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Un vieil immeuble genevois transformé en temple du graffiti avant sa démolition

Vernier (GE): House of Paint, une exposition de graffiti métamorphose pour deux mois un immeuble voué à la démolition
Vernier (GE): House of Paint, une exposition de graffiti métamorphose pour deux mois un immeuble voué à la démolition / 19h30 / 2 min. / le 19 février 2022
À Vernier (GE), vingt graffeurs et graffeuses ont investi l’allée d’un immeuble voué à la destruction. Les anciennes habitations se sont muées en œuvres d’art. Nommée "House of Paint", l’exposition est à voir gratuitement jusqu’au 13 avril.

Il a servi de logement pendant cinquante ans, mais cet immeuble situé à Châtelaine, dans la commune de Vernier, est désormais voué à la démolition. L’occasion pour le collectif Wall’s Street de s’approprier ses 1800 mètres carrés pendant quelques mois, répartis entre neuf appartements divisés en vingt pièces. Les murs et les sols sont repeints en blanc, avant d’être confiés à un graffeur ou une graffeuse dont l’art fondamental est de jouer avec les lettres pour écrire son nom.

Des pièces transformées en œuvres d’art

Colorées et variées, les pièces de l’immeuble sont transformées en œuvres d’art urbain. Certaines salles contiennent des installations, même si les artistes viennent d’abord du milieu du graffiti. "Par exemple, l’un d’entre nous étudie l’architecture, donc il a créé une installation avec une lettre suspendue et un décor", explique à la RTS Michael Vauthey, organisateur de l’exposition "House of Paint" et membre du collectif Wall’s Street.

Pour donner vie à l’exposition, le collectif a donc pris possession des murs, mais aussi de tout l’espace, à la manière d’une résidence d’artistes. Le graffiti illégal, sprayé la nuit avant une course-poursuite avec la police, semble bien loin. Cependant, contrairement aux street-artistes issus d’écoles d’art, les graffeurs et graffeuses apprennent leur art sur le tas.

Le graffeur Sueno lors de l'exposition "House of Paint" à Vernier. [RTS]
Le graffeur Sueno lors de l'exposition "House of Paint" à Vernier. [RTS]

Une marginalité revendiquée

La pièce du graffeur Sueno se nomme simplement "Sueno Island". Telle une carte au trésor, un archipel est représenté en relief sur son sol, avec une croix indiquant l’emplacement du butin. Sueno place son nom dans chaque pièce de son œuvre, de manière plus ou moins évidente. Il s’inspire des mathématiques pour respecter les codes de la calligraphie et de la typographie.

Pour Sueno, si le graffiti se démocratise et se régularise, il reste malgré tout marginal. "En tant que graffeurs, il est important pour nous de ne pas être à 100% intégrés dans cette société, par exemple en faisant payer pour voir nos œuvres ou en étant exposés dans des musées. Nous sommes fiers de ne pas faire partie de tout cela, car cela nous donne une liberté."

Si la jeune génération de graffeurs renouvelle le matériel et les codes du graffiti, son esprit n’a pas changé depuis les années 1980: la défense de la libre expression artistique gratuite sur l’espace public.

Un art de plus en plus accepté

Une liberté qu’il a tout de même fallu négocier avec la société immobilière propriétaire du bâtiment. Pour Olowine Rogg, vice-présidente de la fondation HBM Emile-Dupont, le graffiti est une bonne manière d’égayer les bâtiments tout en limitant le vandalisme: "Parfois, il y a un peu de vandalisme sur les façades de nos immeubles. Nous avons le choix: soit nous repeignons en blanc par-dessus avec de l’anti-tag, soit nous saisissons l’opportunité de les repeindre avec des graffeurs. En optant pour la seconde option, les problèmes de vandalisme disparaissent, et les habitants sont heureux."

Sujet et interview TV: Philippe Fivet et Cecilia Mendoza

Adaptation web: ms

"House of Paint", à découvrir les mercredis, samedis et dimanches jusqu'au 13 avril 2022 à Vernier (GE).

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