Coronavirus oblige, le festival Visions du Réel continue de se dérouler en ligne jusqu'au 2 mai. Friands de documentaires, les Romands ont répondu présent à cette formule de secours. Certaines séances ont même affiché complet puisque les films sont limités à 500 visionnements.
Compte tenu de la situation, on peut parler de succès: depuis le début, plus de 20'000 personnes se sont inscrites pour le streaming et sur les 77 films proposés la première semaine, 57 étaient complets. Cet engouement vaut pour la plateforme de Visions du Réel mais aussi pour le site de la RTS où chaque film peut être visible pendant 24 heures. Tout se passe comme si, en période de confinement, on avait envie de regarder en face un monde qui n'a pas cessé de tourner.
>> A suivre, : Visions du Réel en ligne sur RTS.ch
L'usine filmée comme un animal
La compétition internationale a commencé samedi avec des films venus de tous les coins du monde. Parmi eux, "Kombinat" du Genevois Gabriel Tejedor, un documentaire qui se déroule dans la ville de Magnitogorsk, à 1'700 km à lʹest de Moscou. Là-bas, la vie des habitants tourne autour du Kombinat, une énorme usine dʹacier et de fer.
Dès l'ouverture du film, l'usine est filmée comme un animal tentaculaire, un ventre bouillonnant de feu. "C'est elle qui structure la ville au milieu de la steppe. D'un côté, la ville blanche où les gens vivent; de l'autre la ville noire avec son usine gigantesque que l'on voit et entend de partout. Elle est filmée comme un organisme vivant qui donne à manger aux travailleurs mais qui malheureusement aussi empoisonne la nature. C'est elle le personnage principale" dit le réalisateur Gabriel Tejedor qui connaît bien la Russie et ses pays satellites, pour y avoir déjà tourné trois films.
Une famille en immersion
Les autres personnages de "Kombinat", c'est cette famille, dont la vie dépend entièrement de l'usine, et que le réalisateur a mis un mois à trouver. Avec son chef opérateur Camille Cottagnoud, Gabriel Tejedor suit leur quotidien, leur intimité, avec beaucoup de douceur et de subtilité, et sans jamais tomber dans le misérabilisme.
Si le lien avec l'usine reste ambivalent, le film, lui, est quasiment dénué de conflit, ce qui lui confère beaucoup de charme. On passe d'une réunion familiale à une soirée salsa où se rendent les ouvriers après leur journée, avec beaucoup de naturel. "Le discours des officiels ne m'intéresse pas. Ce que j'aime, c'est ce qui se passe autour d'une table avec la grand-mère qui parle des purges staliniennes et le père de l'Afghanistan. C'est la vie, dans tout ce qu'elle a de beau et d'horrible".
Sujet radio: Raphaële Bouchet
Adaptation web: mcm