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Le cinéaste indonésien Edwin reçoit le Léopard d'Or à Locarno

- Le cinéaste indonésien Edwin a reçu samedi le Léopard d'Or du Festival du film de Locarno pour son film "Vengeance Is Mine, All Others Pay Cash".

- La 74e édition du festival, qui a eu lieu du 4 au 14 août avec son nouveau directeur artistique Giona A. Nazzaro, a proposé 205 films, dont 99 premières mondiales. Il s'est déroulé en présentiel mais avec des restrictions sanitaires.

- Plusieurs personnalités du cinéma ont été honorées, dont la productrice américaine Gale Ann Hurd, le réalisateur John Landis, les comédiennes Laetitia Casta et Kasia Smutniak ainsi que Dante Spinotti, directeur de la photo, et Phil Tippett, légende des effets spéciaux.

- La rétrospective, un des moments forts du festival, était consacrée au cinéaste italien Alberto Lattuada à travers 41 oeuvres, longs et courts métrages mais aussi des productions pour la télévision.

Un suivi assuré par RTS Culture, avec les agences

Léopard d'Or

Le cinéaste indonésien Edwin récompensé

Le cinéaste indonésien Edwin reçoit le Léopard d'Or pour son film "Vengeance Is Mine, All Others Pay Cash". Il a utilisé l'humour pour évoquer le machisme souvent rencontré en Indonésie de la fin des années 1980 au début des années 1990.

Edwin est un chouchou des festivals européens comme la Berlinale et celui de Rotterdam. Il est revenu sur le circuit cette année avec un nouveau bijou: "Vengeance Is Mine, All Others Pay Cash" (La vengeance est à moi, tous les autres paient cash), qui vient d'être présenté en première mondiale dans le cadre de la compétition internationale de Locarno. Il dresse le portrait d'un jeune homme impuissant et en colère, coincé au milieu des années 80 indonésiennes machistes.

Comme cela s'est produit pour de nombreuses productions l'année dernière, la pandémie a affecté le film, dont le tournage a dû être interrompu en raison du confinement, a-t-il expliqué à Locarno. Le monteur du film a par exemple dû faire tout le montage en ligne. "Nous nous sommes amusés, même si la situation était difficile", selon Edwin.

Ce Léopard d'Or, choisi parmi 17 films en lice, met fin à cette 74e édition du Festival du film de Locarno. Un seul film suisse concourait dans cette catégorie: "Soul of a Beast" du réalisateur zurichois Lorenz Merz, qui a reçu une mention spéciale. Il raconte l'histoire d'un père adolescent qui tombe amoureux de la petite amie de son meilleur ami.

>> Les précisions de Julie Evard dans le 19h30 :

Fin du Festival de Locarno, le bilan de Julie Evard
Fin du Festival de Locarno, le bilan de Julie Evard / 19h30 / 1 min. / le 14 août 2021

L'essentiel du palmarès

Le prix de la SRG SSR pour un film brésilien

- Léopard de la meilleure interprétation féminine: Anastasiya Krasovskaya pour "Gerda" de Natalya Kudryashova (Russie)

- Léopard de la meilleure interprétation masculine: Mohamed Mellali et Valero Escolar pour "The odd-job men" de Neus Ballús (Espagne)

- Mentions Spéciales pour "Soul of a Beast" de Lorenz Merz (Suisse) et pour "Espíritu Sagrado" de Chema García Ibarra (Espagne/France/Turquie)

- Pour la compétition "Cinéastes du présent": un Léopard d’or pour "Brotherhood" de Francesco Montagner (République Tchèque/Italie)

- Prix pour le meilleur premier long métrage : "She will" de Charlotte Colbert (Royaume-Uni)

- Léopard d'or du meilleur court métrage d’auteur: "Creature" de María Silvia Esteve (Argentine/Suisse)

- Léopard d'or de la SRG SSR pour le meilleur court métrage international: "Neon Phantom" de Leonardo Martinelli (Brésil)

- Léopard d'argent: "Les démons" de Dorothy de Alexis Langlois (France)

- Prix de la mise en scène: Eliane Esther Bots pour "In flow of words" (Pays-Bas)

- Léopard d'or du meilleur court métrage suisse: "Chute (Strangers)" de Nora Longatti, Suisse

- Léopard l'argent de la compétition nationale: "After a room" de Naomi Pacifique (Royame-Uni/Pays-Bas/Suisse)

- Prix du meilleur espoir suisse: Flavio Luca Marano et Jumana Issa pour "Es muss" (Suisse)

Un premier bilan

Une édition saluée

Cette première édition pilotée par le nouveau directeur artistique Giona A. Nazzaro, après une édition 2020 anémiée par la pandémie, est saluée par la presse. Le journal genevois Le Courrier estime par exemple que "le festival a retrouvé son rôle de prospecteur du cinéma d'auteur".

Ce grand rendez-vous estival du cinéma en Suisse a pu accueillir jusqu'à 5000 personnes sur la Piazza Grande. Le public, même s'il était masqué et moins nombreux que d'habitude en raison des mesures sanitaires, a découvert un programme riche de près de 200 films, dont une centaine en première mondiale, une dizaine de premières suisses et une vingtaine de premiers longs métrages.

>> A lire aussi : Le Festival de Locarno a renoué avec une partie de son public

Cette 74e édition s’achève samedi soir avec la remise d'un prix au réalisateur italien Dario Argento pour l'ensemble de son œuvre et son interprétation surprenante dans "Vortex" du réalisateur argentin Gaspar Noé, un drame sur les amours d'un vieux couple sénile.

Rupert Everett joue dans "She Will"

L'acteur anglais participe à ce film d'horreur féministe

Rupert Everett était présent au festival de Locarno pour présenter "She Will", film dʹhorreur féministe réalisé par Charlotte Colbert.

>> A voir, un portrait de l'acteur dans le 19h30 :

Portrait de l'acteur anglais Rupert Everett qui présente au festival de Locarno "She will", un film d'horreur féministe.
Portrait de l'acteur anglais Rupert Everett qui présente au festival de Locarno "She will", un film d'horreur féministe. / 19h30 / 2 min. / le 12 août 2021

L'histoire du long métrage se résume ainsi: après avoir subi une double mastectomie, Veronica Ghent (jouée par Alice Krige) part passer sa convalescence dans la campagne écossaise avec sa jeune infirmière, Desi (interprétée par Kota Eberhardt).

