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Avec "Faces of war", Alexander Chekmenev montre l'humain derrière la guerre

Le portrait de Natalia Dolinska, exposition "Faces of war" à la HEP Vaud. [Alexander Chekmenev]
Exposition "Faces of war – Visages de la guerre" dʹAlexander Chekmenev / Vertigo / 5 min. / le 16 mai 2023
Depuis le début de l'invasion russe, l'artiste ukrainien Alexander Chekmenev photographie et récolte les témoignages des habitants de son pays. Quatorze portraits lumineux et poignants de son projet "Faces of war" sont actuellement exposés à la HEP Vaud à Lausanne.

Alexandre Chekmenev est né en 1969 dans la région du Donbass, un bassin minier à l'est de l'Ukraine. Ingénieur de formation, il commence sa carrière de photographe en autodidacte dans sa ville natale de Lougansk. Suite à l'effondrement de l'Union soviétique dans les années 90, il commence par photographier les ouvriers et les paysages de sa région, puis les sans-abris, que l'on appelle souvent les "laissés-pour-compte" de la société.

Etabli à Kiev depuis 1997, Alexander Chekmenev se fait peu à peu une place dans le milieu du photojournalisme. Quand la Russie envahit l'Ukraine le 24 février 2022, le photographe ukrainien est rapidement mandaté par le New York Times pour photographier et récolter les témoignages des habitants de Kiev.

La compassion pour moteur

Contrairement à d'autres collègues photographes, Alexander Chekmenev ne se contente pas de photographier ses modèles, explique Alexandra Kaourova, médiatrice culturelle à la Haute école pédagogique du canton de Vaud. Quand il rencontre Vita Boina et Denys, son fils de deux ans, réfugiés dans le métro, il commence par lui demander ce dont elle a besoin. "Un téléphone portable" lui répond-elle, car on lui a volé le sien et depuis elle est sans nouvelles de son mari et de ses deux filles. Alexander Chekmenev va la photographier, mais aussi lui trouver un téléphone portable.

Suite à cette commande du New York Times sur les citoyens de Kiev, Alexander Chekmenev décide de poursuivre ce travail, à son compte cette fois, en l'étendant à d'autres régions. Il parcourt les territoires anciennement occupés par les forces russes et libérés depuis par les soldats ukrainiens. Ainsi commence son projet baptisé "Faces of war" (Les visages de la guerre) qui compte au total une centaine de photographies et de témoignages, dont quatorze d'entre eux sont actuellement exposés à la HEP-Vaud, à Lausanne.

Un travail pédagogique

Reconnu sur la scène internationale, notamment grâce à son portrait du président ukrainien Volodymyr Zelensky en une du Time en mai 2022, Alexander Chekmenev s'est rendu fin mars à la HEP pour le vernissage de son exposition. A cette occasion, le photographe ukrainien a également participé à une table ronde sur le thème "Comment expliquer la guerre aux élèves".

Pour poursuivre cette réflexion, la médiatrice culturelle de la HEP Alexandra Kaourova organise, sur demande, des visites pour les professeurs et les élèves intéressés. Une démarche payante si on en croit les impressions d'une classe d'élèves du gymnase Auguste-Piccard de Lausanne qui a pu bénéficier d'une de ces visites: "J'ai trouvé poignant que dans un village, les forces russes n'aient épargné personne, pas même les bébés de six mois", avoue un jeune homme. "Ce qui me marque, c'est la solidarité de ces gens, qu'ils soient boulangers ou chirurgiens, tout le monde a fait un geste", ajoute une jeune femme.

Des contrastes très forts, voilà ce qui émane des photos d'Alexander Chekmenev. L'esthétique est à la fois sombre et lumineuse, tout comme les témoignages écrits. On y découvre les atrocités de la guerre, la fatigue, mais aussi la résilience et la solidarité.

Sarah Clément

"Faces of war", une exposition du photographe ukrainien Alexandre Chekmenev, à voir jusqu’au 30 juin à la HEP Vaud de Lausanne.

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