Les choix de Raphaële Bouchet
L’année 2019 en cinq phrases marquantes:
"Ne regrettez pas, souvenez-vous", Noémie Merlant à Adèle Haenel dans "Portrait de la jeune fille en feu", de Céline Sciamma.
"Au cinéma de mon enfance, ça sentait la pisse et le jasmin", Antonio Banderas dans "Douleur et gloire", de Pedro Almodovar. Cinéphile et déprimé, il dit aussi: "Je n’ai rien pu faire pour sauver Natalie Wood et Marilyn."
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"Il n’y a ni mauvaises herbes ni mauvais hommes. Il n’y a que de mauvais cultivateurs." Victor Hugo, cité dans "Les Misérables", de Ladj Ly.
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"Je suis Palestinien", la seule réplique d’Elia Suleiman, dans "It Must Be Heaven", d’Elia Suleiman.
"Je disparais dans le flou, je vous quitte", Agnès Varda dans "Varda par Agnès".
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Les choix de Philippe Congiusti
"Le daim" de Quentin Dupieux
Parce que cette tragi-comédie a trop un style de malade.
"Looming Storm" de Dong Yu
Parce que ce polar chinois humide est simplement virtuose.
"Joker" de Todd Phillips
Parce que cette bouleversante valse du pantin Joachim Phoenix permet une critique très bien vue de notre société.
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"Les Misérables" de Ladj Ly
Parce que ce regard sur la banlieue, humaniste malgré la violence, est d’une justesse et d’une intelligence redoutable.
"J’ai Perdu mon Corps" de Jérémy Clapin
Parce que cette improbable odyssée prouve à elle seule que l’animation française pour adulte a toujours la main sur la scène mondiale en matière d’audace.
Les choix de Rafael Wolf
"Une vie cachée" de Terrence Malick
En trois heures d’une beauté sidérante, Malick ressuscite le destin d’un paysan autrichien qui refusa de combattre pour Hitler. Et raconte, à travers cet objecteur de conscience christique, une humanité toute entière sauvée par le pacifisme entêté d’un seul être humain. Le film le plus majestueux de Malick depuis "La ligne rouge".
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"Midsommar" d’Ari Aster
Une jeune femme qui vient de perdre toute sa famille se fond peu à peu dans une communauté païenne suédoise aux rites animistes et sacrificiels. Un conte controversé, malaisant, d’une audace et d’une singularité essentielles, qui réussit à montrer, dans une même image, la beauté solaire et la monstruosité terrassante d’un visage enfin résilient.
"Once upon a time… in Hollywood" de Quentin Tarantino
Entrecroisant les destins d’un acteur has-been, d’un cascadeur et de Sharon Tate, le film le plus personnel de Quentin Tarantino ressuscite une époque révolue avec une mélancolie bouleversante. Une fable où la force d’évocation du cinéma console d’une réalité cruelle.
"Traîné sur le bitume" ("Dragged across concrete") (inédit en salles) de S. Craig Zahler
Mel Gibson et Vince Vaughn incarnent deux flics, suspendus pour leurs méthodes brutales, qui se décident à filer des braqueurs de banque pour leur dérober leur butin. Un immense film noir quasi nihiliste de 2h40 où les hommes tombent comme des mouches dans un monde qui se fichent de leur sort. Teigneuse, radicale, impitoyable, l’œuvre majeure du cinéaste le plus méconnu du cinéma américain moderne.
"Les Misérables" de Ladj Ly
Une fresque puissante en forme de cocktail Molotov qui décortique les règles et les hiérarchies d’une cité parisienne. La révolte des enfants contre la loi des adultes hisse le film vers des sommets vertigineux. Gavroche n’est pas mort: il s’appelle Issa le prophète. Assurément la claque de l’année.