"Mon chien stupide": pour rire (ou pas) de l'usure du couple
En adaptant le roman au vitriol de John Fante, Yvan Attal réalise un de ses films les plus personnels, où l'autodérision le dispute à la mélancolie. Une comédie plaisante sur le couple et la famille. Charlotte Gainsbourg en épouse dépressive d'un auteur en panne d'inspiration reste gracieuse en toute circonstance.
Les critiques de "Vertigo" sont toutefois partagés sur ce film. Raphaële Bouchet le juge fade, bien-pensant et carrément inexistant quand le chien, qui fait l'unanimité, disparaît de l'écran.
"Matthias et Maxime": pour tester ses connaissances en joual
Deux amis d'enfance doivent s'embrasser pour les besoins d'un film. Ce baiser de cinéma suffit à déclencher le désir. Le huitième film de Xavier Dolan, vilipendé à Cannes, bénéficie à sa sortie d'un accueil plutôt élogieux, malgré le bémol de Rafael Wolf qui estime que le film tourne en rond et qu'il est assez anecdotique.
On dit Xavier Dolan plus sobre et moins narcissique même s'il tient un des rôles principaux. Le réalisateur excelle dans le portrait de groupe et l'usage d'une langue frénétique, et souvent incompréhensible, pour dire l'indicible de l'amour - mais le film est sous-titré. Xavier Dolan donnera une master classe samedi 9 novembre à l'auditorium Arditi de Genève, dans le cadre du 25e Geneva International Film Festival.
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"Camille": pour comprendre le métier de photographe de guerre
Sur les traces de Camille Lepage, jeune photographe de guerre assassinée en 2014 en Centrafrique, le réalisateur Boris Lojkine réussit un double portrait: celui d'une femme vibrante, mélange de candeur et de ténacité, et celui d'une Afrique en convulsion. Prix du public lors du dernier festival de Locarno, le film est porté par l'interprétation solaire de Nina Meurisse.
"Mon nom est clitoris": pour sortir de l'illettrisme sexuel
Il a fallu la vague #metoo pour que le clitoris sorte de l'ombre et devienne l'expression de la fierté féminine. C'est ce que montrent les deux jeunes réalisatrices Daphné Leblond et Lisa Billuart Monet qui ont interrogé douze femmes de 20 à 25 ans qui se souviennent de leurs premières sensations et de leur parcours initiatique. Toutes aspirent à la même chose: une sexualité épanouissante, libre et égalitaire.
Un documentaire joyeux et pédagogique, visible dès l'âge de 10 ans.
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"Docteur Sleep": pour avoir peur 40 ans après "Shining"
C'est la suite de "Shining", roman de Stephen King qui n'a jamais caché qu'il détestait l'adaptation de Kubrick. La vision de Mike Flanagan sera-t-elle plus appréciée par le maître de l'horreur?
Plus récit initiatique que film d'angoisse, le réalisateur de "Ne t'endors pas" réussit à nous replonger dans l'hôtel mythique de Kubrick, dont il a refilmé des séquences, tout en rendant hommage au livre. Certains de nos critiques estiment qu'il s'agit d'un pur produit pour public adolescent, d'autres que Flanagan est parvenu à créer un climat d'anxiété de bout en bout. Tous s'accordent sur un très beau final.
"Un monde plus grand": pour sortir de son corps
Partie en Mongolie chez des éleveurs de rennes pour enregistrer des chants traditionnels, Corine pensait pouvoir surmonter la mort de Paul, son grand amour. Elle découvrira qu'elle a des pouvoirs chamaniques.
Adaptation du livre "Mon initiation chez les chamanes" de Corine Sombrun, le film de Fabienne Berthaud est à la fois très documenté et sensoriel dans sa mise en scène immersive. Cécile de France, éblouissante, parvient à nous faire croire à l'invisible.
Et encore:
Pour vibrer d'émotion, "Hors norme" d'Éric Toledano et Olivier Nakache ("Le Sens de la fête", "Samba", "Intouchables"). Le tandem traite d'un sujet grave: l'inclusion des autistes dans notre société. Ils le font avec autant d'humanisme que de légèreté, de précision documentaire que d'embardées comiques.
Pour vous scotcher à l'écran, "Joker", brûlot contre les médias, les élites politiques et une société qui aura perverti le rêve américain en cauchemar macabre. Le film de Todd Philipps est un portrait frontal et perturbant de notre époque, avec un Joaquin Phoenix proprement hallucinant.
Pour sentir votre coeur se gonfler d'émotion, "Madame", l'histoire de la relation entre une grand-maman et son petit-fils, issus d'une famille bourgeoise genevoise. D'un côté, une femme née à la fin du 19e siècle qui deviendra femme d'affaires tout en luttant contre une société patriarcale. De l'autre, un garçon attiré par les garçons qui luttera pour assumer son homosexualité dans une société hostile aux gays. Beau, sensible, intelligent.
Pour vous faire aimer l'amour, "Chambre 212", de Christophe Honoré. Une femme infidèle, un mari qui déprime, une ex en embuscade, des amants plein le smartphone et le sosie de Charles Aznavour en Jimini Cricket, "Chambre 212" est une fantaisie amoureuse qui mélange souvenirs, fantasmes et réalités. Chiara Mastroianni y est mélancomique.
Pour sortir en famille, "Shaun le mouton, la ferme contre-attaque" et aussi le très beau film d'animation de Lorenzo Mattotti "La fameuse invasion des ours en Sicile".
Pour sortir des sentiers battus, "Portrait de la jeune fille en feu", de Céline Sciamma, peinture charnelle de la naissance du désir et de son assouvissement par l'art. Un film en costumes très contemporain.
Pour sortir la tête du sac, "Alice et le maire", comédie sur la vanité du pouvoir, portée par le dialogue ciselé entre un politique désabusé (Fabrice Luchini) et une jeune philosophe (Anaïs Demoustier).
Pour vous donner envie de désobéir: "Papicha". La réalisatrice Mounia Meddour rend un hommage à toutes ces femmes algériennes qui par leur courage et leur solidarité ont résisté aux barbus, en continuant de travailler, d'étudier, de sortir, parfois au péril de leur vie. Un film lumineux, porté par quatre formidables comédiennes.
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