Le Musée Forel dévoile l'aventure artistique de ses deux fondateurs

C'est en 1918 qu'Alexis Forel (1852-1922) et son épouse Emmeline (1860-1957) ont acquis un bâtiment situé actuellement au n°54 de la Grand-Rue à Morges (VD), qui était alors une laiterie. Une belle bâtisse du 16e siècle avec des tourelles, une salle flanquée d'un superbe plafond à caissons et une cour intérieure de style gothique, qui deviendra deux ans plus tard le Musée Alexis Forel.

Cela faisait déjà plusieurs années que ce couple d'artistes cherchait un endroit à la fois pour y habiter, mais aussi pour y mettre en valeur leurs collections, parmi lesquelles un prestigieux ensemble de gravures des grands noms européens, Rembrandt en tête de gondole, du 16e au 19e siècle. L'idée de pouvoir exposer ces oeuvres au grand public était déjà présente dans leurs têtes au moment de trouver le lieu idéal.

"C'était la recherche d'un lieu hybride entre l'habitation et le musée, ce qui était relativement courant au début du 20e siècle. L'exemple le plus connu est sans doute celui le musée Jacquemart-André à Paris", explique Laura Salvadori, curatrice de l'exposition, interrogée dans l'émission "Vertigo".

Des voyageurs férus d'art

Alexis, graveur et collectionneur, et Emmeline, peintre - originaires tous les deux de la région morgienne -, s'étaient installés à Paris en 1883, juste après leur mariage afin d'étudier l'art dans une académie privée. Avant de revenir définitivement à Morges en 1918, le couple a beaucoup voyagé en triangulant entre Paris, la Bretagne et le domaine familial des Forel situé près de Morges. D'où le nom de l'exposition qui se tient actuellement dans le musée: "Morges-Paris-Bretagne - l'aventure artistique d'Emmeline et Alexis Forel" et qui réunit pour la première fois, 101 ans après son ouverture, les oeuvres des deux fondateurs de l'institution.

Un couple d'artistes très égalitaires

A travers un parcours bien pensé, on découvre les gravures, presque exclusivement en noir et blanc d'Alexis, et des oeuvres en couleurs qui privilégient le pastel et la peinture à l'huile pour Emmeline. Mais cette exposition permet aussi de raconter l'histoire d'un couple d'artistes très égalitaires, ce qui est plutôt novateur pour cette période-là, et de redonner sa juste place à Emmeline Forel.

"On n'est pas du tout dans un cas de figure où madame aurait suivi monsieur dans ses entreprises artistiques, explique la curatrice. On a plutôt affaire à deux personnes qui avaient des intérêts communs et qui se sont réalisées en parallèle dans cette formation artistique. Et ça se voit dans la qualité des travaux de l'un et de l'autre".

Emmeline, l'âme du Musée Forel

Après la mort de son mari en 1922, Emmeline reste pendant plus de trente ans l'âme de ce musée. En tant que conservatrice et restauratrice, elle prend soin des collections tout en continuant à voyager à travers l'Europe pour voir des artistes et des expositions.

Son neveu Oscar Forel devient alors son fidèle compagnon de route. Un jour, elle décide même, sur un coup de tête, de le rejoindre au Maroc, n'hésitant pas à prendre un train de nuit jusqu'à Marseille puis, pour la première fois de sa vie à 76 ans, à monter dans un avion qui l'emmène à Casablanca. De là, ils visiteront tout le Maroc à bord d'une voiture louée. L'occasion pour la peintre de découvrir cette lumière si particulière de la région de l'Atlas qu'elle ne connaissait pas. Emmeline Forel décède à St-Prex en 1957 à l'âge de 97 ans.

Sujet radio: Florence Grivel

Adaptation web: Andréanne Quartier-la-Tente

_{"Morges-Paris-Bretagne", Musée Forel, Morges, jusqu'au 5 septembre 2021.}