Ruben Östlund reçoit la Palme d'Or du Festival de Cannes pour "Sans filtre"
>> La prestigieuse Palme d'Or du Festival de Cannes a été attribuée samedi au Suédois Ruben Östlund pour son film "Sans filtre" ("Triangle of sadness"). L'actrice iranienne Zar Amir Ebrahimi et le Sud-Coréen Song Kang-ho ont reçu les prix d'interprétation féminine et masculine.
>> Le Grand Prix, deuxième distinction la plus prestigieuse, a été remis ex-aequo à la Française Claire Denis pour "Stars at noon" et au Belge Lukas Dhont, le benjamin de la compétition, pour "Close".
>> Le président du jury Vincent Lindon qui embrasse sur la bouche Carole Bouquet ou encore le réalisateur polonais Jerzy Skolimowski qui remercie les ânes de son film: la cérémonie de clôture du 75e Festival de Cannes a donné lieu à des séquences inattendues.
>> Après deux années marquées par la pandémie, cette 75e édition, qui se tenait du 17 au 28 mai, a été intense. Beaucoup de grands noms ont présenté des films en compétition ou non: Tom Cruise dans le nouveau "Top Gun", Idriss Elba et Tilda Swinton chez George Miller, Léa Seydoux et Viggo Mortensen chez David Cronenberg, Austin Butler incarnant le "King" dans un biopic d'Elvis signé Baz Luhrman.
>> Le jury était présidé par l'acteur français Vincent Lindon. Il était entouré de Rebecca Hall, Noomi Rapace, Jasmine Trinca, Deepika Padukone, Asghar Farhadi, Ladj Ly, Jeff Nichols et Joachim Trier. Quant à l'acteur Forest Whitaker, prix d'interprétation en 1988 pour son incarnation du jazzman Charlie Parker dans "Bird" de Clint Eastwood, il a reçu une Palme d'or d'honneur. Ils ont dû choisir leur palmarès parmi 21 films en compétition.
Retrouvez ici toute l'actualité du festival, y compris la critique par Rafael Wolf de tous les films en compétition pour la Palme d'or.
Un suivi assuré par RTS Culture avec RTS Info
Une Palme d'Or suédoise
Ruben Östlund récompensé
Le Suédois Ruben Östlund a eu l'honneur de recevoir samedi soir une deuxième Palme d'Or pour son film "Sans filtre" ("Triangle of sadness"), une satire acide des ultra-riches et des rapports de classes dans les sociétés occidentales.
"Tout le jury a été extrêmement choqué par ce film", a annoncé Vincent Lindon, le président du jury.
Le metteur en scène nordique remporte ainsi pour la deuxième fois la sélection du festival après "The Square" en 2017. "C'est un peu comme si on était à la maison", a plaisanté le Suédois en montant les marches, avec une de ses actrices, la Philippine Dolly De Leon.
"Lorsque nous avons commencé ce film, nous n'avions qu'un but: essayer de faire un film qui intéresse le public et qui le fasse réfléchir avec provocation", a aussi déclaré le Suédois, en recevant son prix.
Dans son film, Ruben Östlund livre une critique sans concession du capitalisme et de ses excès. Elevé par une mère communiste, se définissant lui-même comme "socialiste", le Suédois n'a pas cédé à la facilité de "décrire les riches comme méchants" mais plutôt à "comprendre leurs comportements".
"Sans filtre" suit l'aventure de Yaya et Carl, un couple de mannequins et influenceurs en vacances sur une croisière de luxe. Un voyage qui tourne à la catastrophe.
Dans une sorte de "Titanic" inversé, où les plus faibles ne sont pas forcément les perdants, il décortique les ressorts de classes de fond en comble: les riches contre les pauvres, mais aussi les hommes contre les femmes, et les Blancs contre les Noirs.
