Faut-il laisser des mécènes privés financer les équipements que les collectivités n'arrivent plus à se payer? Les projets les plus ambitieux élaborés par les pouvoirs publics n'arrivent souvent plus à voir le jour sans le soutien de donateurs privés.
C'est le cas déjà avec le nouveau vaisseau amiral pour la musique classique à Genève, la Cité de la musique, qui devrait s'installer près de la place des Nations. Elle accueillera quatre salles, le nouveau siège de l'Orchestre de la Suisse romande (OSR) mais aussi la Haute école de musique. Une structure d'intérêt public entièrement financée par des privés pour un montant évoqué de 250 millions, dont une grande partie apportée par un donateur qui désire rester anonyme.
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Les cadeaux de la Fondation Wilsdorf
Autre cas très récent, celui du nouveau campus de la Haute école d'art et de design. C'est la Fondation Hans Wilsdorf, liée à Rolex, qui a racheté plusieurs bâtiments pour les mettre à la disposition de l'école d'art, "sans aucune contrepartie" nous dit-on. Le montant de cet achat n'a pas été communiqué. Cette même Fondation Wilsdorf a aussi offert un espace de création musical et artistique dénommé L'abri, qui a ouvert en 2014 en Vieille-Ville.
Ou encore l'emblématique Pont Wilsdorf, aux Vernets. La Ville de Genève s'était d'abord montrée très réticente à laisser une fondation financer un équipement public, d'autant que c'est la fondation qui avait choisi l'architecte et le type d'ouvrage.
Des "cadeaux" qui posent une série de questions, comme celles du choix du projet ou de la transparence. On ignore parfois qui est le donateur ou les montants concernés. Il y a aussi le problème des contreparties parfois exigées par les mécènes, comme on l'a vu avec le projet de rénovation du Musée d'art et d'histoire. Le mécène Jean-Claude Gandur voulait y mettre ses collections à l'honneur, ce qui pourrait expliquer l'échec du projet en votation populaire.
Avantages et inconvénients
Invité de l'émission Forum, le député Jean Romain (PLR) estime que ces financements privés sont une chance pour Genève. D'autant plus que "[la] dette de 13 milliards paralyse le canton de Genève dans plusieurs projets".
Je crois que Genève mérite d'avoir une Cité de la musique et des bâtiments qui soient à la hauteur de cette école exigeante qu'est la HEAD (Haute École d'art et de design).
Pour Jean Batou, député d'Ensemble à gauche, le projet de la Cité de la musique est certes enthousiasmant, mais se pose la question du financement des coûts de fonctionnement.
On vous met entre les mains un paquebot, un projet pharaonique, mais c'est finalement les collectivités publiques qui vont financer la plus grande partie des frais de fonctionnement de ce projet.
Mathieu Cupelin/Sylvie Belzer/mcc