Il est toujours périlleux de parler de religions, et encore plus de raconter ou filmer autrement les dogmes, les prophètes et autres histoires saintes sans soulever des tempêtes de protestations.
On ne touche pas à la foi sans risque. Martin Scorsese l'a appris en 1988 avec "La dernière tentation du Christ", une adaptation par Paul Schrader du roman de Nikos Kazantzakis publié en 1955.
Le film, comme le livre, raconte l'histoire d'un Jésus profondément humain, luttant contre sa part divine. Etant homme, il est soumis à la tentation, à la colère, à la frustration, au doute, et se retrouve même en train de rêver à une vie possible avec Marie-Madeleine.
A sa sortie, en 1988, le film fait scandale. On crie au blasphème et la polémique s'enflamme entre les autorités religieuses et des chrétiens exaltés, qui n'ont jamais vu le film, et ne le verront jamais, ce qui ne les empêche pas de bouter le feu à plusieurs cinémas en France. Les injures antisémites fusent, les propos dépassent la portée du film qui est interdit dans plusieurs pays.
Mais que s'est-il passé pour qu'un film déchaîne autant les passions?
Il y a tout d'abord l'appropriation de la vie de Jésus par un réalisateur américain, faisant du Christ un homme. Il y a ensuite le climat ambiant de ces années 1980, climat fortement marqué par le retour du religieux, avec une montée des extrémismes et le schisme entre le Vatican et Monseigneur Lefebvre. L'époque est à une remise en question de Vatican II.
La scène du film sur laquelle se cristallise toute la polémique est celle où Jésus fait l'amour à son épouse, Marie-Madeleine. Une scène chaste, délibérément dépourvue d’érotisme qui ne laisse aucun doute sur sa nature: c'est un rêve, une vision suscitée par le diable.
Mais ce qui choque le plus, c’est la violence. Violente, la terre de Judée sous le soleil. Violente, la misère du peuple. Violente, la répression des envahisseurs romains. Il y a du sang, beaucoup de sang, et un Christ de chair.