Ruben Östlund avait connu la célébrité internationale avec "Snow Therapy" (2014), dézinguant la famille moderne avec un père fuyant une avalanche, son téléphone portable à la main, mais laissant ses enfants face au danger.
Le film avait remporté le prix du Jury 2014 dans la catégorie Un Certain regard, à Cannes. Cette tragicomédie avait aussi ouvert au Suédois les portes de l'industrie cinématographique américaine.
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Grand Prix ex-aequo
Lukas Dhont et Claire Denis
Le Grand Prix, deuxième distinction la plus prestigieuse, a été remise ex-aequo.
Tout d'abord au Belge Lukas Dhont, benjamin de la compétition, pour son deuxième film "Close". Le jeune cinéaste, déjà lauréat d'une Caméra d'or en 2018 pour son premier film "Girl" sur la transidentité, s'attaque avec sensibilité aux questions d'identité et au poids de la masculinité et révèle un acteur, Eden Dambrine, 15 ans, monté sur scène à ses côtés.
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La réalisatrice française Claire Denis reçoit également un Grand Prix pour son film "Stars at noon".
Ce film raconte l'histoire d'une jeune journaliste américaine en détresse bloquée sans passeport dans le Nicaragua d’aujourd’hui en pleine période électorale.
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Les autres principaux prix
Un Prix spécial 75e anniversaire
L'Asie a fait main basse sur les prix d'interprétation féminine et masculine du 75e Festival de Cannes. Le jury a consacré samedi la star sud-coréenne Song Kang-ho et l'actrice iranienne Zar Amir Ebrahimi.
Zar Amir Ebrahimi, qui a dû quitter l'Iran pour la France en 2008 à la suite d'un scandale sexuel, a été couronnée samedi du prix d'interprétation féminine pour son rôle dans le thriller d'Ali Abbasi "Les nuits de Mashhad".
L'actrice s'est exprimée d'abord en farsi en recevant son prix. "Ce soir j'ai le sentiment d'avoir eu un parcours très long avant d'arriver ici sur cette scène (...) un parcours marqué par des humiliations", a-t-elle dit, remerciant la France de l'avoir accueillie.
Le prix d'interprétation masculine est allé au sud-coréen Song Kang-ho, 55 ans, pour son rôle dans "Les bonnes étoiles" du Japonais Hirokazu Kore-Eda.
Acteur fétiche de son compatriote Bong Joon-ho, et star de son film "Parasite", Palme d'Or 2019, il joue dans ce film de Kore-eda un homme impliqué dans un trafic de bébés, qui va former une petite famille de bric et de broc autour de lui. "Je suis très heureux pour toute ma famille", a-t-il sobrement déclaré en recevant son prix à Cannes.
La Belgique est l'une des gagnantes du Festival: outre Lukas Dhont, les frères Dardenne, chantres du cinéma social, ont reçu un Prix spécial de cette 75 édition-anniversaire, pour "Tori et Lokita", drame social sur de jeunes exilés, et le couple flamand Charlotte Vandermeersch et Felix van Groeningen ("Les Huit Montagnes") reçoit le prix du Jury, ex-aequo avec l'ovni de la compétition, "EO" ("Hi Han"), manifeste animaliste sur un âne, réalisé par une figure du cinéma polonais, Jerzy Skolimowski.
Le palmarès complet
La Belgique et l'Asie à l'honneur
- Palme d'Or: "Sans filtre" de Ruben Östlund
- Grand Prix: remporté ex-aequo par "Close" de Lukas Dhont et "Stars at noon" de Claire Denis
- Prix de la mise en scène: "Decision to leave" de Park Chan-wook
- Prix du scénario: "Boy from heaven" de Tarik Saleh
- Prix du Jury: remporté ex-aequo par "Hi-Han" de Jerzy Skolimowski et "Les Huit Montagnes" de Charlotte Vandermeersch et Felix van Groeningen.
