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Le réalisateur Samir brise les tabous dans "Baghdad in My Shadow"

Une image du film "Baghdad in My Shadow" de Samir. [Filmcoopi Zürich]
Le réalisateur Samir brise les tabous dans "Baghdad in My Shadow" / La Matinale / 1 min. / le 19 février 2020
Après "Forget Baghdad" et "Iraqi Odyssey", le cinéaste irako-suisse revient sur ses terres natales avec un thriller haletant tourné entre l'Irak et l'Angleterre.

"Baghdad in My Shadow" est un film du réalisateur zurichois d'origine irakienne Samir, financé grâce à la contribution de la Confédération, de la Grande-Bretagne et de l'Allemagne. Tourné en anglais et en arabe, le film s'adresse autant au public occidental qu'à celui du Moyen-Orient.

Présenté pour la première fois au festival de Locarno en 2019 et récompensé par le public, le film raconte l'histoire de trois protagonistes irakiens exilés à Londres. L'architecte Amal, l'informaticien Muhanad et le poète Taufiq portent tous de lourds secrets. Ils se rencontrent au café Abu Nawas, avant qu'un évènement tragique ne bouleverse leurs vies.

Entre fiction et documentaire

L'idée du film vient à Samir alors qu'il termine son film documentaire "Iraqi Odyssey", dans lequel il filme sa famille éparpillée à travers le monde. Il s'explique: "J'ai remarqué qu'il était impossible de rentrer dans des recherches profondes sur des questions politiques qui me touchent – l'athéisme, la liberté des femmes et l'homosexualité – dans mon film documentaire sur ma famille. J'ai donc choisi de faire une fiction."

>> A voir, l'interview du réalisateur dans le 12h45 :

Rendez-vous culture: Samir à l'occasion de la sortie de "Baghdad in my shadow"
Rendez-vous culture: Samir à l'occasion de la sortie de "Baghdad in my shadow" / 12h45 / 11 min. / le 18 février 2020

Tous les personnages de "Baghdad in My Shadow" sont inspirés de personnes réelles. "Mon film est malgré tout plus documentaire que fiction, parce que tous les personnages viennent d'histoires avec lesquelles j'ai grandi", explique le réalisateur.

"Baghdad in My Shadow" aborde trois thèmes tabous du monde arabe: l’athéisme, la libération des femmes et l’homosexualité.

Samir

Des actrices et acteurs qui ont pris des risques

Zahraa Ghandour, l'actrice qui incarne l'architecte rebelle Amal, est aussi présentatrice télé et une figure de la lutte féministe. Elle vit à Baghdad. Ce rôle a fait d'elle la bête noire des islamistes. Consciente des risques, elle a manqué d'annuler sa participation au tournage. Cette anecdote fait sourire le réalisateur: "D'une certaine manière, le film représente sa vie. Elle était d'accord de le faire, mais elle a oublié le scénario dans la maison de sa mère en Irak. Cette dernière l'a lu et cela a créé des problèmes, mais en fin de compte elle est venue."

Le rôle de Muhanad, exilé à Londres afin de pouvoir vivre son homosexualité sans craindre pour sa vie, était tout aussi complexe. La recherche d'un acteur irakien souhaitant interpréter ce rôle était difficile. "Nous avons organisé un casting à Baghdad et beaucoup de jeunes talents se sont présentés, c'était formidable", raconte Samir. "Mais lorsqu'on posait la dernière question, 'Est-ce que tu veux jouer le rôle d'un homosexuel?', ils arrêtaient tout de suite l'audition. Par chance, une agence de Londres nous a trouvé un jeune diplômé de l'école de comédie dont les parents étaient irakiens, Waseem Abbas."

Il reste le dernier thème du film: l'athéisme. Un sujet tout aussi tabou dans la communauté irakienne en exil décrite par Samir. "J'ai grandi avec deux religions, le communisme et l'Islam chiite. Pourtant, je n'ai jamais été capable de parler franchement de mes croyances. Mes parents étaient très tolérants, mais pour eux la religion était l'affaire de l'individu."

Propos recueillis par Sophie Iselin et Viviane Gabriel

Adaptation web: ms

"Baghdad in My Shadow", à voir sur les écrans romands dès le 19 février 2020.

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