JP (Jean-Pascal Zadi), un acteur raté de 40 ans, décide, autant par conviction que pour se mettre en avant, d’organiser la première grosse marche de la contestation noire en France.
Pour offrir plus de retentissement médiatique à son projet, il fait appel à une série de personnalités influentes - Lilian Thuram, JoeyStarr, Soprano, Omar Sy, Fary ou Vikash Dhorasoo - qui jouent leur propre rôle et apportent une dimension burlesque à cette comédie qui résonne avec l'actualité de ces dernières semaines. Actualité marquée par les manifestations contre le racisme qui ont suivi la mort de George Floyd aux Etats-Unis et par les rassemblements organisés en France en hommage à Adama Traoré.
Pourtant, le film a été imaginé par Jean-Pascal Zadi il y a cinq ans déjà. "La critique répète que notre film était casse-gueule, sur la corde raide. Pour moi, rien de plus naturel, d'organique, que de parler des Noirs en France, un sujet que je connais bien. Je me sens tout à fait à ma place et n'ai jamais eu l'impression d'aller au casse-pipe. Pour moi, on peut rire de tout à condition que tout le monde ait la parole. Les rieurs ne doivent pas toujours être du même côté", s'amuse Jean-Pascal Zadi, rappeur, acteur et coréalisateur avec John Wax de "Tout simplement noir", un faux documentaire hilarant et incisif qui, sous ses airs déconnants, réussit à déconstruire un certain nombre de clichés socio-ethniques.
Premier rôle a cinéma
Le duo Zadi-Wax ne s'est rien interdit et la Gaumont qui a produit le film a donné carte blanche au tandem qui, lui-même, a laissé ses nombreuses guest-stars jouer leur partition comme ils l'entendaient. "Le film est écrit à 80% et improvisé à 20%" précise Jean-Pascal Zadi qui s'offre pour la première fois un vrai premier rôle au cinéma.
Mon personnage, c'est un peu le Candide (ndlr: qui étymologiquement veut dire "blanc") de Voltaire sauf que sous prétexte d'une noble cause, il se montre souvent hautain. Il se prend pour Martin Luther King et finit par froisser beaucoup de monde.
50 nuances de noir
Une question parcourt le film comme un running gag: que veut dire être Noir? Cela donne des scènes désopilantes: Eric Judor est trop métissé, Vikash Dhorasoo a les cheveux trop raides, Claudia Tagbo correspond trop au stéréotype, Joe Starr est trop mélangé etc.
Dans le rôle du Blanc, Mathieu Kassovitz incarne un antiraciste raciste d'anthologie pour qui les Africains ne sont jamais assez africains. On croise aussi Rachid Djaïdani en Arabe raciste et antisémite et Ramzy Bedia et Amelle Chahbi qui nient hypocritement l'être.
"Tout simplement noir" aurait pu aussi bien s'intituler "50 nuances de noir" tant le spectre est large. "On ne voulait surtout pas faire la leçon, seulement montrer à travers le prisme de l'humour que les choses sont plus complexes qu'on ne l'imagine et qu'il convient d'éviter les généralités".
"Tout simplement noir" est une vraie comédie française qui, pour une fois, donne aux Afro-Caribéens des rôles de premier choix.
Propos recueillis par Laurence Froidevaux
Adaptation web: Marie-Claude Martin