- Prix du 75e Festival: "Tori et Lokita" de Jean-Pierre et Luc Dardenne
- Prix d'interprétation féminine: Zar Amir Ebrahimi pour son rôle dans "Les nuits de Mashhad", de Ali Abbasi.
- Prix d'interprétation masculine: Song Kang-Ho pour son rôle dans "Les bonnes étoiles" de Hirokazu Kore-Eda.
- Caméra d'Or: "War Pony" de Riley Keough et Gina Gammell
- Palme d'Or du court métrage: "The water murmurs" de Jianying Chen
- Palmes d'Or d'honneur: Tom Cruise et Forest Whitaker
L'avis du critique de la RTS Rafael Wolf:
"Autant j’ai adoré 'Titane', le film de Julia Ducourneau (Palme d'or en 2021 ndlr), autant ce 'Sans filtre' m’a paru d’une lourdeur pachydermique. Une farce d’une arrogance ronflante autour de la lutte des classes où des très riches embarquent pour une croisière de luxe, jusqu’à une scène cataclysmique débordant de vomi et de diarrhée. Puis une femme de ménage prend sa revanche sur les nantis.
Certains ont trouvé ça hilarant, d’autres consternant. Je fais plutôt partie de la seconde catégorie."
Cérémonie de clôture
Des baisers et des ânes
Le président du jury Vincent Lindon qui embrasse sur la bouche Carole Bouquet ou encore le réalisateur polonais Jerzy Skolimowski qui remercie les ânes de son film: la cérémonie de clôture du 75e Festival de Cannes, qui s'est tenue samedi soir, a donné lieu à des séquences inattendues.
La maîtresse de cérémonie Virginie Efira a donné le ton d'une cérémonie où l'humour a trouvé sa place entre les moments d'émotions. Le 75e Festival de Cannes tirant à sa fin, la comédienne a dit dans son discours qu'il faudrait maintenant "rendre les bijoux et les faux cils". "Dès demain, les gens âgés à Cannes auront vraiment l'air de gens âgés", a-t-elle conclu, sous les rires du public, allusion au défilé d'acteurs ou actrices parfois sans âge sur le tapis rouge pendant la quinzaine.
"Je pensais que c'était mon jury, mais non, j'avais une voix, c'est ça la démocratie", a commencé Vincent Lindon, président français du jury, au moment de son discours inaugural de la cérémonie de clôture. Le comédien a ensuite filé la métaphore politique en soulignant avec humour qu'être "président, une seule fois, pendant dix jours", c'était trop court. Et de demander à Thierry Frémaux, directeur général du festival, à "l'unanimité du jury", que ce dernier soit reconduit. "Four more years !" ("Quatre ans de plus !") a-t-il scandé pour le renouvellement de sa présidence, sous les rires du public.
L'actrice française Carole Bouquet est intervenue sur scène pour remettre un prix spécial, celui de la 75e édition. Elle a profité de l'occasion pour réclamer un baiser du président Vincent Lindon. "Je me sens toute seule Vincent, tu ne veux pas venir m’embrasser? Après ce qu’il s’est passé… c’était très émouvant, le baiser", a lancé la comédienne, faisant référence au baiser passionné échangé par Felix Van Groeningen et Charlotte Vandermeersch juste avant.
Vincent Lindon s'est alors levé et l'a embrassé sur la bouche. Comme un vrai baiser de cinéma.
Un discours de remerciement surréaliste
Le prix du jury attribué à "EO (Hi-Han)" de Jerzy Skolimowski (ex-aequo avec "Les Huit Montagnes" de Charlotte Vandermeersch et Felix van Groeningen) a donné lieu au discours de remerciement le plus surréaliste. A l'image de ce film iconoclaste qui raconte l'errance d'un âne en proie à la folie des hommes, osant faire de l'animal le personnage principal d'un film. "Je veux remercier mes ânes..." a lancé en anglais le cinéaste polonais, qui a donc salué, en les nommant, les six animaux qui se sont relayés en fonction des scènes pour incarner le personnage principal.
