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A Cannes, un palmarès sans panache

Ken Loach pose avec la Palme d'or qu'il a gagné pour "Moi, Daniel Blake", 22 mai 2016. [AFP - Loïc Venance]
Ken Loach pose avec la Palme d'or qu'il a gagné pour "Moi, Daniel Blake", 22 mai 2016. - [AFP - Loïc Venance]
Le jury du 69e Festival de Cannes, présidé par le cinéaste australien George Miller, a décerné sa Palme d’or à Ken Loach pour son film "Moi, Daniel Blake". Un palmarès qui déçoit énormément les critiques. Analyse de notre spécialiste cinéma Raphaële Bouchet.

Le cinéaste britannique Ken Loach, 80 ans cette année, rafle sa deuxième palme après "Le vent se lève" en 2006. Le Québécois Xavier Dolan reçoit pour sa part le Grand Prix du jury pour "Juste la fin du monde", adapté de la pièce de Jean-Luc Lagarce.

Ce palmarès sans panache récompense avant tout des cinéastes établis qui, pour beaucoup, avaient déjà obtenu un prix à Cannes, et qui n’étaient pas forcément à leur meilleur cette année. Ken Loach, d’abord, qui dans "Moi, Daniel Blake" raconte la résistance d’un homme face aux rouages kafkaïens du système d’aide sociale anglais.

Un beau film, certes, bouleversant même, mais très classique et presque aussi terne qu’un formulaire de l’administration britannique.

Un Xavier Dolan virtuose

Le Grand prix du Festival de Cannes a été remis dimanche soir au cinéaste canadien Xavier Dolan, 27 ans, pour "Juste la fin du monde". [Keystone - Julien Warnand - EPA]
Le Grand prix du Festival de Cannes a été remis dimanche soir au cinéaste canadien Xavier Dolan, 27 ans, pour "Juste la fin du monde". [Keystone - Julien Warnand - EPA]

Xavier Dolan, 27 ans, Grand prix du jury, signe avec "Juste la fin du monde" un film virtuose, tourné majoritairement en gros plans, mais dont le dispositif formel étouffe l’émotion et rend le propos parfaitement ennuyeux.

L’Iranien Ashgar Farhadi, enfin, qui reçoit deux prix (!) – meilleur acteur et meilleur scénario – pour "Le Client", un pâle remake d’"Une séparation", son précédent grand succès.

Comme si cela ne suiffisait pas, le jury réussit l’exploit de décerner un prix d’interprétation féminine à une actrice philippine, Jaclyn Jose – qui s’éclipse durant une bonne partie du film ("Ma’Rosa", de Brillante Mendoza)! - alors que cette sélection regorgeait de splendides personnages féminins (Sonia Braga dans "Aquarius", pour ne citer qu’elle).

Cristian Mungiu, la consolation

Seul lot de consolation, le Prix de la mise en scène qui couronne le Roumain Cristian Mungiu pour "Baccalauréat", conte moral et très politique (ex-aequo avec Olivier Assayas et son film de fantômes "Personnal Shopper") et le Prix du jury à Andrea Arnold pour "American Honey", très controversé road-movie musical à travers l’Amérique des laissés-pour-compte.

L'équipe du film "Baccalauréat" à Cannes. [AFP - Valéry Hache]
L'équipe du film "Baccalauréat" à Cannes. [AFP - Valéry Hache]

Mais l’absence totale de cinéastes audacieux et surprenants comme l’Allemande Maren Ade ("Toni Erdmann"), le Français Alain Guiraudie ("Rester vertical") et le Hollandais Paul Verhoeven ("Elle"), laissent penser que le jury emmené par George Miller est passé complètement à côté des plus belles propositions de cette 69e édition.

Raphaële Bouchet

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