L’œuvre créée à Berlin en 1928 et signée par Bertolt Brecht pour le texte et Kurt Weill pour la musique n’est ni un opéra ni une comédie musicale, mais une comédie en musique dont la version française a été jouée pour la première fois à Paris en 1939.
Il y est question de lutte de pouvoir sans merci entre deux dirigeants: le roi des mendiants Jonathan Jeremiah Peachum qui gère les mendiants de son secteur comme un chef d’entreprise, et Mackie-le-Surineur, gangster et chef de gang flambeur et sulfureux. Chacun sa petite entreprise dans le même quartier de Londres, ça produit fatalement des étincelles: "On en f’ra d’la purée, du hachis, du steak tartare!"
Le spectacle est une satire acerbe du capitalisme et Bertolt Brecht qui pensait choquer le public en a été pour ses frais, les bourgeois berlinois ont adoré d’emblée "L'Opéra de Quat’sous" qui s’est joué à la création plus d’un an sans interruption. Et plus de 10'000 fois en 5 ans après traduction.
Quand la musique est bonne…
Le personnage mythique, c’est Mackie devenu "Mack the knife" dans la version anglaise de la chanson la "Complainte de Mackie". Cette chanson-là en particulier de "L'Opéra de Quat’sous" a connu une carrière inimaginable et a rapporté quelques titres de gloire à certains de ses interprètes, de Louis Armstrong (1956) à Ella Fitzgerald (1963), aux Doors (1968), Frank Sinatra (1984), Sting (1985) et Robbie Williams ( 2001).
Reste que l’œuvre de Brecht, dans son entier, pose cette question d’une acuité certaine encore aujourd’hui: "Qui est le plus grand criminel: celui qui vole une banque ou celui qui en fonde une?"
C’est Joan Mompart qui a pris le risque de mettre en scène à la Comédie de Genève ce chef d’œuvre extraordinaire qui dans sa version demanderait de mieux gérer les allers-retours entre jeu théâtral, adresses directes au public et chansons. Mais la musique est bonne…
Anne Marsol/gax