Dans "Tout s'est bien passé", André Dussollier interprète peut-être l'un des rôles les plus délicats qu'il ait eu à interpréter au cours de sa carrière. Invité lundi soir dans le 19h30, l'acteur de 75 ans confie que ce "vrai rôle de composition" a constitué un défi "difficile mais excitant, car il s'agit d'un personnage haut en couleur avec une personnalité très forte".
Le film, adapté du roman autobiographique de l'autrice Emmanuèle Bernheim, raconte l'histoire d'André, 85 ans, partiellement paralysé et dépendant après un AVC, qui demande à sa fille de l'aider à mourir.
Dans ce long-métrage bouleversant mais lumineux, André Dussollier, métamorphosé et magistral, incarne ce père avec une justesse rare. Une performance d'autant plus impressionnante que, par la force des choses, l'essentiel du jeu doit passer par le regard. "Avec peu de choses, il faut faire passer l'essentiel", explique l'acteur.
"On est obligé d'y penser"
"Pour François Ozon, il fallait que je sois méconnaissable au départ, pour qu'on comprenne bien son intention d'en finir", raconte André Dussollier dans le 19h30. Toutefois, ce n'est pas un film militant, précise-t-il. "François Ozon n'a pas voulu prendre parti" sur le sujet de la fin de vie. "Mais on est obligé d'y penser", poursuit-il.
"On voit la difficulté en France de légiférer. Mais comme chaque cas est particulier, il est bien difficile de dire ce qu'on peut faire", détaille l'acteur. "Je suis allé au festival de Zurich et en écoutant des témoignages sur place de journalistes directement concernés, j'ai constaté que même en Suisse (ndlr. où le suicide assisté est légal), il y a des situations qui sont extrêmement difficiles pour les familles."
"Mais dans tous les cas, il faudrait que la personne malade puisse décider de la fin de sa vie. Et je pense que même en France, on y arrivera avec le temps", estime-t-il.
Grand écart au service du rôle
Dans ce film, qui parle de mort autant que d'amour et de vie, l'acteur originaire d'Annecy dit avoir pris plaisir à interpréter les aspects par moments odieux de son personnage.
"Au début, on me donnait beaucoup de rôles sages. Mais j'aime bien jouer des choses extravagantes où on fait le grand écart, ça permet toujours de privilégier l'histoire, le rôle. On est là au service d'un rôle, et c'est cela qui est excitant dans la vie d'acteur", explique-t-il.
>> L'acteur André Dussollier interviewé par Julie Evard en marge du Festival du film de Zurich:
Propos recueillis par Philippe Revaz
Texte web: Pierrik Jordan