Elle découvre que le processus d'une telle intervention chirurgicale soulève des questions sur son existence même, ce qui l'amène à s'interroger sur ses traumatismes passés et à les affronter. Les deux femmes développent un lien improbable alors que des forces mystérieuses donnent à Veronica le pouvoir de se venger dans ses rêves.

>> A écouter, une interview de Rupert Everett dans "Vertigo" à propos du film "She Will" :

L'acteur, écrivain et réalisateur anglais Rupert Everett. [Taylor Jewell/Invision/AP/Keystone - TAYLOR JEWELL]Taylor Jewell/Invision/AP/Keystone - TAYLOR JEWELL
Rupert Everett / Vertigo / 6 min. / le 12 août 2021

"Ida Red" de John Swab

Thriller indépendant américain délibérément démodé

Le nouveau film de John Swab, "Ida Red", tourné pendant la pandémie de coronavirus, a été présenté en première mondiale mercredi soir sur la Piazza Grande. Ce thriller, parfois sanglant, a des accents de roman noir et de western.

Le réalisateur américain John Swab, 32 ans, a choisi de tourner son troisième long métrage "Ida Red" dans sa ville natale de Tulsa, en Oklahoma.

Le film raconte l'histoire d'Ida "Red" Walker, interprétée par Melissa Leo - lauréate d'un Oscar pour "The Fighter" (2010) -, la soixantaine aux cheveux flamboyants, qui purge une peine de 25 ans de prison après un vol à main armée qui a mal tourné. Malade, elle apprend qu'il ne lui reste plus que quelques mois à vivre.

Depuis la prison, Ida Red continue de tenir les rênes du clan familial, formé de son fils Wyatt (Josh Hartnett) et son frère Dennis (Frank Grillo).

Casting remarquable

Le point fort de John Swab réside dans la sélection de ses interprètes. Frank Grillo et Melissa Leo font déjà partie du casting d'un autre film de John Swab sorti cette année, "Body Brokers".

"'Ida Red' a été entièrement écrit par John Swab. C'est le seul film d'action tourné aux Etats-Unis durant la pandémie, a indiqué le réalisateur.

Le film sortira en Suisse sous forme numérique en février 2022.

Le Locarno Kids Award, un nouveau prix pour assurer l'avenir du cinéma

"Belle", du réalisateur Mamoru Hosoda

Le Festival du film de Locarno crée un nouveau prix, le Locarno Kids Award, pour les personnalités "qui ont su attirer les plus jeunes spectateurs et spectatrices vers le cinéma". L'objectif est de donner aux enfants et aux jeunes une place de choix parmi le public du festival.

Le premier lauréat est le Japonais Mamoru Hosoda. Star de l'animation japonaise connue internationalement, sa filmographie comprend notamment "Digimon: The Movie" (2000), "La Traversée du Temps" (2006), "Summer Wars" (2009) ou encore "Mirai, ma petite soeur" (2018), qui a été nommé aux Oscars.

Suzu, l'héroïne du film "Belle", réalisé par Mamoru Hosoda. [Studio Chizu]
Suzu, l'héroïne du film "Belle", réalisé par Mamoru Hosoda. [Studio Chizu]

Son nouveau film, "Belle: Ryū to sobakasu no hime" ("Belle", 2021), produit par son propre studio Chizu, a été présenté en première suisse sur la Piazza Grande le 9 août.

L'histoire se déroule dans le monde de "U", un réseau en ligne massif avec plus de cinq milliards d'utilisateurs enregistrés. Suzu, une adolescente mal dans sa peau, s'inscrit sur le réseau social pour échapper à son mal-être. Dans ce monde virtuel, elle se transforme en "Belle", une magnifique jeune femme star de la chanson.

La plupart des films de Mamoru Hosoda sont destinés aux adultes et aux enfants, notamment parce qu'ils abordent des thématiques sérieuses, qui touchent le réalisateur lui-même.

"Belle" n'échappe pas à cette règle, en abordant les thèmes des liens familiaux et de l'identité. "Nos films sont des œuvres très réflexives, qui nous poussent à nous interroger sur nous-mêmes", explique Yuka Saito, co-présidente du studio Chizu et associée du réalisateur. "C'est une volonté très forte de Mamoru Hosoda: le film se destine autant aux enfants qu'aux adolescents qui sont en train de forger leur identité, pour leur montrer qu'ils peuvent choisir leur futur."

Une image du film "Belle", réalisé par Mamoru Hosoda. [Studio Chizu]
Une image du film "Belle", réalisé par Mamoru Hosoda. [Studio Chizu]

Présente tout au long du film, la musique est au centre du personnage de Suzu et de son alter-ego, Belle. "Au début, nous souhaitions faire une comédie musicale, mais cela n'a pas marché", explique en riant Takayuki Chiyo, superviseur de la création musicale du film. "Pour moi, une comédie musicale animée, c'est un truc à la Disney. Dans notre film, Belle chante, mais ses chansons ne racontent pas l'histoire. La différence est là."

Le résultat est varié, évoluant au fil des péripéties de Suzu: on entend de la musique classique, de l'électro et de la pop japonaise, ou J-Pop. "La B.O. est très large et reflète les deux mondes dans lesquels l'héroïne évolue: la campagne japonaise typique, et le monde virtuel U", explique Takayuki Chiyo.

>>A écouter, entretien avec Yuka Saito, co-présidente du studio Chizu, et Takayuki Chiyo, superviseur de la création musicale:

L'affiche du film "Belle" réalisé par Mamoru Hosoda. [Studio Chizu]Studio Chizu
"Belle" / Vertigo / 11 min. / le 11 août 2021

Léopard de demain: court-métrage

Premier film du Neuchâtelois Loïc Hobi

Le jeune réalisateur neuchâtelois de 24 ans, Loïc Hobi, présente "The Life Underground", son premier court-métrage, à Locarno.

Le film, tourné en noir et blanc, raconte l'histoire d'un jeune homme qui relève un défi mortel: sauter devant un métro avant qu'il ne passe dans un tunnel. "C'est inspiré de tous les bizutages, qu'ils soient tacites ou assumés, auxquels on peut faire face à 15-16 ans", précise le réalisateur.

Une scène de The Life Underground, un court métrage de Loïc Hobi. [RTS - Tell me the Stroy SA, Imaginastudio Sàrl]
Une scène de The Life Underground, un court métrage de Loïc Hobi. [RTS - Tell me the Stroy SA, Imaginastudio Sàrl]

Le film, qui se passe dans le métro, a été tourné à Lausanne et à Neuchâtel. "Nous avons tourné à l'intérieur, puis grâce à des effets spéciaux, nous avons fait circuler les trams dans un tunnel à Lausanne. Cela crée un métro un peu universel, que personne ne parvient à situer exactement".

