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Géraldine Nakache et Leïla Bekhti, sœurs de cœur et de fiction

Une scène du film "J'irai où tu iras" de Géraldine Nakache, avec Leïla Bekhti. [Mars Films]
Cinéma: Géraldine Nakache: "Chanter, cʹest encore plus dur que jouer" / Vertigo / 7 min. / le 1 octobre 2019
Géraldine Nakache émeut dans "J'irai où tu iras", sa première réalisation en solo. Elle partage l'affiche avec Leïla Bekhti, qui interprète sa sœur ennemie.

Le cinéma est aussi une affaire de sœurs. Mais qu'elles soient jumelles ou fâchées, les sœurs nourrissent la plupart du temps des fictions qui font de l'une, aux yeux de l'autre, un boulet encombrant.

Ainsi de Mina (Leïla Bekhti) et Vali (Géraldine Nakache). La première, cadette froide et distante, exerce comme thérapeute en milieu hospitalier. La seconde, aînée exubérante, se rêve choriste de Céline Dion. Elles n'ont rien en commun, sinon un passé compliqué et un gentil papa atteint d'un cancer (Patrick Timsit), qui leur fait des blagues et voudrait tant les réconcilier. Et Mina se voit quasi forcée par le paternel d'accompagner sa sœur à une audition de chant.

Dans "J'irai où tu iras" (le titre est celui d'une chanson célèbre de Céline Dion), qui sort en salle aujourd'hui, Géraldine Nakache réembauche donc sa vieille copine Leïla Bekhti, qu'elle dirigeait déjà dans "Nous York" (2012) et surtout dans "Tout ce qui brille" (2010), grand succès populaire. Ces derniers étaient réalisés avec la complicité d'Hervé Mimran. Géraldine Nakache signe cette fois-ci sa première réalisation en solo, "son troisième premier film, comme elle dit, car elle a enfin osé faire le pas".

Un hommage à la culture populaire

Côté scénario, donc: Céline Dion, un père cancéreux et une histoire de réconciliation. On aurait tôt fait de classer "J'irai où tu iras" dans la catégorie comédie dramatique franchouillarde, de celles qui mélangent savamment kitsch et bons sentiments. 

Il y a bien, parmi les ingrédients, un peu de pathos, une certaine lourdeur psychologique (ah les traumatismes de l'enfance) et deux personnages principaux brossés à gros traits, forcément opposés, forcément amenés à se rapprocher. Mais le film touche. Il emporte même. Quand Leïla Bekhti refile en douce des gâteaux à un vieux monsieur hospitalisé. Quand, lors d'un interminable trajet en voiture, Géraldine Nakache impose à sa sœur exaspérée tant ses vocalises approximatives que "Babacar", de France Gall.

Sans vulgarité aucune, Géraldine Nakache déclare sa flamme à la chanson populaire, à la culture populaire, sans céder à la facilité d'une dramaturgie convenue (pas de finale en chanson). Elle dépeint aussi avec une tendresse infinie le monde des fans, des chanteurs de l'ombre, des mordus de Star Ac. Il est de bon ton de considérer que leurs aspirations sont un peu honteuses, un peu minables. Géraldine Nakache leur rend toute leur grandeur.

Raphaële Bouchet/ld

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