Halloween: généalogie d’une saga immortelle

Grand Format Cinéma

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Introduction

Depuis 1978, et sa première apparition dans le classique de John Carpenter, le tueur psychopathe Michael Myers n’a cessé de semer la terreur dans onze films, dont un sans sa présence. Comme il apparaît presque toujours masqué, plusieurs acteurs, et même quelques cascadeurs, ont tenu le rôle en toute discrétion. En marge de la sortie de "Halloween Kills", retour sur une des plus angoissantes figures du mal sur grand écran. Et pour vous repérer, à la fin de ce grand format, chacun des épisodes de la saga est évalué de 1 à 10.

Chapitre 1
Le Mal absolu, indestructible

Copyright Splendor Films

Haddonfield, Illinois, 1963. Le soir d’Halloween, le jeune Michael Myers, huit ans, assassine sa sœur Judith à l’aide d’un couteau de cuisine XXL. Interné dans un asile psychiatrique sous la supervision du Dr Loomis (Donald Pleasance), le tueur mutique s’échappe quinze ans plus tard et revient sur les lieux de son premier crime.

Caché derrière un masque blanc, il arpente les rues de Haddonfield, guettant ses futures victimes: trois baby-sitters parmi lesquelles Laurie Strode (Jamie Lee Curtis), seule survivante du futur massacre.

>> A écouter, l'émission "Travelling" raconte les coulisses du film de John Carpenter :

Scène du film "Halloween", réalisé par John Carpenter en 1978. [AFP - Collection Cinema / Photo12]AFP - Collection Cinema / Photo12
Travelling - Publié le 29 juillet 2021

Initialement intitulé "The Baby-Sitters Murders", "Halloween" de John Carpenter, sorti en 1978, devient un classique instantané et impose l’une des figures les plus iconiques du cinéma d’horreur. Un tueur froid, évidé de toute humanité, sorte de croquemitaine issu d’un conte cruel, incarnation d’un pur concept, le Mal absolu porté par une unique certitude: aucune balle ni mauvaises suites ne parviendront à tuer Michael Myers.

Chapitre 2
Une histoire de famille

Allociné

Devant le succès commercial historique de ce premier volet (75 millions de dollars de recettes pour un budget de 300'000 dollars), John Carpenter et sa productrice Debra Hill acceptent de cosigner le scénario d’un second épisode.

Suite directe et plus basique, "Halloween 2" emmène Laurie Strode dans un hôpital où vient sévir Michael Myers. Avec une idée inédite: Laurie est l’autre sœur de Myers, adoptée après la mort accidentelle de ses parents. Une filiation controversée puisqu’elle transforme Michael Myers en un tueur mu par un souci de vengeance familiale, alors que ses actes inexplicables, sans motivations particulières, le rendaient d’autant plus terrifiant dans le premier film.

Une piste familiale qui va déterminer la direction de la franchise "Halloween" jusqu’en 2009, avec une première vague de suites qui frôle la catastrophe artistique. On écartera la très belle anomalie proposée par "Halloween 3" (1983), qui, dans le but d’initier une anthologie de films d’horreur tournant autour du folklore d’Halloween, exclut Michael Myers, Laurie Strode et le Dr Loomis pour se concentrer sur un savant fou fasciné par la sorcellerie et les mythes celtiques.

Il faudra attendre "Halloween 4" (1988) pour assister aux retours de Michael Myers et du Dr Loomis. L’actrice Jamie Lee Curtis ne souhaitant plus jouer dans des films d’horreur, Laurie Strode est tenue pour morte et c’est sa fille de huit ans, la petite Jamie Lloyd, que vise maintenant Michael Myers. A l’issue de ce quatrième épisode, Myers s’effondre, criblé de balles, dans le puits d’une mine alors que Jamie, comme possédée par les instincts assassins de son oncle, poignarde sa mère adoptive.

Un an après, dans "Halloween 5" (1989), Michael Myers s’enfuit de la mine. Muette, Jamie est soignée dans un service psychiatrique et communique par télépathie avec son oncle. Mis en image par le Suisse Dominique Othenin-Girard, le film marque le déclin de la franchise qu’achève "Halloween 6", (1995), dernière apparition de Donald Pleasance en Dr. Loomis. Un volet grotesque où une secte retient en otage Michael Myers ainsi que sa nièce, Jamie, qui vient d’avoir en bébé de ce dernier par fécondation in vitro. Jamie finit par être tuée par son oncle et Myers trucide des scientifiques qui cherchent à exploiter sa nature maléfique. A ce stade d’inanité, la franchise "Halloween" demandait un sacré électrochoc pour ne pas sombrer dans l’oubli. D’autant plus que la société d’Harvey Weinstein, Miramax, qui a racheté les droits de la franchise, n’allait pas rester sur un tel échec.

Chapitre 3
Harvey Weinstein sauve Michael Myers

Allociné

Alors que la vague de néo-slashers cartonne au milieu des années 1990, avec "Scream" et autres "Souviens-toi l’été dernier", l’idée de fêter dignement le vingtième anniversaire de la franchise "Halloween" s’impose avec un septième volet qui va faire table rase des précédents égarements.

Si John Carpenter refuse de rempiler au poste de réalisateur de l’excellent "Halloween: 20 ans après" (1998), Jamie Lee Curtis accepte de réendosser son personnage de Laurie Strode, enseignante dans un lycée privé sous le nom de Keri Tate. Sa fille, Jamie, est effacée de la généalogie de la saga, remplacée par un fils, John, écrasé par l’obsession sécuritaire de sa mère. L’héroïne se révèle passionnante dans sa manière de vouloir sortir de son rôle de victime pour affronter l’objet de ses peurs et finit par décapiter Michael Myers.