Le métro, un lieu sans autorité parentale

Pour Loïc Hobi qui a fait ses études à Paris, tourner en Suisse lui permettait de se confronter à son adolescence, à laquelle il fait référence dans son court-métrage.

Une scène de The Life Underground, un court métrage de Loïc Hobi. [RTS - Tell me the Stroy SA, Imaginastudio Sàrl]
Une scène de The Life Underground, un court métrage de Loïc Hobi. [RTS - Tell me the Stroy SA, Imaginastudio Sàrl]

L'idée du film est née lors de ses trajets en métro parisien: "C'était l'endroit parfait pour présenter un lieu entre le lycée et la maison où les adolescents seraient sans autorité parentale, où ils se confronteraient entre eux et feraient leurs premières découvertes sentimentales." Le film interroge également les identités sexuelles.

Un casting romand

Ce court-métrage, co-produit notamment par la RTS, propose un casting romand. On y voit Léa Gigon, Arcadi Radeff, Lucas Faulong, Jérémie Nicolet et Paulin Jaccoud, tous issus de La Manufacture, la Haute école des arts de la scène ainsi que de l'école des Teintureries, toutes deux basées à Lausanne.

Pour tout savoir sur le film cliquez ici.

Rétrospective Alberto Lattuada

Une oeuvre éclectique et inclassable

Les rétrospectives ne sont jamais meilleures que lorsqu'elles honorent des cinéastes dits mineurs. Appellation souvent attribuée à ceux qui font des films sans se soucier de faire oeuvre. Parce que les "petits maîtres" sont souvent ceux qui perçoivent le mieux leur époque, sans prétention et avec le goût du public.

Alberto Lattuada est de ceux-là. D'ailleurs, il le dit lui-même:

J'ai toujours eu scrupule à adhérer "triomphalement" à mon époque. J'ai même la coquetterie de vouloir n'être compris qu'avec quelque retard, et, par conséquent, de chercher à anticiper sur certains thèmes, certaines manières.

Alberto Lattuada, cinéaste italien.

S'il n'a pas le prestige d'un Rossellini, l'univers singulier d'un Fellini, l'ambition d'un Visconti ou l'élégance méditative d'un Antonioni, Lattuada a traversé près de 50 ans de l'histoire du cinéma italien, en abordant tous les genres, avec vivacité et acuité. Le directeur du Festival de Locarno le compare un peu à un Chabrol italien. Lattuada a aussi la réputation d'être un excellent directeur d'acteurs et surtout d'actrices.

Catherine Spaak dans "Les Adolescentes" (1960) [Collection ChristopheL via AFP - Titanus - Laetitia - Marceau Coc / Collection ChristopheL via AFP]
Catherine Spaak dans "Les Adolescentes" (1960) [Collection ChristopheL via AFP - Titanus - Laetitia - Marceau Coc / Collection ChristopheL via AFP]

Après avoir participé au mouvement néoréaliste, il signe quelques comédies italiennes de référence, s'inspire de textes littéraires, empruntés notamment à la littérature russe, bifurque vers le mélo, s'aventure vers le pamphlet antimilitariste.

Mais l'Italien est aussi réputé pour sa propension à exalter la beauté de jeunes femmes libérées qui feront scandale ("Guendalina", 1957; "Les Adolescentes", 1960; "L'Imprévu", 1961; La Bambina, 1974). Une décennie plus tard, son goût pour les Lolita n'échappe pas à un certain voyeurisme ("La Fille", 1978; "La Cigala", 1980; "Une épine dans le cœur", 1986).

Ugo Tognazzi dans "Venez donc prendre le café chez nous" (1970), d'Alberto Lattuada. [MARS FILM / PHOTO12 VIA AFP - MARS FILM / PHOTO12 VIA AFP]
Ugo Tognazzi dans "Venez donc prendre le café chez nous" (1970), d'Alberto Lattuada. [MARS FILM / PHOTO12 VIA AFP - MARS FILM / PHOTO12 VIA AFP]

De quoi nourrir le débat autour du fameux "male gaze", cette façon dont la culture audiovisuelle tend à montrer les femmes du point de vue des hommes, souvent comme des objets de désir et de plaisir. Elles le sont chez Lattuada mais avec du tempérament, une réelle volonté d'émancipation et une capacité à prendre leur destin en main.

Éclectique et en perpétuel renouvellement, Lattuada a changé d'acteurs et de scénaristes presque à chacun de ses films. Sa filmographie n'en est pas moins cohérente autour de quelques thèmes récurrents: la solitude dans laquelle sombrent de nombreux personnages, le mystère de la jeunesse, la critique de la bourgeoisie bien pensante, la dénonciation de l'hypocrisie catholique, sur un mode amer ou comique, mais jamais moralisant.

Il y a un secret, chez Lattuada. Il raconte de toutes les manières possibles le pathétique tendre, amer et comique de la solitude. C'est le roi de la litote invisible, il est toujours en deçà, jamais au-delà.

Pierre Kast, cinéaste, parlant de Lattuada.

Dans les années 80, Alberto Lattuada se consacre essentiellement à la télévision, réalisant en 1985 une grande fresque, "Cristoforo Colombo", avec Gabriel Byrne dans le rôle-titre et en 1988 une mini-série intitulée "Fratelli".

Locarno propose 41 oeuvres du cinéaste, en petits et grands formats, productions télévisuelles comprises. Une partie de cette rétrospective migrera dès le 25 août et jusqu'au 14 septembre à la Cinémathèque de Lausanne.

En compétition officielle

"La place d'une autre", d' Aurélia Georges

Le pitch est irrésistible: Nélie (Lyna Khoudri) a échappé à une existence misérable en devenant infirmière auxiliaire sur le front en 1914. Un jour, elle prend lʹidentité de Rose (Maud Wyler), une jeune femme de bonne famille quʹelle a vue mourir, et se présente à sa place chez une riche veuve, Eléonore (Sabine Azéma), dont elle devient la lectrice. Le mensonge fonctionne au-delà de ses espérances, jusquʹà ce que…

>> A écouter, l'entretien avec la réalisatrice et deux de ses acteurs :

La réalisatrice française Aurélia Georges le 9 août 2021 au Festival de Locarno pour son film "La Place d'une Autre". [Keystone - Urs Flueeler]Keystone - Urs Flueeler
La place dʹune autre / Vertigo / 32 min. / le 10 août 2021

"La place d'une autre" est l'adaptation de "The New Magdalen" (1873), un roman de Wilkie Collins, auteur britannique ami de Dickens considéré comme le précurseur du roman policier et à suspense. "En lisant le livre, j'ai vu tout de suite cette image très cinématographique d'une grande maison dans laquelle on entre et on sort en permanence. Ensuite, bien sûr, on l'a adapté, mais en conservant l'armature du roman qui est fascinante pour le lecteur et aussi, je l'espère, pour le spectateur", dit la réalisatrice, Aurélia Georges.

