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"Love Me Tender" et "Mare", deux récits d’une liberté longtemps désirée

Marija Škaričić dans le film "Mare" d'Andrea Štaka, nominé pour le Prix du cinéma suisse. [Frenetic Films]
La chronique culturelle - "Mare" et "Love me tender", deux films de réalisatrices suisses / La chronique culturelle / 2 min. / le 5 juin 2020
Les cinémas rouvrent enfin. L'occasion de se pencher sur deux nouveaux films réalisés par des Suissesses, "Love Me Tender" de Klaudia Reynicke et "Mare" d'Andrea Štaka, qui ont en commun de pouvoir être lus comme les récits d’une liberté enfin recouvrée.

Les longs-métrages "Love Me Tender" de Klaudia Reynicke et "Mare" d'Andrea Štaka sont très différents dans leur sujet et leur réalisation, mais évoquent tous deux une liberté longtemps souhaitée mais pas aussi facile à embrasser qu’on le rêvait. Ce qui leur donne une résonance très forte avec la période actuelle.

"Love Me Tender" nous renvoie en plein confinement. Celui que vit Seconda, la trentaine en quarantaine depuis ce qui semble faire des années dans un appartement minuscule du Tessin, entre un père vautré devant la télé, une mère aux silences durs et un chat trop blanc dans ce décor glauque.

Le refus de sortir

Seconda refuse de sortir, aucun virus ne menace pourtant: elle est agoraphobe. Son air, elle le prend uniquement dans la danse qu’elle pratique brutalement en justaucorps déboutonné devant ses parents las. Sans entrer dans les détails, il faudra une successions d’événements tristes et loufoques pour qu’elle soit contrainte de sortir - en combinaison intégrale, tout de même, au supermarché voire jusque dans la forêt.

Un scénario très "post-confinement" mais par hasard, évidemment. Mais "Love Me Tender" ne vise de toute évidence pas l’identification. L’étrangeté domine davantage dans ce film réalisé par l’Helvético-Péruvienne Klaudia Reynicke. On hésite entre rire et effroi face aux bizarres voies d’émancipation explorées par cette Seconda.

Prisonnière d'un mariage usé

L’héroïne de "Mare" est quant à elle plus facile à reconnaître: il s'agit d'une mère de trois enfants, prisonnière des corvées ménagères et d’un mariage usé comme la machine à laver qui tombe en panne. Alors quand le beau Polonais tout juste installé à côté propose de venir la réparer, une fenêtre de liberté s’ouvre pour Mare qui s’y jette en toute sensualité.

C’est le scénario classique de l’amant qui régénère mais que la réalisatrice Andrea Štaka, (première femme à recevoir le Léopard d’Or à Locarno en 2006 pour "Das Fräulein") explore avec une délicatesse infinie, dans une Croatie ravagée par l’ennui et le poids de l’histoire. L’air de rien, on entre dans la quotidien de cette femme banale, sans plus vouloir la quitter. Alors qu’elle, confinée dans une vie qu’elle a l’impression de ne pas avoir choisie, rêve de s’échapper. Mais à quoi bon partir? Suffit-il d’être ailleurs - ou dehors - pour se sentir libre? C’est une question que "Mare" et "Love Me Tender" nous soufflent, chacun à sa façon.

Anne-Laure Gannac/mh

"Mare" d'Andrea Štaka, à voir dès le 9 juin en avant-première au cinéma City Club de Pully puis à partir du 10 juin partout en Suisse romande, comme "Love Me Tender" de Klaudia Reynicke.

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