L'image est extraite de "La pointe courte", premier long métrage d'Agnès Varda tourné à Sète en 1955 et présenté la même année au Festival de Cannes. Une photo de plateau retouchée où la lumière tient le premier rôle, rouge et jaune pour le coucher de soleil, violette pour la mer et dorée pour la caméra.
La cinéaste s'accroche à la caméra des deux mains, les yeux rivés dans le viseur. Elle est juchée sur le dos d'un technicien, impassible, lui-même en équilibre sur une caisse au sommet d'une tour en bois.
Sur le cliché original en noir et blanc, une femme apparaît de dos au premier plan. Elle a été effacée au photo-montage. Elle note sur une ardoise le numéro de la scène. La tour lui arrive à la taille. On réalise que ce qui apparaît sur l'affiche comme une immense construction n'est en fait qu'un escabeau posé sur le sable. Une petite estrade d'un demi-mètre qui permet à la cinéaste de petite taille de prendre un peu de hauteur pour réaliser la séquence.
Cette prise de vue n'a donc à l'origine rien de vertigineux mais le Festival a décidé de lui donner une dimension grandiose. "Agnès Varda, l’œil posé sur la plage de Cannes, jeune et éternelle, sera le phare inspirant de la 72e édition!" C'est en ces termes que l'institution a présenté son visuel.
Une artiste en liberté
"Tel un manifeste, cette photo de plateau recèle déjà tout d'Agnès Varda: la passion, l'audace, l'espièglerie. Les ingrédients d'une recette d'artiste en liberté qu'elle enrichira sans cesse", ajoute le Festival de Cannes.
Un visuel à l'image du cinéma à l'état pur, truqué, bricolé, sublimé pour que seule la magie de l'histoire s'imprime sur la pellicule.
Lorsqu'elle tournait les images de sa première fiction perchée sur le dos de son assistant, Agnès Varda avait 26 ans. Elle a rejoint le ciel ce printemps. Le Festival de Cannes lui rend hommage et braque une dernière fois ses projecteurs sur son éternel talent.
Sophie Iselin/ats/mh
72ème édition du Festival de Cannes, 14 au 25 mai 2019