Après le "Hodler intime" du musée d'art et d'histoire de Genève, c'est au tour du musée d'art de Pully de rendre hommage au peintre suisse, dont on célèbre cette année le centième anniversaire de la mort. Avec "Hodler et le Léman", le musée propose une exposition exclusivement consacrée à ce grand lac mélancolique, calme et souverain, que le peintre aimait tant, pour ses couleurs, ses reflets et ses effets de symétrie.
Ses paysages lacustres - Léman ou lac de Thoune - constituent d'ailleurs le tiers de sa production paysagère. Et se vendent à plusieurs millions d'euros.
Toiles issues de collectionneurs privés
Avec vue sur le Grammont, le Jura ou le Mont-Blanc, depuis Vevey, Saint-Prex ou Genève, Ferdinand Hodler (1853-1918) a couché plus de 100 fois le Léman sur la toile. Il y apparaît tour à tour majestueux, silencieux, moderne, hypnotique, atemporel, puissant, symbolique ou réel. Le musée de Pully expose une cinquantaine d'oeuvres, toutes provenant de collections privées, dont celle de l'ancien conseiller fédéral Christoph Blocher. Le public pourra ainsi découvrir jusqu'au 3 juin des paysages rarement visibles. Certains sont même présentés pour la première fois depuis plus d'un siècle.
Enfance à la Dickens
Réalisée en collaboration avec les archives Jura Brüschweiler, l'exposition se décline dans une dizaine de salles, dont chacune correspond à une période de la vie d'Hodler. Une vie faite de gloire et de cendres, marquée très tôt par la mort de ses proches, lui dont le père, la mère et ses cinq frères et soeurs ont été décimés par la tubercolose.
Dans ma famille, on mourait tout le temps. J’ai fini par avoir l’impression qu’il y avait toujours un mort dans la maison et qu’il devait en être ainsi.
Le lac devient ainsi au fil de sa carrière comme une sorte de miroir de ses états d'âme. "Ce n'est pas tout à fait comme un journal intime mais il y a un rapport très étroit entre ce qui se passe dans sa vie et la manière de peindre le Léman", commente Niklaus Manuel Güdel, directeur des Archives Jura Brüschweiler.
La riche idée de la série
A 17 ans, Ferdinand quitte Berne pour Genève. Il fait le trajet à pied, plus par économie que par goût de la marche. Quelques années plus tard, il devient un peintre célébré et riche. "En 1904, il expose à Vienne qui le consacre internationalement. Cette même année, il dit qu'il a vendu pour 80.000 francs de tableaux. Ce qui correspondrait aujourd'hui à plus de 800.000 francs", explique Laurent Langer, conservateur du musée de Pully.
Le même ajoute que si le lac a été un des thèmes de prédilection du peintre, c'est à la fois parce qu'il l'aimait et qu'il s'y sentait bien, mais aussi pour des raisons commerciales, d'où l'idée de série avec variations. "Celle du Grammont ou de Chexbres reprend toujours la même composition et, selon le désir du commanditaire, Hodler y ajoutait arbres ou nuages".
Sujet radio Florence Grivel/Réalisation web Marie-Claude Martin