Aux Oscars, qui ont lieu fin avril, deux femmes sont nominées dans la catégorie "meilleure réalisation", aux côtés de trois hommes. Et c'est inédit.
>> Lire : Nominations aux Oscars: "Mank" en tête, les femmes en force
En septembre dernier à Venise, la cinéaste américano-chinoise Chloé Zhao a gagné le Lion d'or pour son film "Nomadland". C'était la première fois en dix ans qu'une femme remportait ce prix.
"Tout d'un coup les femmes sont là"
Stéphane Mitchell, coprésidente du réseau des femmes dans l'audiovisuel en Suisse (SWAN - Swiss Women's Audiovisual Network), espère que cela va durer.
"Au moment où la sélection de Venise a été annoncée, on a commencé à se poser des questions, en se disant: ‘c’est formidable, on passe d'une réalisatrice par an à huit réalisatrices sélectionnées en compétition internationale' (…) On a bien vu que les grands réalisateurs n’étaient pas là cette année", raconte la scénariste vendredi dans La Matinale de la RTS.
La responsable de SWAN poursuit en citant une phrase de sa coprésidente: "On sait très bien qu’en temps de guerre, tout d’un coup les femmes sont là pour faire le travail. Et on espère juste que, quand la guerre sera finie, on ne va pas les renvoyer aux fourneaux".
Les femmes ont moins à perdre
Effectivement, plusieurs grands noms ne sont pas présents dans les festivals. Ils ont reporté la sortie de leur film, dans l'attente d'une plus grande visibilité. Cela laisse de la place à d'autres personnes, qui prennent plus de risques parce qu'elles n'ont rien à perdre.
C'est l'avis de la cinéaste Andrea Staka, dont le film "Mare" sorti il y a un an a été nominé au Prix du cinéma suisse. "Comme femme, on a moins à perdre, parce qu’il y a moins qui nous appartient en ce moment", dit-elle.
"Avec 'Mare' par exemple, on a vraiment pris un risque de dire 'on va continuer, on va le montrer online, on ne va pas attendre le moment où les cinémas rouvrent'. Et quand ça ouvrait, le film entrait à nouveau dans les cinémas".
Un contexte antérieur à la pandémie
Pour la cinéaste Véronique Reymond, qui a coréalisé "Petite sœur" avec Stéphanie Chuat, film aussi nominé au Prix du cinéma suisse, cette représentation des femmes est liée au contexte d'avant-pandémie.
"On constate que les festivals sélectionnent de plus en plus de films réalisés par des femmes, et c’est certainement dû à la naissance du mouvement #MeToo, généré aux Etats-Unis en 2017", estime-t-elle. Cela "a créé une onde de choc à travers le monde entier, dans tous les domaines mais également dans le domaine culturel".
Hasard du calendrier, effet Covid ou volonté de mieux représenter les femmes: on en aura le cœur net après la pandémie.
Pauline Rappaz/oang
Un Prix du cinéma suisse très paritaire
La cérémonie de remise du Prix du cinéma suisse a lieu vendredi soir dès 19h00. L’événement est diffusé en direct sur le site www.quartz.ch.
L'évolution de la place des femmes n'est pas particulièrement marquée cette année, parce que la situation évolue depuis plusieurs années. Il y avait une lauréate pour 11 lauréats en 2015. Il y en a eu un peu plus en 2016. Et depuis, on a presque atteint la parité.
Depuis 2016, l'Office fédéral de la culture essaie de favoriser l'égalité dans le cinéma. Et pour Stéphane Mitchell, coprésidente de SWAN, on en observe peut-être les effets.
"En 2018, on a eu le plus haut niveau de femmes, de projets, de réalisatrices qui ont été soutenues dans la fiction", remarque-t-elle. "Que ça se retrouve dans le Prix du cinéma suisse deux ans après, cela peut laisser entendre qu’il y a une corrélation".