Comme Nélie est lectrice, les livres tiennent une place importante dans le film. L'héroïne tient près d'elle, comme un viatique, le roman de Victor Hugo, "Les Misérables", un livre miroir puisque, comme Nélie, les personnages changent de statut social et de destin.

Un film qui métaphorise la lutte des classes, dans une langue gourmande et précise, en maintenant le suspense jusqu'au bout et avec délicatesse.

La productrice Gale Ann Hurd

Un Raimondo-Rezzonico pour lʹensemble de sa carrière

Petite fille, elle avait le goût pour l'horreur et était très attirée par la science-fiction. "J'aimais les histoires épiques qui mettaient en jeu le bien contre le mal, les histoires d'hommes et de femmes ordinaires plongé.e.s dans des histoires extraordinaires, des gens qui relèvent le défi et sauvent le monde", dit au micro de "Vertigo" Gale Ann Hurd.

Grande fille, elle a pu donner corps à ses goûts en devenant productrice d'"Alien", "Terminator", "Abyss", "Armageddon" et de la série "The Walking Dead".

Gale Ann Hurd a mis sur orbite James Cameron quand personne n'y croyait et a imposé Ang Lee pour le premier "Hulk" en 2003, si audacieux et original. "Je n'ai jamais travaillé avec quelqu'un d'aussi inspiré visuellement. Ang Lee était fasciné par le lichen - un élément qui, pour moi, n'avait rien à voir avec le film. Il a mis un temps fou à trouver le bon et ce lichen est devenu un motif récurrent du film, il lui a donné sa couleur. Ang Lee m'a poussé à penser au cinéma autrement".

>> A écouter, le discours très intéressant de la productrice sur le cinéma d'horreur, son anoblissement et sur celle qui lui a mis le pied dans l'étrier, Debra Hill :

La productrice américaine Gale Ann Hurd récompensée par le Prix Raimondo Rezzonico le 6 août 2021 au Festival de Locarno. [Keystone - Urs Flueeler]Keystone - Urs Flueeler
Gale Ann Hurd / Vertigo / 15 min. / le 10 août 2021

Longtemps considéré comme série B, le film d'anticipation ou d'horreur a aujourd'hui la reconnaissance des gens de la profession. "C'est '2001, l'Odyssée de l'espace' de Kubrick qui a tout changé. Ce fut un succès, et tout à coup on s'est dit que la science-fiction pouvait être un genre sérieux qui traitait de choses humaines. Il est arrivé la même chose, plus tard, avec la bande dessinée."

En compétition, "After blue (Planète sale)"

Un western post-apocalyptique joué que par des femmes

La 74 édition du festival de Locarno marque clairement les choix radicaux et audacieux de son nouveau directeur Giona A. Nazzaro. A l'image de "After blue (Paradis sale)", western post-apocalyptique complètement explosé du français Bertrand Mandico.

>> A écouter, Bertrand Mandico au 19h30 :

Le réalisateur Bertrand Mandico propose un western futuriste
Le réalisateur Bertrand Mandico propose un western futuriste / 19h30 / 1 min. / le 9 août 2021

Signe particulier, un parmi d'autres: le film n'est interprété que par des femmes - les hommes ayant été décimés par un virus étrange. "Le genre mutant me passionne", dit le réalisateur, qui a écrit tous les rôles pour des personnages masculins avant de choisir des actrices pour les jouer.

Mélange des genres, sexuel et cinématographique, son film doit autant aux classiques du cinéma, de Sergio Leone à "Dark Crystal", qu'à la BD, au collage, à l'heroic fantasy ou au théâtre.

Synopsis: Dans un futur lointain, sur une planète sauvage, Roxy, une adolescente solitaire, délivre une criminelle ensevelie sous les sables. A peine libérée, cette dernière sème la mort. Tenues pour responsables, Roxy et sa mère Zora sont bannies de leur communauté et condamnées à traquer la meurtrière.

Commence alors une chasse à la femme avec fusil Chanel et pistolet Gucci. L'humour, la poésie et l'érotisme sont au coeur de cet ovni cinématographique.

Papillons, fleurs, minéraux, acteurs, actrices, je vois de l'érotisme partout et j'assume cette érotisation de l'image.

Bertrand Mandico, réalisateur français

Celui qui a signé en 2012 le Manifeste pour un cinéma incohérent et à rebrousse-poil a tourné "After blue" sur pellicule - chose devenue très rare - et réalisé ses trucages au tournage comme le faisait le cinéma muet. "Cela donne une incarnation particulière au film et permet aux actrices de participer pleinement à la scène".

>> A écouter, l'émission spéciale Locarno avec Bertrand Mandico :

Le réalisateur français Betrand Mandico au Festival du film de Locarno le 7 août 2021. [Keystone - Urs Flueeler]Keystone - Urs Flueeler
Emission spéciale Locarno: avec Gaspard Noé et Bertrand Mandico / Vertigo / 55 min. / le 9 août 2021

"Je suis très mono tâche. Quand je tourne, je ne m'occupe que de l'aspect visuel du film, effets spéciaux et jeu des acteurs, mais pas du tout du son. Il vient après, en post-production et cela me prend beaucoup de temps. Je demande alors aux actrices d'interpréter les dialogues et cela permet d'affiner encore leur jeu", explique Bertrand Mandico au micro de "Vertigo".

Même si la planète after blue est soumise à une écologie très stricte et n'accueille que des femmes - à l'exception d'un androïde aveugle qui leur sert de sex-toy - elle n'offre pas un monde meilleur. "Dès que l'humain arrive, le monde est sali. Quoiqu'on fasse, il y aura toujours ce même problème entre dominants et dominés", dit le réalisateur.

Compétition officielle

"La rivière" de Ghassan Salhab

"La Rivière" de Ghassan Salhab clôt la trilogie sur le Liban commencée avec "La Montagne", puis "La Valléee".