En recevant leur prix de la 75e édition pour "Tori et Lokita", les frères Jean-Pierre et Luc Dardenne, déjà auréolés de deux Palmes d'or, ont fait honneur à leur réputation de cinéastes humanistes et engagés socialement. "Quand on préparait notre film en janvier 2020, il y a un boulanger de Besançon qui a fait une grève de la faim pendant 12 jours pour qu'on n'expulse pas de France son apprenti qui était africain de Guinée et ça c'était formidable et notre film nous le dédions à ce Monsieur, à Monsieur (Stéphane) Ravacley de Besançon".
"Le cinéma est l'expression du réalisateur, le cinéma c'est le réalisateur (...) longue vie au réalisateur", a commencé, d'un ton lunaire, le cinéaste Nicolas Winding Refn ("Drive"), invité à remettre le Prix de la mise en scène, en lisant son discours écrit sur son téléphone. Le choix du jury, le Sud-Coréen Park Chan-wook, récompensé pour "Decision to leave", lui a plu. "C'est vraiment cool", a dit au micro Nicolas Winding Refn.
La critique des 21 films en compétition
Par notre envoyé spécial Rafael Wolf
"Les huit montagnes" de Charlotte Vandermeersch et Felix Van Groeningen
Note: 3/5
1984. Pietro, onze ans, quitte Turin le temps d’un été dans un village perdu du Val d’Aoste. Sur place, il se lie d’amitié avec Bruno, un enfant ancré dans les montagnes. Les années passent. Les amis grandissent, se perdent de vue. Bruno reste accroché à ses alpages, refusant de les quitter, alors que Pietro entame une longue quête existentielle qui le pousse à découvrir le monde et à décrire, en tant qu’écrivain, son cheminement. Ils restent malgré tout reliés, pendant près de vingt ans, par une maison qu’ils ont construite ensemble dans la montagne.
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Adaptant le roman de Paolo Cognetti, le cinéaste flamand Félix von Groeningen ("Alabama Monroe", "Belgica") coréalise avec son épouse, la comédienne Charlotte Vandermeersch, cette histoire d’amitié virile qui paraît débuter comme une version transalpine de Marcel Pagnol.
Si la beauté des images, en écran carré, captant la magnificence de la nature sans jamais tomber dans l’imagerie de carte postale, subjugue le regard, on ne peut en dire autant de la dramaturgie du film qui oppose, de façon plutôt binaire, le nomade et le sédentaire, le monde et le repli, l’urbain et l’indompté.
En soulignant constamment son propos par des phrases sentencieuses (quelle mauvaise idée de reprendre les pensées de Pietro en voix off) et des symboles clignotants (la crevasse, l’ascension), "Les huit montagnes" réduit son duo de faux frères à des figures qui n’échappent pour ainsi dire jamais au programme thématique qui leur a été assigné.
"La femme de Tchaïkovski" de Kirill Serebrennikov
Note: 4/5
D’emblée, le nouveau film de Kirill Serebrennikov, auteur des géniaux "Leto" et "La fièvre de Petrov" se profile comme une œuvre funeste marquée par le sceau de la mort et de la folie. Nous sommes en 1893, à Saint-Pétersbourg. Antonina s’approche de la dépouille de son époux, le compositeur Piotr Tchaïkovski, qu’elle n’a pas revu depuis des années. Celui-ci se relève, le temps de lui hurler la haine qu’il lui porte, avant de se recoucher et de retourner à la mort.
Comme son titre l’indique, "La femme de Tchaïkovski" ne sera pas un biopic du musicien, encore moins un film en costumes compassé, mais bien le portrait d’une jeune Russe qui portera un amour aveugle, fou, et à sens unique, au génie artistique.
