat ou Dominique A, ce qui décore toujours fort joliment n'importe quel cv. Bon disque, vraiment !

Pierre-Yves Maspoli