A la toute fin des années soixante, Genève est en retard sur les mouvements contestataires qui ébranlent les universités françaises: Mai 68 n'y trouvera un écho que plusieurs mois, voire une année plus tard. Et c'est à ce moment-là, en 1969, que s'ouvre dans la cité du bout du lac, un espace d'art protéiforme et anticonformiste. Son nom: Ecart. Anacyclique du mot "trace", il suppose un pas de côté et contient le mot "art". Le lieu est inédit et indépendant. Il sort de l'imagination de jeunes gens, amis depuis le collège et partageant la passion presque calviniste de l'aviron: John Armleder, Patrick Lucchini, Claude Rychner.
Un mouvement artistique avant-gardiste et décalé
Ces derniers animent le collectif d'artistes: à la fois lieu d'exposition, endroit de passage, maison d'édition, festival, mais aussi salon de thé... qui verra défiler le monde de l'art, constitué alors d'un cercle très restreint aux ramifications internationales: ainsi lorsqu'Andy Warhol atterrissait à Genève, ne manquait-il pas de faire un saut par Ecart, pour signer des livres, réaliser une performance ou juste pour dire bonjour.
Ecart deviendra au fil du temps un mouvement artistique avant-gardiste et décalé par rapport au marché de l'art: son origine reposant sur l'amitié entre des jeunes gens guidés par une affinité commune pour les gestes artistiques les moins spectaculaires, les plus marginaux. Un mouvement dont l'influence perdure aujourd'hui encore sur la scène artistique contemporaine. Et dont la figure de proue, John Armleder, poursuit un travail d'artiste de premier plan et continue de faire vivre l'esprit Ecart.
Linn Levy/aq
"Almanach Ecart. Une archive collective, 1969–2019", préfacé par Jean-Pierre Greff. Co-édition art&fiction publications/HEAD-Genève, en partenariat avec le MAMCO.
Vous aimez lire? Abonnez-vous à QWERTZ et recevez chaque vendredi cette newsletter consacrée à l’actualité du livre préparée par RTS Culture.