Le cinéaste britannique Ken Loach, 80 ans cette année, rafle sa deuxième palme après "Le vent se lève" en 2006. Le Québécois Xavier Dolan reçoit pour sa part le Grand Prix du jury pour "Juste la fin du monde", adapté de la pièce de Jean-Luc Lagarce.
Ce palmarès sans panache récompense avant tout des cinéastes établis qui, pour beaucoup, avaient déjà obtenu un prix à Cannes, et qui n’étaient pas forcément à leur meilleur cette année. Ken Loach, d’abord, qui dans "Moi, Daniel Blake" raconte la résistance d’un homme face aux rouages kafkaïens du système d’aide sociale anglais.
Un beau film, certes, bouleversant même, mais très classique et presque aussi terne qu’un formulaire de l’administration britannique.
Un Xavier Dolan virtuose
Xavier Dolan, 27 ans, Grand prix du jury, signe avec "Juste la fin du monde" un film virtuose, tourné majoritairement en gros plans, mais dont le dispositif formel étouffe l’émotion et rend le propos parfaitement ennuyeux.
L’Iranien Ashgar Farhadi, enfin, qui reçoit deux prix (!) – meilleur acteur et meilleur scénario – pour "Le Client", un pâle remake d’"Une séparation", son précédent grand succès.
Comme si cela ne suiffisait pas, le jury réussit l’exploit de décerner un prix d’interprétation féminine à une actrice philippine, Jaclyn Jose – qui s’éclipse durant une bonne partie du film ("Ma’Rosa", de Brillante Mendoza)! - alors que cette sélection regorgeait de splendides personnages féminins (Sonia Braga dans "Aquarius", pour ne citer qu’elle).
Cristian Mungiu, la consolation
Seul lot de consolation, le Prix de la mise en scène qui couronne le Roumain Cristian Mungiu pour "Baccalauréat", conte moral et très politique (ex-aequo avec Olivier Assayas et son film de fantômes "Personnal Shopper") et le Prix du jury à Andrea Arnold pour "American Honey", très controversé road-movie musical à travers l’Amérique des laissés-pour-compte.
Mais l’absence totale de cinéastes audacieux et surprenants comme l’Allemande Maren Ade ("Toni Erdmann"), le Français Alain Guiraudie ("Rester vertical") et le Hollandais Paul Verhoeven ("Elle"), laissent penser que le jury emmené par George Miller est passé complètement à côté des plus belles propositions de cette 69e édition.
Raphaële Bouchet