En compétition pour le Léopard d’or, "La Rivière" raconte l’histoire d’un homme et d’une femme qui s’apprêtent à quitter un restaurant situé au cœur des montagnes libanaises un jour d’automne. Ils sont surpris par le bruit des avions de combat volant à basse altitude, comme si la guerre éclatait à nouveau. L’homme, alors, perd de vue la femme et se met à sa recherche, pour la retrouver enfin de l’autre côté de la montagne.

>> A écouter, l'entretien de Vertigo avec le réalisateur libanais Ghassan Salhab :

Le réalisateur libanais Ghassan Salhab au Festival du film de Locarno le 5 août 2021. [Keystone - Urs Flueeler]Keystone - Urs Flueeler
Ghassan Salhab "La rivière" / Vertigo / 14 min. / le 6 août 2021

Le couple s'engage alors dans la forêt étrange, avec une lenteur assumée jusqu'au dénouement. "J'ai tendance à ne pas prendre le spectateur par la main, dit le réalisateur, et à le considérer comme mon égal".

C'est un film énigmatique, très métaphorique, mais point symboliste selon son metteur en scène qui parle plutôt de "signes", si familiers dans la culture méditérranéenne.

En compétition

"Petite Solange", mélodrame d'Axelle Ropert

"Petite Solange" de la Française Axelle Ropert est un mélo. "Je revendique le genre. Pleurer au cinéma est une expérience magnifique" dit la réalisatrice qui avait déjà charmé le festival de Locarno en 2016 avec sa comédie romantique, "La prunelle de mes yeux".

>> A écouter, l'entretien de "Vertigo" avec la réalisatrice Axelle Ropert :

La réalisatrice française était déjà présente au Festival de Locarno en 2016 pour la présentation de son film "La Prunelle de mes yeux". [Keystone - Alexandra Wey]Keystone - Alexandra Wey
Axelle Ropert "Petite Solange" / Vertigo / 20 min. / le 6 août 2021

Mais il y a mélo et mélo. Le sien est plus proche de "L'Incompris" de Comencini, pudique et bouleversant, que d'un téléfilm sur M6. D'ailleurs le film italien est cité à travers une affiche qu'on voit plusieurs fois dans "Petite Solange", très beau portrait d'adolescente déchirée par la séparation de ses parents, incarnés par Léa Drucker et Philippe Katerine.

Un film sur deux parle de séparation conjugale mais aucun ne raconte la rupture du point de vue de l'enfant, de sa douleur, de son chagrin, de son inquiétude face à l'avenir.

Axelle Ropert, réalisatrice de "Petite Solange", en compétition à Locarno.

Le film, sans jamais être une charge contre les adultes, fonctionne sur un double registre, le deuil et le récit d'apprentissage, le terriblement cruel et le terriblement tendre, le tragique et le lumineux. Tourné en 35 mm, "avec ce grain propice aux émotions, à la vie", "Petite Solange" doit beaucoup à ses comédiens, et en particulier à la jeune Jade Springer.

>> A regarder, le sujet du 12.45 :

Locarno: "Petite Solange" un film délicat sur l’adolescence
Locarno: "Petite Solange" un film délicat sur l’adolescence / 12h45 / 1 min. / le 11 août 2021

On notera aussi que le lieu où se situe cette histoire, Nantes, était la ville de Jacques Demy, plus généralement de la Nouvelle Vague. "Petite Solange est un peu la soeur du Jean-Pierre Léaud des '400 coups'", précise la réalisatrice qui soigne particulièrement ses fins de film. Celle de "Petite Solange" est mémorable.

"Soul of a Beast", du Zurichois Lorenz Merz

L'unique film suisse en compétition internationale

Le seul film suisse en compétition internationale a été présenté vendredi. Il s'agit de "Soul of a Beast" ("L'âme d'une bête") du Zurichois Lorenz Merz, un film onirique dans l'esprit d'un Wong Kar-Wai, qui explore le désordre intérieur et la liberté.

Synopsis: Gabriel est un adolescent qui a déjà un petit garçon à charge. Quand il tombe fou amoureux de la petite amie de son meilleur ami, c’est toute sa vie qui part en vrille.

L'histoire est inspirée de l'expérience du réalisateur. À l'âge de 18 ans, en même temps qu'il devenait père, Lorenz Merz a perdu son meilleur ami dans un accident de voiture. Ces deux expériences ont fait naître en lui des sentiments contradictoires, forts et déchirants.

Tourné à Zurich, "Soul of a Beast" mélange non seulement les sentiments mais aussi les sons et les influences. Un long-métrage singulier, avec une voix off en japonais, des comédiens suisses allemands et l’actrice française Lolita Chammah, fille d’Isabelle Huppert. "Je suis dans ce film et je ne me sens ni Française, ni pas Française. Le cinéma ne devrait pas avoir de frontières. Le film de Lorenz est une ouverture sur le monde, il propose un cinéma qui n'appartient pas à son pays".

Locarno: "Soul of the Beast" long métrage suisse fort et personnel
Locarno: "Soul of the Beast" long métrage suisse fort et personnel / 12h45 / 2 min. / le 7 août 2021

Phil Tippett primé

Une légende des effets spéciaux

Avec sa longue barbe blanche et sa tenue décontractée, Phil Tippett ressemble à un vieil hippie issu de la contre-culture. Cet Américain de 69 ans est le créateur des effets visuels de "Star Wars", "Robocop", "Jurassic Park" ou encore "Starship Troopers". Il a reçu jeudi soir un "Vision Award" pour l'ensemble de sa carrière. Une carrière commencée avant le numérique, quand les effets spéciaux étaient conçus image par image comme dans le cinéma muet qui l'a toujours inspiré. "Fritz Lang a été pour moi une influence majeure".

>> A écouter, l'entretien avec Phil Tippett :

Spécialiste des effets spéciaux, lʹAméricain Phil Tippett a reçu un "Vision Award" sur la Piazza Grande lors du 74ème Festival de Locarno le 5 août 2021. [Keystone - Urs Flueeler]Keystone - Urs Flueeler
Phil Tippett / Vertigo / 10 min. / le 6 août 2021

Méfiant à l'égard des honneurs et autres hommages, Phil Tippett estime que son travail relève plus de l'artisanat que de l'art. "Je fais juste mon boulot. Je me mets derrière la mule et je laboure le terrain. Mon plus gros défi a été les changements de technologie qui dictent tout au cinéma".

Un rien désabusé sur l'avenir du cinéma. "Avec le Covid, tout le monde reste chez soi. Une aubaine pour Netflix et autres plateformes qui parlent de contenu, un mot qui ne veut rien dire et qui ne sert qu'à faire du fric".