De leur première rencontre, leur mariage, puis un divorce que refusera jusqu’au bout Antonina, le film s’attache à montrer une relation basée, dès ses origines, sur un mensonge mortifère et cruel. L’homosexualité cachée de Tchaïkovski, son dégoût viscéral au moindre contact physique avec son épouse, pousse cette femme vers une folie qui guette constamment, incarnée par le bourdonnement d’une mouche omniprésente durant tout le film.
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Reste qu’au-delà de l’ampleur cinématographique du film et de la modernité de sa mise en scène, tout de même moins baroque que les précédentes œuvres de Serebrennikov, on peine à comprendre le véritable point de vue du cinéaste sur cette union insensée qui s’étire un peu trop en longueur.
Derrière cette femme éperdument amoureuse, que la société de l’époque rendra invisible en dehors de son mari et qui mourra dans un asile juste avant la Révolution de 1917, on peut tout au plus deviner une allégorie féministe d’un pays tout entier, aveuglé par le charisme de ses figures les plus destructrices.
"Eo" de Jerzy Skolimowsky
Note: 5/5
Après un ultime numéro de cirque qui ouvre le film de manière magistrale, Kasandra doit laisser partir son âne, Eo (soit hi-han), à cause de militants œuvrant pour la cause animale. La bête de somme traverse dès lors toute une série de péripéties et de rencontres plus ou moins fortunées et pose son regard sur le monde violent et absurde des êtres humains.
Une bande de supporters de foot surexcités qui se mettent à frapper comme des dératés le pauvre âne. Un type électrocutant des rongeurs pour récupérer leur fourrure qui finit assommé par un Eo vengeur. Une comtesse étrange (Isabelle Huppert) perdue dans une demeure surannée en Italie. Ou encore une errance nocturne, digne de "La nuit du chasseur", dans une forêt sortie d’un conte des frères Grimm.
"Eo" du cinéaste polonais Jerzy Skolimowski ("Deep End", "Le départ") vous retourne l’esprit, vous triture les émotions et vous chamboule les rétines. Sur les traces de « Au hasard Balthazar », chef-d’œuvre de Robert Bresson lui aussi attaché au point de vue d’un âne, le résultat s’affirme comme une fable picaresque d’une beauté plastique proprement hallucinante, tourbillon cinématographique qui parvient à rendre palpable la sensation d’un animal sans passer par le piège de l’anthropomorphisme.
Collant au plus près du souffle, de la tête, de la peau de son âne, filmé pour ainsi dire comme une créature mythologique dont le cinéaste révèle même les rêves et les souvenirs, "Eo" est une expérience unique, un trip vertigineux et antispéciste qui finit par composer un hymne bouleversant à la nature et au règne animal. Notre seconde grosse claque cannoise.
"Boy From Heaven" de Tarik Saleh
Note: 4/5
Fils de pêcheur, le jeune Adam est accepté à la plus grande université islamique du monde, Al-Azhar, au Caire. Sur place, le candide étudiant découvre un monde où l’hypocrisie rivalise avec la soif de pouvoir. Et quand le Grand Imam meurt, Adam se retrouve instrumentalisé par un officier des services secrets qui en fait sa taupe afin d’influer sur l’élection du prochain Grand Imam, que le gouvernement veut proche du président al-Sissi au détriment d’un candidat radical du côté des frères musulmans.
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Déjà auteur du formidable "Le Caire confidentiel", le cinéaste Tarik Saleh rempile dans la charge au vitriol contre la corruption et les manipulations politico-religieuses d’un pays entier dans un récit captivant flirtant avec le thriller. Coproduction suédo-égyptienne, "Boy from heaven" nous immerge au cœur des enjeux de pouvoirs où s’opposent une vision extrémiste de l’islam et une autre bien plus humaniste. Si le relatif classicisme et le caractère un peu trop démonstratif de l’histoire empêche le résultat de toucher au génial, on ne peut qu’être admiratif devant la complexité du portrait que Tarik Saleh dresse de l’Egypte moderne et le trajet douloureux, comme la perte d’innocence, que son héros malheureux va devoir traverser.