Mais voilà! Dans "Halloween: Resurrection" (2002), Laurie Strode est internée dans asile psychiatrique après avoir découvert qu’elle a décapité - c’est ballot - un innocent. Myers la tue au début du film, puis massacre les participants d’une émission de télé-réalité organisée dans sa maison familiale à Haddonfield. Brûlé et électrocuté, Michael Myers ouvre les yeux à la morgue, promettant de futures suites.

C'est alors que le producteur historique des "Halloween", Moustapha Akkad, meurt avec sa fille dans un attentat en Jordanie, marquant une pause temporaire dans la saga.

Chapitre 4
Deux remake signés Rob Zombie

COLLECTION CHRISTOPHEL VIA AFP - DIMENSION FILMS / NIGHTFALL PROD

Héritant de la franchise initiée par son père décédé, Malek Akkad contacte le cinéaste et rocker Rob Zombie ("The Devil’s Rejects") pour un sérieux retour aux sources. L’idée est de mettre en chantier un remake du premier "Halloween", mais porté par une vision singulière.

Dure, brutale, réaliste et poisseuse, la version "white trash" de Rob Zombie tranche avec ses prédécesseurs en adoptant le point de vue du tueur psychopathe, davantage humanisé, tout en ramenant le Dr Loomis (Malcolm McDowell) et Laurie Strode (Scout Taylor-Compton), à nouveau posée comme sa sœur.

Rob Zombie complète sa démarche avec un "Halloween II" (2009) grandiose qui se focalise sur la relation entre Michael Myers et le fantôme de sa mère, apparaissant dans des visions surréalistes stupéfiantes. Et ce ne sont pas une balle en plein visage ou deux balles dans le buffet qui arrêteront le tueur, même s’il devra attendre près d’une décennie pour revenir à l’écran.

Chapitre 5
Une trilogie qui met les compteurs à zéro

Copyright Ryan Green/Universal Pictures

Alors que les frères Weinstein peinent à lancer un nouveau "Halloween", hésitant entre suites et reboot, l’arrivée du roi de l’horreur, le producteur Jason Blum ("Paranormal Activity", "Get Out", "Insidious", "Sinister"), accélère les choses. Le cinéaste David Gordon Green opère un nouveau retour aux sources, ignore toutes les suites et imagine un récit qui se situe 40 ans après les événements du classique de John Carpenter.

Echappé de l’asile dans lequel il est interné, Michael Myers, 61 ans, est instrumentalisé par son nouveau psychiatre qui cherche, par tous les moyens, à le confronter à Laurie Strode. Interprétée par Jamie Lee Curtis, Laurie n’est plus la sœur de Myers, mais une survivante qui se prépare à affronter le tueur, rejointe par sa fille, Karen, et sa petite-fille, Allyson.

Quelque peu hésitant entre une vision inédite et un respect trop marqué à l’égard du chef-d’œuvre de Carpenter, ce nouvel "Halloween" divise, mais développe un traitement post-MeToo loin d’être inintéressant.

Sa suite directe, toujours de David Gordon Green, "Halloween Kills", part davantage dans le n’importe quoi scénaristique et esthétique, même s’il annonce une dimension tragique qui devrait en toute logique marquer, dans l’ultime chapitre de cette trilogie, "Halloween Ends", le décès de Laurie Strode.

Car si Michael Myers échappe à la mort depuis plus de 40 ans, personne ne peut échapper au croquemitaine.

Chapitre 6
Halloween en chiffres et en notes

DR

- 1977: "Halloween – La nuit des masques" de John Carpenter. Budget: 300’000 dollars. Recettes monde: 75 millions de dollars. Qualité du film: 10/10

- 1981: "Halloween 2" de Rick Rosenthal. Budget: 2,5 millions de dollars. Recettes monde: 25,5 millions de dollars. Qualité du film: 6/10

- 1983: "Halloween 3 – Le sang du sorcier" de Tommy Lee Wallace. Budget: 2,5 millions de dollars. Recettes monde: 14,4 millions de dollars. Qualité du film: 7/10

- 1988: "Halloween 4 – Le retour de Michael Myers" de Dwight H. Little. Budget: 5 millions de dollars. Recettes monde: 17,7 millions de dollars. Qualité du film: 6/10

- 1989: "Halloween 5 – La revanche de Michael Myers" de Dominique Othenin-Girard. Budget: 3 millions de dollars. Recettes monde: 11,6 millions de dollars. Qualité du film: 2/10

- 1995: "Halloween 6" de Joe Chappelle. Budget: 5 millions de dollars. Recettes monde: 15,1 millions de dollars. Qualité du film: 2/10

- 1998: "Halloween, 20 ans après" de Steve Miner. Budget: 17 millions de dollars. Recettes monde: 75 millions de dollars. Qualité du film: 8/10

- 2002: "Halloween: Resurrection" de Rick Rosenthal. Budget: 15 millions de dollars. Recettes monde: 37,6 millions de dollars. Qualité du film: 3/10

- 2007: "Halloween" de Rob Zombie. Budget: 15 millions de dollars. Recettes monde: 80 millions de dollars. Qualité du film: 5/10

- 2009: "Halloween 2" de Rob Zombie. Budget: 15 millions de dollars. Recettes monde: 80 millions de dollars. Qualité du film: 9/10

- 2018: "Halloween" de David Gordon Green. Budget: 10 millions de dollars. Recettes monde: 255,6 millions de dollars. Qualité du film: 7/10

- 2021: "Halloween Kills" de David Gordon Green. Budget: 20 millions de dolllars. Recettes monde: en cours d’exploitation. Qualité du film: 3/10

- 2022: "Halloween Ends" de David Gordon Green. Budget: inconnu. Recettes monde: inconnu