Publié

Virginie Rebetez mène une enquête poétique autour d'un suicide familial

L'affiche de l'exposition "Vous trouverez mon corps au petit port", Virginie Rebetez. [Galerie Forma]
Revenir sur ses traces / Vertigo / 7 min. / le 9 novembre 2020
Toujours ouverte, la Galerie Forma à Lausanne présente le travail de la plasticienne et photographe Virginie Rebetez, qui s’est penchée sur un sujet sensible, le suicide de son grand-oncle, fatigué d'être sourd.

Certaines petites galeries d'art échappent à la fermeture. C'est le cas de Forma, à Lausanne, qui expose en ce moment le travail de la plasticienne et photographe Virginie Rebetez que l'on peut visiter en tout petit comité. Et cela en vaut la peine.

L'exposition "Vous trouverez mon corps au petit port" ressemble à une enquête poétique. Elle dit la disparition, ce qui reste, ce que l’on imagine pour combler ce qu’on ne sait pas. Virginie Rebetez a travaillé en collaboration avec l'artiste Marie Ilse Bourlanges.

Tout part du suicide de son grand-oncle, Bernard Rebetez, dans la nuit du 13 juin 2010, dans le lac de Bienne. Avant de se noyer, il a plié délicatement ses affaires sur la plage. Il avait 80 ans. Dans son appartement, une note: "Je ne peux plus supporter ma surdité, donc ma solitude. On peut me trouver petite plage port nautique".

"Je fais un parallèle entre sa surdité et le geste de se donner la mort, comme s'il y avait eu un bug de communication, un message qui n'avait pas été capté", explique à la RTS Virginie Rebetez.

>> A voir, l'interview de Virginie Rebetez et le reportage dans la galerie Forma du 12h45 :

Rendez-vous culture: la photographe Virginie Rebetez
Rendez-vous culture: la photographe Virginie Rebetez / 12h45 / 8 min. / le 3 novembre 2020

L'artiste, qui depuis un an et demi a remis à l'honneur le métier de photographe funéraire, est connue pour ses sujets autour de la disparition et de la mort. "Quand on part en voyage, on se prépare, on fait ses valises, on imagine un circuit et on se documente. Pourquoi ne fait-on pas la même chose avec la mort?"

Mais pour la première fois, l'artiste se concentre sur une histoire familiale et personnelle. "Quand mon grand-oncle est mort, j'étais à Amsterdam. Je n'ai pas pu me rendre à ses obsèques mais j'ai demandé à mon père qu'il mette de côté un ou deux objets qui lui appartenaient et qu'il prenne des images de son appartement".

Rien de sinistre

Son travail est fort et subtil. Rien de heurtant, de sinistre ou de voyeuriste dans cette exposition qui mêle archives familiales, rapports de police et d'autopsie, photos d'objets ayant appartenu au défunt, à l'image de ses prothèses auditives, agrandies de sorte qu'elles ressemblent à une créature étrange.

Il y a aussi la note manuscrite laissée par l'oncle à son domicile qui informe de sa solitude et de son désir d'en finir. La plasticienne et photographe a retravaillé ce document, raturant certains passages et multipliant les textes. "Même si son intention était claire, il reste toujours des interrogations, des lacunes", dit l'artiste qui tente ainsi de tisser ou retisser le dialogue interrompu par cette brutale disparition.

Florence Grivel/mcm

Exposition "Vous trouverez mon corps au petit port" de Virginie Rebetez, galerie Forma à Lausanne, jusqu'au 28 novembre.

Publié