"Frère et soeur" d'Arnaud Desplechin
Note: 4/5
Alice (Marion Cotillard) est une grande comédienne de théâtre. Son frère Louis (Melvil Poupaud) est un ancien prof devenu écrivain. Une haine profonde et réciproque les sépare depuis des années, mais au moment où leurs parents se retrouvent à l’hôpital après un violent accident, le frère et sa sœur vont être contraint de se confronter.
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Après un double préambule d’une violence saisissante – un clash pendant l’enterrement du fils de Louis, suivi d’un accident de la route spectaculaire – "Frère et sœur" creuse avec une cruauté frémissante cette jalousie, cette rancœur, cette haine qui a tout recouvert et dont on ne sait plus très bien si elle renvoie à autre chose qu’une absurde et incertaine origine.
Comme souvent chez Arnaud Desplechin, la question de la réalité de nos vies et des fictions avec lesquelles on les sculpte est au cœur de ce film de crise, familial, intime, qui pourra paraître hermétique en raison de son caractère très littéraire et la distance que l’on peut avoir à l’égard de ces deux personnages peu sympathiques, ou, et c’est notre cas, magnifique par son ampleur romanesque et sa profondeur humaine.
"Triangle of sadness" de Ruben Ostlund
Note: 2/5
Deux mannequins et influenceurs, Carl et Yaya, se déchirent autour d’une question d’argent et de note de restaurant. Ils se retrouvent à bord d’un yacht, près de la Grèce, pour une croisière de luxe où ils rencontrent de très riches vacanciers, un couple d’Anglais qui ont fait fortune dans la vente d’armes, notamment de grenades, une femme de ménage bientôt prête à prendre sa revanche sur ses patrons et un capitaine marxiste qui se calfeutre dans sa cabine, guidé par la boisson et la haine de ses passagers.
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Après "Snow Therapy", et sa Palme d’or avec "The Square", le suédois Ruben Oslund revient avec une satire cynique sur les classes et le concept d’égalité. Mais si l’on avait pu apprécier la gêne profonde que pouvaient provoquer ses précédents films, on se retrouve ici avec une démonstration pachydermique qui ne suscite qu’un ricanement confortable. Avec la scène de vomi et de diarrhée cataclysmique qui dérègle la bienséance à bord du yacht, puis un dernier acte qui renverse les rapports de classes en faisant d’une prolétaire la cheffe, pas moins exploitante, d’une nouvelle société soi-disant plus égalitaire, l’arrogance ronflante de Ruben Ostland lamine tout sur son passage et ne laisse qu’un pathétique étalage de lieux communs exposés comme une grande réflexion sur les inégalités de notre monde moderne. C’est raté!
"R.M.N." de Christian Mungiu
Note: 4/5
Employé dans un abattoir allemand, Matthias revient, peu avant Noël, dans son village natal, multiethnique, de Transylvanie. Il s’installe chez son épouse, tout en lorgnant du côté d’une ex-petite amie, Csilla. Et son fils Rudi reste traumatisé par quelque chose qu’il a vu dans la forêt près de leur maison. Par ailleurs, quand l’usine que dirige Csilla recrute plusieurs employés étrangers, notamment pour pouvoir obtenir des subsides européens, l’équilibre fragile qui unit la communauté vole en éclat.
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Inspiré d’évènements qui se sont déroulés en Roumanie au début de 2020, "R.M.N." mélange la fable au portrait social avec un regard d’une justesse et d’une profondeur admirables. Que ce soient les relations entre hommes et femmes, notamment avec la paternité viriliste et la brutalité animale de Matthias, ou le racisme quotidien, qui s’exprime de manière ahurissant lors d’un conseil municipal, filmé en un plan-séquence d’une vingtaine de minutes, où les digues de la raison s’effondrent face aux instincts xénophobes d’une population poussée à bout, "R.M.N." décape jusqu’à l’os les contradictions et les fêlures d’une communauté prête à imploser.
