Lorenzo Mattotti, maître du pastel, met en images un conte de Buzzati

Plusieurs musées l'ont exposé, les magazines les plus prestigieux lui ont offert leurs couvertures, la presse adore ses dessins, le monde de la mode aussi. Maître de la couleur, virtuose de l'affiche, Lorenzo Mattotti, qui dessine depuis qu'il est tout petit, est également auteur de bandes dessinées et de contes pour enfants.

Artiste complet, il lui restait pourtant encore un territoire à explorer: l'animation cinématographique. A 65 ans, cet Italien né à Brescia mais vivant à Paris, vient de réaliser son premier long-métrage: "La fameuse invasion des ours en Sicile", inspiré d'un conte de Dino Buzzati, un auteur que Lorenzo Mattotti connaît depuis l'adolescence. "Il fait partie de ma culture. C'était à la fois un peintre et un écrivain. Buzzati a même fait une bande dessinée "Poèmes-bulles", ce qui était exceptionnel à une époque où la BD était un sous-genre. D'une certaine manière, il a justifié ma passion d'enfant" explique Lorenzo Mattotti.

A regarder, la bande-annonce du premier film de Lorenzo Mattotti:

La préparation de son long-métrage a duré six ans, durée normale pour un tel projet. "La technique de l'animation est lente, il faut de la patience. Le plus difficile a été le montage afin de trouver le bon rythme". Pour le graphisme, Lorenzo Mattotti s'est directement inspiré des dessins de Dino Buzzati qui avait lui-même illustré sa fable.

J'ai essayé d'utiliser quelques-unes de ses idées et autres trouvailles graphiques. Par exemple, les nuages qui cassent les montagnes, les arbres très pointus, des petits personnages dans de très grands paysages.

Cette expérience cinématographique lui a donné le goût du travail d'équipe, lui qui pratique son art en solitaire, avec comme seule compagnie la musique. Ce n'est pas un hasard si Lou Reed a fait appel à Mattotti pour illustrer son recueil de poèmes sur Edgar Poe, après avoir découvert l'un des plus bels albums de l'Italien, "Docteur Jekyll et Mister Hyde". "La musique m'a toujours inspirée; elle me permet d'avoir accès à des visions".

Sa rencontre avec Lou Reed en 2003 a profondément marqué Mattotti. La musique et les textes "de cet authentique poète contemporain" lui ont permis d'exprimer la part sombre de lui-même qu'il n'avait encore jamais osé publier. "Mais avec ces deux anges gardiens que sont Poe et Lou Reed, je pouvais sortir tous mes diables", s'amuse l'Italien.

Propos recueillis par Laurence Froidevaux

Adaptation web: Marie-Claude Martin