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Le Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel éclaire la provenance du legs Amez-Droz

Vue de l'exposition permanente du Musée d'art et d'histoire de Neuchâtel. [mahn.ch - MACIEJ CZEPIEL]
Collection… particulière. / Vertigo / 5 min. / le 9 décembre 2024
A Neuchâtel, le Musée d'art et d'histoire dévoile les résultats des investigations autour de la provenance des 69 oeuvres léguées par le collectionneur parisien d’origine neuchâteloise, James Adolphe Yvan Amez-Droz (1888-1976). Cette exposition rejoint la collection permanente.

En 1979, le Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel reçoit une importante donation issue de la collection du propriétaire fortuné d’une entreprise de parfums et de produits cosmétiques, James Adolphe Yvan Amez-Droz (1888-1976). Le Franco-Suisse, décédé trois ans plus tôt et installé à Paris, avait collectionné des tableaux, des dessins, des estampes, des livres et objets d’art, et souhaitait témoigner de son attachement à Neuchâtel, d'où était originaire sa famille.

L'ensemble donné au musée neuchâtelois comprend 69 œuvres, soit 45 peintures, 18 dessins, deux monotypes et quatre sculptures créés par divers artistes français des XIXe et XXe siècles, dont les célèbres artistes impressionnistes Edgar Degas, Claude Monet, Berthe Morisot et Auguste Renoir. Certaines œuvres, comme le "Bateau-atelier" de Monet, figurent parmi les chefs-d’œuvre de l’institution.

A Neuchâtel, le pan moderne de la collection

Le legs Yvan et Hélène Amez-Droz, nommé ainsi selon le vœu du donateur qui souhaitait associer à son nom celui de sa sœur, est constitué uniquement du pan moderne de la collection d'Yvan Amez-Droz, qui possédait dans son hôtel particulier du XVIIe arrondissement de Paris de nombreuses oeuvres d'art.

"Cet ensemble reflète un goût bourgeois relativement conservateur et classique dans ces années-là à Paris, explique dans l'émission Vertigo du 9 décembre Laurent Langer, co-directeur du musée neuchâtelois. La collection commence à peu près avec Corot, dans les années 1820, et s'achève en termes de modernité avec [le peintre] Moïse Kisling ou [le sculpteur] François Pompon. On couvre une période d'une centaine d'années à peu près, mais l'abstraction, par exemple, est absolument absente de la collection".

L'authenticité d'abord

Au moment de l’entrée de la collection Amez-Droz au musée, en 1979, on se préoccupe d'abord de l’authenticité des pièces. Plus tard, en raison des nombreuses interrogations autour de l'art spolié entre 1933 et 1945, la question de leur provenance devient prégnante.

Grâce au soutien de l’Office fédéral de la culture, le Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel a mené entre 2019 et 2021 une étude consacrée à l’historique des œuvres de ce legs. L'institution dévoile aujourd'hui les résultats de l’enquête et propose un accrochage qui met en évidence la riche période artistique qui précède les mouvements d’avant-garde. 

Spoliation hypothétique

Le Musée d'art et d'histoire de Neuchâtel expose par exemple "Artiste passant dans un chaos de rochers à Fontainebleau", un tableau de Corot classé en catégorie C, c'est à dire dont l'historique présente des indices de spoliation. En 1919, le marchand Paul Rosenberg est alors le propriétaire du tableau.

Laurent Langer explique que "Rosenberg est un galeriste, mais aussi un collectionneur juif qui a été spolié. Après la guerre, depuis New York où il s'était établi, il a réclamé les œuvres qui lui appartenaient. (...) On est certain que Rosenberg n'a pas essayé de récupérer ce tableau [de Corot], mais il n'empêche que nous avons dans l'historique de l'œuvre une grande lacune entre 1919 et 1954, date à laquelle on sait que le tableau appartient au peintre français André Derain. (...) Il est possible que Derain l'ait acheté à Rosenberg en 1919, et à ce moment-là, l'historique serait complet, on pourrait changer la catégorie de l'œuvre. Mais pour l'instant ce n'est pas le cas".

Le legs Yvan et Hélène Amez-Droz ne contient en réalité pas de cas vraiment problématique. On est bien loin de la sulfureuse collection Gurlitt qui a défrayé la chronique en Suisse. "Yvan Amez-Droz a laissé finalement très peu de traces, [c'était un homme] très discret (...), un particulier qui achetait des tableaux à Paris à cette période-là", conclut Laurent Langer.

Sujet radio: Florence Grivel

Adaptation web: Melissa Härtel

"Coubet, Monet, Renoir...Focus provenance", Musée d’art et d’histoire, collection permanente, Neuchâtel.

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