"Le sport à l'épreuve" dévoile les différentes facettes de la photographie sportive
La photographie de sport, des premiers jeux olympiques modernes en 1896 à nos jours, est l'art de saisir et d'immortaliser le mouvement, l'intensité d’une victoire ou l'agonie d'une défaite. Un terrain que Nathalie Herschdorfer, directrice du musée Photo Elysée à Lausanne et commissaire de l'exposition "Le sport à l'épreuve", a décidé d’explorer.
L’exposition, réalisée en collaboration avec le Musée olympique, est actuellement à découvrir aux Rencontres d'Arles jusqu'au 29 septembre. Elle sera ensuite visible le printemps à Photo Elysée à Lausanne au printemps 2025.
"Ce n'est pas une illustration de l'histoire du sport ou de l'histoire des Jeux olympiques. Mon intention était vraiment d'aller décortiquer ces images et de trouver une sorte de grammaire visuelle de cette photographie de sport qui nous fascine tant", explique Nathalie Herschdorfer dans la Matinale du 19 juillet.
Et de poursuivre: "Les quantités de photographies de sport sont très impressionnantes. Nous nous sommes concentrés sur deux collections: celle du Musée olympique, qui regroupe toutes les archives photographiques des Jeux olympiques et de l'olympisme depuis sa création en 1896, ainsi que les collections de Photo Elysée, donc le Musée de la photographie." En tout, il y avait plus de deux millions d'images à trier.
Une photographie codifiée
La photographie de sport répond à des règles précises. "Il y a des moments qui sont particulièrement enregistrés par les photographes, comme le point de départ et la ligne d'arrivée. Et puis il y a aussi ces moments incroyables où l’on voit des corps en lévitation, des corps qui sont dans toute leur grâce, en pleine action, en plein exploit", précise Nathalie Herschdorfer.
La commissaire de l’exposition et son équipe ont aussi cherché à en savoir plus sur les indications données aux photographes. "J'ai retrouvé un document qui a été émis il y a quelques années par le Comité olympique qui donne des recommandations, voire des directives aux photographes. Il leur est demandé de faire attention à la façon dont on représente les sportifs et sportives, les femmes en particulier, qui ont mis beaucoup de temps à entrer dans les Jeux olympiques.
De plus, le Comité demande une attention particulière aux compétences et aux prouesses sportives. Il faut montrer autant la force et la puissance que la grâce ou l'élégance. Et il faut éviter les images passives et sexy, ne pas renforcer les stéréotypes féminins et masculins ne pas se concentrer inutilement sur l'apparence."
Au-delà des stéréotypes
Cette volonté d’égalité dans les photos de la part du Comité olympique fait écho à un passé beaucoup moins progressiste. "Certains sports leurs étaient réservés, comme le golf, d'autres interdits. La place des femmes dans le monde du sport était interrogée, puisque la performance sportive, le développement de la musculature et la puissance étaient contradictoires avec ce qui était attendu des femmes, soit une élégance, une grâce de leur apparence physique, contradictoires avec le développement d'une musculature puissante", explique Nathalie Herschdorfer.
Pour la commissaire, il est aussi important de montrer que la photographie de sport, au-delà des corps sublimés en pleine action des sportifs et sportives, "c'est aussi la sueur, des visages déformés par l'effort ou par l'émotion. C'est très intéressant parce qu'on ne trouve pas cela dans les autres catégories d'images célébrant la beauté des corps, par exemple la photographie de mode."
Propos recueillis par Aude Raimondi
Adaptation web: Myriam Semaani
"Le sport à l'épreuve", Rencontres d'Arles (F), jusqu'au 29 septembre 2024; puis Photo Elysée, Lausanne, dès le printemps 2025.