Ses meilleurs souvenirs en tant que spécialiste des effets spéciaux?"Robocop", un travail à l'ancienne, et "Starship Trooper", entièrement digitalisé. "Ce sont les deux films qui m'ont donné le plus de plaisir car Paul Verhoeven et moi partageons une même vision du monde".

"Vortex", du réalisateur français Gaspar Noé

Regard sur la démence et la sénilité

Avec "Seul contre tous", "Irréversible", "Climax" ou "Love", il nous avait habitué au sexe, à la violence, à la provocation. Mais avec "Vortex", présenté dimanche soir, Gaspar Noé change entièrement de registre: un long métrage sur la fin de vie, où l’enfant terrible du cinéma français étonne et bouleverse.

Le réalisateur montre dans son film la lente décrépitude d’un couple âgé touché par la sénilité et la démence. Il parle de film, "non pas d'horreur, mais de terreur". C'est son premier film non interdit au moins de 18 ans, "le moins violent mais le plus dur parce qu'il parle à tout le monde", précise le réalisateur.

>> Voir le sujet du 19h30 :

La démence des personnes âgées filmée dans Vortex, le nouveau film de Gaspard Noé.
La démence des personnes âgées filmée dans Vortex, le nouveau film de Gaspard Noé. / 19h30 / 2 min. / le 8 août 2021

Mais "Vortex" reste un film Gaspar Noé dans l'audace de sa forme: écran splité à deux caméras, longs plans séquence et dialogues improvisés entre Françoise Lebrun, icône post-Nouvelle Vague, et le mythique réalisateur italien Dario Argento qui a accepté ce rôle à une condition. "Comme Dario ne se sent pas vieux, il voulait qu'on lui donne une maîtresse", explique Gaspar Noé au micro de Vertigo.

>> A écouter, l'interview de Gaspar Noé :

Le réalisateur français Betrand Mandico au Festival du film de Locarno le 7 août 2021. [Keystone - Urs Flueeler]Keystone - Urs Flueeler
Emission spéciale Locarno: avec Gaspard Noé et Bertrand Mandico / Vertigo / 55 min. / le 9 août 2021

Troisième acteur de ce film, Alex Lutz, en fils toxicomane et désemparé face au vieillissement de ses parents. "J'avais trois Rolls. Ce sont des comédiens exceptionnels et des personnes à la fois humaines et très intelligentes", poursuit le réalisateur.

Soutien au cinéma suisse

La Lex Netflix au centre de toutes les discussions

Ministre de la culture, parlementaires, réalisateurs, producteurs: une soixantaine de personnes étaient réunies vendredi soir pour parler de l'obligation pour les plateformes de streaming de réinvestir 4% de leur chiffre d’affaires dans le cinéma suisse. Une initiative appelée Lex Netflix et proposée par le Conseil fédéral.

Cette proposition divise sur le plan politique. Il y a le clivage gauche-droite, mais aussi des divergences entre les deux Chambres fédérales. Si le Conseil des Etats a approuvé la Lex Netflix, le Conseil national quant à lui propose de baisser ce taux à 1%. Cette loi, si elle était appliquée, pourrait rapporter environ 15 millions de francs par année au cinéma suisse.

>> Voir le reportage du 19h30 :

Netflix se lance dans les jeux vidéos. [Unsplash - Sayan Ghosh]Unsplash - Sayan Ghosh
Lex Netflix à l’heure de Locarno: débat entre Philippe Nantermod et Jacob Berger / Forum / 10 min. / le 7 août 2021

"Rose" de Aurélie Saada

Avec Françoise Fabian et Aure Atika

Jeudi 5 août, la vénérable Piazza Grande a accueilli en première mondiale le film "Rose" de la Française Aurélie Saada.

Dans le milieu juif tunisien à Paris, Rose (Françoise Fabian), 78 ans, vient de perdre son mari qu'elle adorait. Lorsque sa peine laisse place à une puissante pulsion de vie lui faisant réaliser qu'elle peut encore se redéfinir en tant que femme, c'est tout l'équilibre de la famille et de ses trois enfants (Aure Atika, Grégory Montel et Damien Chapelle) qui est bouleversé...

Auteure de plusieurs courts-métrages, chanteuse et membre du duo Brigitte, Aurélie Saada signe avec "Rose" son premier long-métrage. "La thématique du deuil, de la résilience et de la 'péremption des femmes' trottaient dans ma tête depuis longtemps", confie-t-elle à "Vertigo".

La réalisatrice Aurélie Saada le 5 août 2021 au Festival de Locarno. [Keystone - Urs Flueeler]
La réalisatrice Aurélie Saada le 5 août 2021 au Festival de Locarno. [Keystone - Urs Flueeler]

Son actrice principale n'est autre que le monument du cinéma français Françoise Fabian, 88 ans et plus de 70 films au compteur. "'Rose' me ressemble beaucoup. Mais dans ce film, tout était extraordinaire, j'étais stupéfaite de la maîtrise d'Aurélie Saada. Elle n'impose rien: elle nous fait des cadeaux et on lui fait des cadeaux. J'ai vécu le film comme ça", loue Françoise Fabian.

>> Aurélie Saada, Françoise Fabian et Aurélie Saada au micro de "Vertigo" à Locarno :

Françoise Fabian dans le film "Rose" d'Aurélie Saada. [Silex Films]Silex Films
Françoise Fabian, Aure Atika et Aurélie Saada: "Rose" / Vertigo / 32 min. / le 5 août 2021

>> La présentation du film dans le 19h30 vendredi :

"Rose" d'Aurélie Saada a été présenté sur la Piazza Grande en première mondiale
"Rose" d'Aurélie Saada a été présenté sur la Piazza Grande en première mondiale / 19h30 / 2 min. / le 6 août 2021

La "Lex Netflix"

Au coeur d'un dîner politique vendredi soir

La "Lex Netflix" est au centre des préoccupations du Groupe Auteurs, Réalisateurs, Producteurs (GARP), qui propose une obligation d'investissement de 4% des revenus pour les plateformes nationales et internationales de streaming numérique (Netflix, Amazon ou encore Swisscom).

Cette question est au coeur d'un dîner politique qui se tient à Locarno vendredi soir et qui réunit les acteurs de la branche et le monde politique. Pour la productrice de cinéma Aline Schmid, l'enjeu réside dans le fait de contraindre les plateformes qui diffusent du contenu sur la base d'abonnements de réinvestir une partie de leur chiffre d'affaire dans les productions de cinéma suisse. Après avoir été retoqué plusieurs fois, le projet de loi sera débattu au Conseil national en septembre.

