Plus de 600 images datées de 1850 à nos jours, montrant conflits et catastrophes naturelles, ont été rassemblées dans le cadre de l’exposition "Un monde à guérir". Plus de deux ans ont été nécessaires pour effectuer ce travail de sélection parmi un million de photos provenant des différentes entités de la Croix-Rouge.
Par les journaux, puis la télévision et désormais internet, l’image humanitaire est entrée dans notre quotidien depuis plus d’un siècle. Quel que soit le sujet traité, ces photographies ne sont fidèles qu’à une partie de la réalité. Par essence, une prise de vue reste une interprétation, par la personne qui presse le déclencheur, de la scène qui se déroule devant ses yeux. Pour le public, il est parfois difficile de transcender l’image et de s’imaginer tout ce qui ne s’y trouve pas, le hors-champ.
L’image de crise et de guerre, c’est quelque chose que l’on voit tous les jours dans nos médias. Souvent, on a l’impression qu’elles disent tout, mais est-ce vraiment le cas ? Nous avons voulu questionner ça.
L'ambivalence du voyeurisme
Pour Nathalie Herschdorfer, commissaire de l’exposition, l'aspect incomplet d'une représentation de la réalité basée sur des photographies n’est pas la seule interrogation que soulèvent ces images humanitaires. "Nous avons besoin que ces images soient fortes. C’est pourquoi certaines images montrant des situations de crise présentent un certain esthétisme. Celui-ci nous préoccupe car nous ne voulons pas être voyeuristes", explique-t-elle à la RTS.
D’un autre côté, c'est très souvent cet aspect voyeuriste qui permet de susciter des émotions fortes chez le public. Ce faisant, la photo parvient à atteindre son objectif: attirer l’attention sur les situations montrées par les images.
Poser un oeil critique sur ces images
Co-produite en partenariat avec les Rencontres de la photographie d’Arles, cette exposition du MICR a pour but de proposer des clés de lecture pour comprendre les codes de représentation de l’image humanitaire. Le public est invité à les regarder d’un oeil critique et interroger d’où elles viennent, ce qu’elles racontent et ce qu’elles ne montrent pas.
On y trouve un panel de photographies différentes. Tout d’abord, des images publiques, conçues pour communiquer l’urgence de l’action humanitaire. Et des images plus confidentielles puisque "Un monde à guérir" révèle un patrimoine resté très peu exploré à ce jour.
A ne pas confondre avec du photojournalisme, ces images humanitaires sont signées de grands noms de la photographie comme Werner Bischof, Susan Meiselas ou Henri Cartier-Bresson, mais aussi par des collaborateurs et collaboratrices directement affectées par les crises.
Sujet TV : Julie Evard et Dominik Steiner
Adaptation Web: Arthur du Sordet
"Un monde à guérir", Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (MICR), Genève, jusqu'au 24 avril 2022.