La figure des ours devient une métaphore déchirante d’une humanité sans barrières qui laisse libre cours à des pulsions les plus primaires. Une œuvre qui, sans être aussi dévastatrice que "4 mois, 3 semaines, 2 jours" du même Cristian Mungiu (Palme d’or 2007), n’en reste pas moins un instantané impressionnant des dérives identitaires et de la complexité d’une Europe tiraillée entre ses différentes cultures.
"Holy Spider" de Ali Abbasi
Note: 3/5
Une mère laisse sa fille pour sortir, la nuit, dans les rues de Masshad, en Iran. On comprend rapidement qu’elle est prostituée, droguée, et au bout d’une quinzaine de minutes, elle finit étranglée par un mystérieux homme à moto. Un tueur en série, surnommé l’araignée, qui écume les rues de la ville et trucide les prostituées pour débarrasser l’Iran de ces femmes "impures".
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Inspiré d’un fait divers qui s’était déroulé à Masshad de 2000 à 2001, "Holy Spider" adopte la forme d’un thriller tendu où l’on suit, d’un côté, l’enquête fastidieuse d’une journaliste de Téhéran entravée par les autorités, officieusement ravies que le tueur nettoie la ville pour eux, et de l’autre, l’assassin fondamentaliste lui-même, père de famille guidé par des pulsions contradictoires.
L’ambiance glauque du film participe au portrait glaçant d’un Iran complexe, tiraillé entre un radicalisme islamiste et un besoin bridé de justice, de modernité et de rééquilibrage entre hommes et femmes. Un bon film, sans être mémorable pour autant.
"Les amandiers" de Valéria Bruni-Tedeschi
Note: 4/5
Dans les années 80, un groupe de douze aspirants comédiens intègrent l’école de théâtre des Amandiers, à Nanterre, dirigée par Pierre Romans et Patrice Chéreau. Alors que l’apprentissage de l’art passe par une liberté et une exigence forcenées, Stella vit une histoire d’amour incandescente avec Etienne, un écorché vif qui se consume dans la drogue.
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Après plusieurs œuvres librement autobiographiques ("Un château en Italie", "Les estivants"), l’actrice-réalisatrice Valéria Bruni Tedeschi ressuscite cette volée dont elle faisait partie (Stella, c’est elle) aux côtés de futures vedettes telles que Agnès Jaoui, Marianne Denicourt, Vincent Perez, Bruno Todeschini, Thibault de Montalembert. En résulte un hymne émouvant à la jeunesse, à la création, à l’art dramatique, portrait d’une époque marquée par le SIDA et d’une génération filmée à fleur de peau par la réalisatrice qui plonge au cœur de ce que veut dire jouer, aimer et vivre.
Cerise sur le gâteau, Louis Garrel compose un Patrice Chéreau confondant de vérité et Bruni Tedeschi tend le témoin à toute une génération d’actrices et d’acteurs qui mériteraient un prix d’interprétation commun.
"Decision to Leave" de Park Chan-wook
Note: 2/5
Un homme est retrouvé mort au bas d’une montagne qu’il venait d’escalader. L’enquête est confiée à un détective de Séoul, dont le mariage semble au plus bas. Celui-ci devient obsédé par l’épouse du défunt, une Chinoise d’origine, sa principale suspecte.
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Tout en suivant l’enquête tortueuse de ce policier, le cinéaste Park Chan-wook ("Old Boy", "Sympathy for Mr. Vengeance") se focalise surtout sur la relation étrange et platonique qui va lier le détective et sa suspecte, convoquant l’ombre du "Vertigo" d’Hitchcock. Le résultat, léché jusqu'à la moindre image, laisse toutefois l'impression peu stimulante d’un pur exercice de style, visuel et scénaristique, qui s’évapore aussi rapidement le film fini.