>> A écouter, l'interview d'Aline Schmid dans "Vertigo" :

La productrice de films suisse Aline Schmid au Sundance Film Festival. [TIBRINA HOBSON / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / GETTY IMAGES VIA AFP]TIBRINA HOBSON / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / GETTY IMAGES VIA AFP
Aline Schmid: faut-il changer la loi sur le cinéma pour sauver le cinéma suisse ? / Vertigo / 10 min. / le 5 août 2021

Laetitia Casta

Primée pour l'ensemble de sa carrière

L'actrice française Laetitia Casta a reçu mercredi soir l'Excellence Award pour l'ensemble de sa carrière, une vingtaine de films, dont "Les âmes fortes" (2001) de Raúl Ruiz et "Gainsbourg (vie héroïque)" de Joann Sfar, où elle jouait le rôle de Brigitte Bardot. "Ce Léopard d'or m'émeut car il ne récompense pas un seul film mais un parcours, un cheminement, avec ses doutes et ses choix".

Un parcours réalisé sans plan de carrière, au coup de coeur, et dont elle parle dans "Vertigo" avec cette jolie métaphore: "Chaque metteur en scène, bon ou mauvais, a été une perle qui m'a été donnée pour faire mon collier".

>> A écouter, Laetitia Casta au micro de Vertigo :

French actress Laetitia Casta arrives for the screening of the film "La Croisade" at the 74th edition of the Cannes Film Festival in Cannes, southern France, on July 12, 2021. [Valery HACHE / AFP]Valery HACHE / AFP
Laetitia Casta, primée à Locarno / Vertigo / 10 min. / le 4 août 2021

Mère de quatre enfants, Laetitia Casta constate que le cinéma ne regarde plus les femmes de la même manière depuis quelques années. Et s'en réjouit. Elle cite l'exemple de "César et Rosalie" de Sautet où le personnage joué par Yves Montant demandait à Romy Schneider, la Rosalie du titre, d'aller lui chercher des bières. "Aujourd'hui, on n'oserait plus faire ce genre de scène. Pour autant, il ne faudrait pas qu'au nom de la liberté des femmes, on ne puisse plus rien dire, plus rien filmer. C'est une question d'équilibre".

Cette année, Laetitia Casta s’illustrera dans trois nouveaux films: "Lui" de Guillaume Canet, "La croisade" de son compagnon Louis Garrel et "Selon la police" de Frédéric Videau.

L'ex-muse d'Yves Saint Laurent sera par ailleurs au Théâtre du Rond-Point en janvier 2022 dans la pièce "Clara Haskil, Prélude et fugue" mise en scène par Safy Nebbou d’après le texte de Serge Kribus.

> Voir le sujet du 19h30:

À Locarno, l'actrice Laetitia Casta reçoit l'Excellence Award pour l'ensemble de sa carrière.
À Locarno, l'actrice Laetitia Casta reçoit l'Excellence Award pour l'ensemble de sa carrière. / 19h30 / 2 min. / le 4 août 2021

Alain Berset loue le charme du festival

Et parle de l'avenir du cinéma suisse

Le festival du film de Locarno danse sur un fil entre local et international, a relevé le conseiller fédéral Alain Berset lors de l'ouverture de la 74e édition mercredi soir. Les spectateurs pourront choisir parmi plus de 200 films projetés pendant dix jours.

Le charme particulier du festival du film de Locarno réside dans cette attraction au niveau international et son enracinement régional, a poursuivi Alain Berset mercredi soir à Locarno dans la cour de la Haute école spécialisée de la Suisse italienne (SUPSI).

>> Les précisions de Julie Evard en direct de Locarno :

Le Festival du film de Locarno débute aujourd'hui. Les précisions de Julie Evard
Le Festival du film de Locarno débute aujourd'hui. Les précisions de Julie Evard / 19h30 / 1 min. / le 4 août 2021

Le même Alain Berset tenait une conférence de presse jeudi en marge du festival pour évoquer la situation du cinéma suisse, suite, notamment, à l'échec de l'accord cadre avec l'Union européenne qui suscite de l'inquiétude au sein de la profession. Il a aussi parlé de la numérisation des films, de l'impact des mesures sanitaires sur l'industrie du cinéma et des différentes stratégies pour mettre en place l'égalité homme/femmes.

>> A écouter, un résumé de la conférence de presse d'Alain Berset :

Alain Berset au Festival de Locarno le 4 août 2021. [Keystone - Urs Flueeler]Keystone - Urs Flueeler
Alain Berset a donné une conférence de presse en marge du Festival de Locarno / Le 12h30 / 1 min. / le 5 août 2021

Giona A. Nazzaro, nouveau directeur artistique

"Je suis cinéphile et cinéphage"

Depuis novembre, et suite au départ de Lili Hinstin qui l'aura dirigé deux ans, le Festival de Locarno a nommé un nouveau directeur artistique, Giona A. Nazzaro.

Avant de prendre son nouveau poste, cet Italien né à Zurich était délégué général de la Semaine internationale de la Critique de la Mostra de Venise depuis 2016. Il a aussi été modérateur à Locarno, un festival qu'il connaît bien et qu'il considère comme central dans l'écosystème des festivals. "Il allie la qualité de vie, la qualité des films et la qualité de la relation avec les films. De nombreux cinéaste ont été révélés ici."

A l'image du russe Gleb Panfilov, Léopard d'Or en 1969, qui revient cette année avec "100 Minutes", l’histoire de ces milliers de soldats soviétiques tombés aux mains des nazis pendant la guerre, qui sera présenté le 13 août sur la Piazza Grande.

>> A écouter, l'interview de Giona A. Nazzaro dans la Matinale du 4 août :

Giona A. Nazzaro, directeur artistique du Festival du film de Locarno. [Keystone - Ti-Press/Davide Agosta]Keystone - Ti-Press/Davide Agosta
L'invité de La Matinale - Giona A. Nazzaro, directeur du Festival du film de Locarno / L'invité-e de La Matinale / 16 min. / le 4 août 2021

Celui qui prétend "manger mal, dormir peu et faire aucun sport", estime que c'est presqu'une chance de reprendre un festival en période de pandémie "car cela ne peut, à l'avenir, qu'être plus facile".

Journaliste de formation, diplômé en langue et littérature allemande et anglaise, Giona A. Nazzaro, 55 ans, a écrit ou dirigé plusieurs ouvrages sur des cinéastes tels que Gus Van Sant, Spike Lee et Abel Ferrara. "Cinéphile et cinéphage" comme il se définit lui-même, il met sur le même pied d'égalité cinéma populaire, expérimental, de genre et documentaire, l'important étant la qualité du film.

