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Le génocide rwandais au coeur de la mini-série "Black Earth Rising"

Michaela Coel dans la série "Black Earth Rising". [Netflix BBC]
Black Earth Rising / Six heures - Neuf heures, le samedi / 8 min. / le 2 février 2019
Devoir de mémoire, crimes contre l’humanité et géopolitique sont au centre de "Black Earth Rising" (en français "Quand la Terre noire s’éveille"), une série de la BBC, disponible sur Netflix.

Kate Ashby est une jeune femme d’origine rwandaise tutsie, sauvée du génocide en 1994 lorsqu’elle est adoptée par une Anglaise, Eve Ashby. Cette dernière est aujourd’hui procureure spécialisée dans les affaires criminelles internationales et les crimes contre l’humanité.

Kate approche la trentaine et travaille comme enquêtrice auprès de Michael Ennis, avocat américain installé en Grande-Bretagne. Lorsque Eve Ashby est saisie d’une affaire à la Cour pénale internationale de La Haye dont l’objectif est de poursuivre un criminel de guerre rwandais tutsi, le passé se réveille.

Un passé pas si simple

Le passé de Kate, évidemment, qui n’a aucun souvenir de son enfance mais des cicatrices sur l’abdomen et des blessures dans la tête; on apprendra qu’elle a tenté de se suicider avant le début de l’histoire racontée dans la série.

Quant à Eve, sa mère, et l’avocat Michael Ennis, ils ont un passé commun au Rwanda à l’époque du génocide. Et le passé d’Alice Munezero, membre du gouvernement rwandais actuel et ancienne générale de l’Armée patriotique rwandaise, bras armé du Front patriotique rwandais créé par les Tutsis à la fin des années 80, refait également surface, sans oublier celui Eunice Clayton, secrétaire d'Etat américaine adjointe aux affaires africaines.

Cette galerie de personnages montre bien l’étendue internationale du génocide des Tutsis, qui remonte historiquement à l’époque de la colonisation de l’Afrique par les puissances occidentales. Les plaies ne sont toujours pas cicatrisées aujourd’hui. Le rôle et la responsabilité de la France concernant le génocide rwandais, jusqu’au plus haut échelon de son gouvernement, ne sont pas minimisés. Il n’est pas interdit de penser qu’une série produite en France n’aurait pas été aussi loin à ce propos.

Leçon d’histoire sur un air de thriller

Hugo Blick, le scénariste et réalisateur de "Black Earth Rising", réussit à construire une histoire qui se décline en série avec un matériau géopolitique complexe, tout en évitant le piège de l’exposé ennuyeux grâce à un récit à la fois fondé sur le drame judiciaire et le thriller d'espionnage.

Dès le premier épisode, des événements spectaculaires alimentent l’intrigue et la découverte progressive des liens qui nouent le destin des différents personnages, tant dans leur passé africain que dans leur vie d’aujourd’hui, nous scotchent à l'écran.

Et puis il y a Kate, admirablement interprétée par Michaela Coel, qui vient du théâtre et à laquelle on doit la série comique "Chewing Gum", qu’elle a écrite et dont elle interprète le rôle principal. Michael Coel propose un personnage très marquant, tant par son physique et son expression corporelle que par une psyché bancale. Elle est à la recherche de son passé notamment grâce à des indices délivrés par d’autres personnages.

Le personnage de Kate est également habité par une puissante volonté de justice et revendique haut et fort l’idée de laisser les Rwandais s’occuper de leur propre destin, de gérer leurs affaires sans être assistés par les puissances occidentales. Le premier épisode de la série s’ouvre d’ailleurs sur une causerie universitaire à laquelle la procureure Eve Ashby participe.

Cette scène dans laquelle elle est apostrophée par un étudiant qui lui reproche sans ménagement l’attitude paternaliste invariablement conquérante des anciens colonisateurs vis-à-vis du continent africain, donne d’entrée le ton de "Black Earth Rising", qui ne sera pas celui d’une série dans laquelle les "gentils blancs" vont expliquer aux "sauvages noirs" comment composer avec leur passé.

Pascal Bernheim/mcc

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