"Ce qui est intéressant avec le pouvoir, c'est qu'il se met toujours en scène (...) et j'aime aller voir derrière ces mises en scène". Cette fascination a conduit le photographe genevois à créer plusieurs séries photographiques centrées sur la politique, l'économie et la religion.
Ce dernier thème l'a d'ailleurs amené devant les tribunaux à la suite d’une plainte déposée en 2012 par l'église évangélique zurichoise ICF, qui est parvenue à faire interdire le livre photographique "In Jesus' Name", lors d’une mesure provisionnelle.
"Une affaire qui m'a coûté des dizaines de milliers de francs"
Lorsqu'on lui demande si cette censure - qui a été levée en 2014 - n'a pas pas été bénéfique en termes de publicité, Christian Lutz rétorque: "C'est un argument que je n'accepte pas! C'est une affaire qui m'a coûté plusieurs dizaines de milliers de francs et qui m'a fait découvrir une justice en Suisse qui ne fait pas son travail (les juges n'ont pas eu à trancher car la plainte a été retirée après une négociation avec les deux parties, ndlr.)".
Sandwiches et politique
L'expérience s'est mieux déroulée avec "Protokoll", réalisée entre 2003 et 2006. Avec cette série, Christian Lutz s’est glissé dans les coulisses de la politique suisse, en suivant notamment l'ancien conseiller fédéral Pascal Couchepin: "Je suis tombé sur un partenaire de choix qui était très intéressé".
Ce qui a particulièrement marqué le photographe, mais qu'il a toutefois choisi de ne pas montrer, ce sont les politiciens qui se nourrissent durant les cocktails: "Pascal Couchepin ou Cornelio Sommaruga (ancien président de la Croix-Rouge, ndlr.) sont des personnes qui se nourrissent très vite, c'est impressionnant. Ils peuvent carrément gober des sandwiches".
Marqué par les attentats contre Charlie Hebdo
A la question "quel impact l'art peut-il avoir?", Christian Lutz soupire: "Depuis les attentats de Charlie, je me trouve dans une énergie du "à quoi bon" (...) mais je continue, vous voulez que je fasse quoi d'autre?'".
Mathieu Henderson
"Je me fâche contre mes collègues qui ne prennent pas de risque"
Selon le photographe, il n'y a aucune place pour la concession: "Il ne faut pas soumettre ses images (aux personnes photographiées) avant publication, sinon on vit dans un monde complètement aseptisé. Par contre, il faut faire un travail en amont pour savoir jusqu'où on peut aller, explique-t-il. Je me fâche contre mes collègues qui ne prennent pas de risque et qui soumettent leurs images ou qui font en sorte de prendre des personnes de dos", ajoute-t-il.
Politbox s'arrête à Bâle
Pour sa troisième sortie le mercredi 17 juin, politbox prendra ses quartiers à Bâle, à l'occasion de la foire Art Basel. Le thème du jour sera l'art engagé et plusieurs intervenants se succéderont pour parler d'art en tant qu'outil d'expression.