Lola (Ludivine Sagnier) est la benjamine de deux frères, Benoît (Jean-Paul Rouve) et Pierre (José Garcia). Entre Benoît, un opticien qui n’y voit pas très clair dans sa vie, Pierre, qui fait sauter des immeubles, et Lola, une avocate en pleine remise en question, les liens deviennent étouffants. De reproches en engueulades, la fratrie se brouille, chacun essayant de vivre sa vie de son côté. Mais alors que tout devrait les éloigner, ces trois-là s’avèrent inséparables…
Cette fratrie qui se dispute, Jean-Paul Rouve l’a ancrée dans le réel. Ils exercent des métiers concrets, à Angoulême, "une ville que personne ne sait où situer sur la carte, même pas moi". L'acteur-réalisateur né à Dunkerque a mis un point d'honneur à tourner loin des grandes villes et surtout de la capitale, Paris, où il réside mais qui ne l’a pas construit.
Un cinéaste de la vie comme elle va
Un ancrage dans le réel pour un film au réalisme revendiqué, en filiation d’un Yves Robert ou d’un Claude Sautet, "ces films de potes avec une femme au milieu". Des potes aux frangins, on est toujours dans la vie comme elle va, et dans ces affects primordiaux et maladroits, où les non-dits, la pudeur et les évitements finissent par exploser dans des colères coupables avant de se résoudre par des retrouvailles nécessaires.
Jean-Paul Rouve, qui s’est fait connaître dans des seconds rôles (son interprétation de collabo dans "Monsieur Batignolle" lui a valu le César de meilleur espoir masculin en 2003), soigne lui-même particulièrement les rôles secondaires "j’ai envie qu’ils fassent exister l’être humain et pas seulement la fonction".
Dans "Lola et ses frères" on retrouve ainsi la formidable présence de Jacques Boudet, un de ces visages populaires qu’on remarque longtemps sans se souvenir de leur nom.
De Robin des Bois à Jeff Tuche
D’ailleurs dire de Jean-Paul Rouve qu’il est populaire revient quasiment à faire un pléonasme notamment depuis que la trilogie des "Tuche" en a fait une icône de la comédie tout public et familiale.
Mais bien avant d’être Jeff Tuche, Jean-Paul Rouve était un des six délirants Robins des Bois, la troupe qu’il a fondée avec Marina Foïs, Maurice Barthélémy et Pierre-François Martin-Laval, (rencontrés au cours Florent), rejoints ensuite par Élise Larnicol et Pascal Vincent.
De 1998 à 2002, ces héritiers des Nuls, adoubés par Dominique Farrugia, assuraient en la renouvelant la potacherie explosive et hilarante de leurs prédécesseurs, livrant pas moins de 5000 sketches en quatre ans. Sa recette?
On n'avait pas le temps, et c'est extraordinaire de ne pas avoir le temps de penser à ce que vous faites. L'enseignement, c’est que rien n’est grave. Si on se trompe, on refait.
On peut aujourd’hui lire et relire les fruits de cette bienfaisante recette de créativité dans l’Intégrale des Robin des Bois "La Playade", publiée au Cherche midi.En plus du titre pastiche, la troupe s'est aussi déjà auto-attribué le Renaudot 2019.
Propos recueillis par Pierre-Philippe Cadert
Réalisation web Manon Pulver