Face à un paysage audiovisuel en pleine transformation, et de plus en plus complexe, il faut rester ouvert, disponible, et ne plus penser en termes binaires: cinéma d'auteur contre cinéma commercial, streaming contre salles.

Giona A. Nazzaro, nouveau directeur artistique du festival de Locarno

Giona Nazzaro se souvient que sa culture cinématographique, il l'a acquise dans les salles de cinéma mais aussi par la télévision qui diffusait les films de Bergman ou Buñuel.

>> A écouter, Giona A. Nazzaro au micro de "Vertigo", développe une véritable conversation autour du cinéma :

Le directeur artistique du Locarno Film Festival, Giona A. Nazzaro. [©Locarno Film Festival / Ti-press - Alessandro Crinari]©Locarno Film Festival / Ti-press - Alessandro Crinari
Giona A. Nazzaro, un nouveau Locarno? / Vertigo / 40 min. / le 4 août 2021

Cette vision d'un paysage audiovisuel de plus en plus poreux et fluide, il l'affirme avec la projection mercredi soir de "Beckett", de Ferdinando Cito Filomarino, en avant-première mondiale avant sa diffusion le 13 août sur Netflix qui en a acheté les droits. "Netflix est un producteur et un diffuseur comme un autre, qui soutient beaucoup le cinéma d'auteur" dit Giona Nazzaro qui rappelle que le réalisateur italien de "Beckett" a été découvert à Locarno en 2010 avec son court métrage "Diarchia".

99 premières mondiales...

...en différentes sections

Le programme de cette 74e édition comprend 205 films, dont 99 premières mondiales, 8 premières suisses et 19 premiers longs métrages. Signe d'un retour à la fête du cinéma, la Piazza Grande, fermée en 2020, redevient le coeur palpitant du festival tessinois. Et c'est sur son écran géant que sera projeté en ouverture, et en avant-première mondiale, "Beckett" de Ferdinando Cito Filomarino.

Le film met en scène un touriste américain (John David Washington) en vacance en Grèce avec sa petite amie (Alicia Vikander) qui devient la cible d’une chasse à l’homme après un grave accident. Un homme lambda pris au piège d'une conspiration: un pur thriller.

>> A voir, ce portrait de John David Washington, fils de l'acteur Denzel Washington, qui tient le rôle-titre de "Beckett" :

Festival de Locarno: portrait de John David Washington, fils de Denzel et tête d'affiche du très attendu thriller "Beckett"
Festival de Locarno: portrait de John David Washington, fils de Denzel et tête d'affiche du très attendu thriller "Beckett" / 19h30 / 2 min. / le 5 août 2021

Les Suisses à Locarno

Parmi les premières mondiales, il faut citer le film de Stefan Jäger, "Monte Verità", avec les acteurs suisses Max Hubacher et Joel Basman. Ce long métrage suisse, autrichien et allemand raconte l’histoire de ces marginaux qui se sont installés sur la montagne suisse du Monte Verità au début du XXe siècle.

Côté suisse encore, le film "Soul of a Beast" de Lorenz Merz est en lice pour le Léopard d’or. Il y raconte l’histoire d’un père adolescent qui tombe amoureux de la petite amie de son meilleur ami.

La compétition comprend 17 films, dont "Zeros and Ones" d'Abel Ferrara, cinéaste phare des années 90, "Petite Solange" d'Axelle Ropert, avec Léa Drucker et Philippe Katerine, ou encore "After Blue", un récit de science-fiction du français Bertrand Mandico.

Le jury, présidé par la cinéaste Eliza Hittman, est composé de l’artiste et cinéaste Kevin Jerome Everson, du réalisateur Philippe Lacôte et des actrices Leonor Silveira et Isabella Ferrari.

En présentiel...

...mais avec restrictions sanitaires.

Après l’édition hybride de 2020, le Festival de Locarno reprend ses quartiers d’été et rouvre sa Piazza qui pourra accueillir jusqu'à 5000 personnes. Mais ce choix du tout présentiel ne va pas sans contraintes sanitaires

La réservation des places sera obligatoire pour cette édition, autant pour les abonné.es que pour les accrédité.es. Elle ne pourra être faite qu'à travers la billetterie en ligne qui a été optimisée sur le site et dans l'application.

La cabine de projection de la Piazza Grande. [RTS - Melissa Härtel]
La cabine de projection de la Piazza Grande de Locarno. [RTS - Melissa Härtel]

En ce qui concerne la Piazza Grande, le Palexpo (FEVI) et la Rotonda, ils ne seront accessibles que sur présentation du certificat Covid en combinaison avec une réservation de la place, tandis que les autres cinémas seront soumis au traçage des contacts, avec distanciation et port du masque obligatoire, toujours avec une réservation.

Hommage à John Landis

Le réalisateur des "Blues Brothers"

Le cinéaste, scénariste et acteur américain John Landis recevra un Léopard d'honneur le 13 août, avant une projection de son film "American College" (1978) sur la Piazza Grande.

>> A lire : Le réalisateur John Landis honoré au Festival de Locarno cet été

Le réalisateur américain John Landis au Festival du film de Venise le 4 septembre 2016. [AFP - TIZIANA FABI]
Le réalisateur américain John Landis au Festival du film de Venise le 4 septembre 2016. [AFP - TIZIANA FABI]

La carrière de John Landis "illustre la naissance d'un nouveau genre de comédie dans l'histoire du septième art et l'une des plus originales relectures des genres classiques de tous les temps", rappelle le festival. Elle s'étire de l'école de satire grinçante et impertinente de "National Lampoon" et "Saturday Night Live" à la consécration dans les années 1980 et 1990 avec des films cultes comme les "Blues Brothers" (1980) ou "An American Werewolf in London" (1981), dont l'atmosphère macabre a fasciné Michael Jackson au point qu'il a souhaité que John Landis réalise le clip vidéo de son fameux "Thriller" en 1983.

Une oeuvre considérée désormais comme l'une des premières vidéos musicales "cinématographiques".

>> Les précisions du 19h30 :

Le père des "Blues Brothers" et du clip "Thriller" de Mickael Jackson a reçu le Léopard d'honneur au Festival de Locarno
Le père des "Blues Brothers" et du clip "Thriller" de Mickael Jackson a reçu le Léopard d'honneur au Festival de Locarno / 19h30 / 2 min. / le 14 août 2021