L'architecte Philippe Rahm utilise (aussi) l'infrarouge en objet d'art
Elle repère les cas de fièvre dans une pandémie; vérifie si un bâtiment est bien isolé; détecte les feux couverts d'un incendie; permet d'observer de nuit les comportements de la faune et de la flore; révèle des anomalies de fabrication invisible à l'oeil nu ou débusque des comportements nocturnes fautifs, comme le braconnage ou le screening - filmer des projections depuis la salle.
Parce qu'elle surveille, diagnostique, contrôle, mais aussi parce qu'elle éclaire les enjeux climatiques, la caméra infrarouge exprime parfaitement notre époque. C'est ce que montre l'exposition consacrée aux portraits thermiques de l'architecte vaudois basé à Paris, Philippe Rahm, depuis longtemps conscient de l'importance du développement durable et du climat.
"Dès les années 1930, un des fondateurs du mouvement dadaïste, Raoul Hausmann, utilise les premières pellicules pour élargir notre perception, aller voir en dessous des choses, sous le visible. D'autres artistes ensuite se sont emparés de ce qui à l'origine était conçu comme un outil de guerre, notamment à des fins de surveillance aérienne, pour en faire un objet aimable, sympathique", explique Luc Debraine, directeur du musée de l'appareil photographique à Vevey.
Des portraits du 21e siècle
Inventeur du concept d'architecture météorologique, Philippe Rahm, qui a représenté la Suisse à la Biennale d'architecture de Venise en 2002, tire partie d'une caméra thermique dans sa pratique professionnelle, lui qui pense l'architecture comme un habitat pour protéger notre corps animal et lutter contre le vent, le froid, la pluie ou la canicule.
>> A regarder, l'interview de Philippe Rahm, inventeur du concept d'architecture météorologique :
Il utilise aussi la technique infrarouge pour saisir des scènes urbaines ou prendre des portraits des gens qui l'entourent. "Avant, on pensait aux gens grâce à la peinture, puis au XXe siècle, grâce à la photo. Aujourd'hui, la thermographie incarne le 21e siècle", dit Philippe Rahm qui offre en ouverture de l'exposition un autoportrait masqué, témoin de la proximité entre la Covid et l'infrarouge.
Propos recueillis par Florence Grivel/mcm
Exposition infrarouge, au musée de l'appareil photographique de Vevey. Jusqu'au 29 août.