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"X-Men: Dark Phoenix", une mise en scène sobre à défaut d'être brillante

L'affiche du film "X-Men. Dark Phoenix". [DR]
Débat cinéma / Vertigo / 26 min. / le 5 juin 2019
Ce douzième volet de la saga X-Men boucle la boucle en tournant en rond. Reste une production honnête qui ne cache pas sa volonté de féminiser l’univers des mutants Marvel.

1975. La petite Jean Grey est assise à l’arrière de la voiture. Devant elle, ses parents. Une musique passe sur l’autoradio. Involontairement, Jean change de fréquence par la seule force de son esprit. Les bruits se mélangent dans sa tête, le brouhaha devient assourdissant, jusqu’à ce que la fillette hurle "Silence", provoquant l’accident qui coûtera la vie à sa mère.

Après cette entrée en matière saisissante, "X-Men: Dark Phoenix" fait un bond en 1992. Devenue adulte, Jean Grey a rejoint l’internat pour mutants créé par Charles Xavier (James McAvoy). Lors d’une mission de sauvetage dans l’espace, elle absorbe un magma cosmique qui décuple sa force et la rend incontrôlable. Déchaînée, elle devient une menace pour elle-même autant que pour les autres mutants, tiraillée entre deux personnalités: Jean Grey et Dark Phoenix.

Un épisode qui ressasse

Dix-huit ans après le premier "X-Men" de Bryan Singer, qui avait posé les jalons d’une saga en dents de scie, le scénariste et producteur Simon Kinberg, dont c’est ici la première réalisation, focalise son récit sur l’une des figures les plus passionnantes de la franchise: Jean Grey (Sophie Turner, la Sansa Stark de "Game of Thrones")

Après le calamiteux "X-Men: Apocalypse", "X-Men: Dark Phoenix" relève le niveau en imposant une noirceur et un sérieux réjouissants. La mise en scène est sobre à défaut d’être brillante. Les personnages ne sont pas sacrifiés au déluge de séquences d’action qui évitent par ailleurs la surenchère numérique. Très vite, pourtant, domine la sensation que cet épisode ressasse des motifs antérieurs.

Que ce soit l’instabilité destructrice de Jean Grey, la mégalomanie du professeur Xavier, les tensions intestines entre mutants cherchant à cohabiter avec les humains et ceux prônant le séparatisme, les thématiques développées dans ce volet ont déjà été abordées dans d’autres chapitres de la saga. Et quand le scénario introduit un groupe d’extraterrestres mené par Jessica Chastain, la nouveauté paraît totalement greffée sur un récit qui aurait gagné à approfondir les conflits propres aux personnages de son univers.

La force des "X-Women"

En dépit des réserves que l’on peut émettre à l’égard de ce volet loin d’être indigne, la focalisation évidente sur les personnages féminins intrigue autant qu’elle intéresse. En plus de Jean Grey, "X-Men: Dark Phoenix" met en effet particulièrement en avant la mutante bleu Mystique (Jennifer Lawrence) ainsi que le personnage d’extraterrestre monolithique incarné par Jessica Chastain. Le pouvoir réuni de ces trois femmes dépasse de loin celui de tous les mâles mutants.

Et quand Jean Grey affirme que ses émotions constituent sa force alors que tout le monde lui a prétendu qu’elles étaient synonymes de faiblesse, on ne peut s’empêcher de voir en Dark Phoenix l’expression libératrice d’une femme qui assume sa singularité plutôt que de se conformer à des modèles imposés par ses pairs comme par ses pères.

Reste à savoir ce que le futur réserve aux X-Men, sachant que cet épisode est le dernier produit sous le giron de la Fox, rachetée depuis par Disney. La firme aux grandes oreilles va devoir maintenant repenser intégralement l’univers des mutants pour lui donner une raison d’exister dans les années à venir.

Rafael Wolf/aq

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