"Crimes of the future" de David Cronenberg
Note: 2/5
Dans une époque et un endroit non défini… Un garçon de huit ans, après avoir mangé une poubelle en plastique, est tué par sa propre mère. L’espèce humaine est en pleine mutation et un groupuscule force ses membres à adapter leur corps et leur nourriture à un environnement technologique et synthétique.
Secondé par sa partenaire Caprice (Léa Seydoux), Saul Tenser (Viggo Mortensen), célèbre artiste performer, met en scène la métamorphose de ses organes dans des spectacles d’avant-garde. Timlin (Kristen Stewart), une enquêtrice du Bureau du Registre National des Organes, suit de près leur travail et se rapproche de Saul, pour lequel elle ressent une attirance irrépressible.
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Si le début du nouveau David Cronenberg ne manque pas d’intriguer, son développement trahit rapidement l’essoufflement d’un cinéaste autrefois génial ("La mouche", "Faux semblants", "Le festin nu", "Crash"), désormais réduit à une parodie verbeuse de lui-même.
Sur le papier, les concepts avancés par "Crimes of the future" fascinent autant que les œuvres antérieures du maître auquel le film se réfère, notamment le séminal "Videodrome" et "Existenz". Les phrases-chocs fusent, "La chirurgie est le nouveau sexe", "Le corps est la réalité", mais au cœur d’un long-métrage fastidieux qui s’époumone à expliciter les ramifications philosophiques et métaphysiques de son histoire plutôt que de les incarner véritablement à l’écran.
"Nostalgia" de Mario Martone
Note: 3/5
Alors qu’il a, pour des raisons nébuleuses, fui Naples quarante ans auparavant, puis s’est marié au Caire et s’est converti à l’islam, Felice Lasco (Pierfrancesco Favino) revient pour la première fois dans sa ville natale afin de rendre visite à sa mère mourante. Ses souvenirs le replongent dans le passé d’une ville qui n’a guère changée et dans sa relation fusionnelle avec Oreste Spasiano, désormais chef de gang redouté du quartier de La Sanita.
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Adaptant un roman d’Ermanno Rea, le cinéaste italien Mario Martone (présent à Cannes en 1995 avec "L’amour meurtri") explore les rues labyrinthiques de Naples en bondissant du présent au passé (par des images au style super-8 un peu artificielles) et ramène son héros vers le moment de rupture de son existence.
La relative beauté du film provient, contrairement à ce que son titre indique, non pas d’une impression de nostalgie, mais de continué immuable, comme si l’histoire avortée de la jeunesse de Felice n’attendait que de reprendre au point où elle s’était arrêtée quarante ans auparavant. La performance de Pierfrancesco Favino (déjà exceptionnel dans "Le traître" de Marco Bellocchio) reste le point fort de ce film sur lequel pèse le destin et la tragédie, sans toutefois trouver toute la profondeur émotionnelle et thématique qu’on pouvait en attendre.
"Tori et Lokita" de Luc et Jean-Pierre Dardenne
Note: 2/5
Tori (Pablo Schills), jeune garçon débrouillard, et Lokita (Joely Mbundu), une adolescente venue d’Afrique qui se fait passer pour sa sœur, tentent de subsister ensemble à Bruxelles. Alors qu’on lui refuse ses papiers, Lokita accepte un travail cauchemardesque dans un hangar où son patron, un restaurateur mafieux, a installé une plantation de cannabis.
Vivotant de petits deals, Tori et Lokita ne peuvent compter que sur leur solidarité pour affronter les difficultés de l’exil. Les rares euros gagnés partent vers la mère de Lokita, restée au pays, vers des passeurs qui réclament le remboursement de leur dette ou vers le paiement d’hypothétiques faux papiers.
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Le style des frères Dardenne est désormais si rôdé qu’il confine au système. "Tori et Lokita" ne déroge pas à la règle dans cette énième immersion, caméra à l’épaule, dans la réalité de deux sans-papiers à Bruxelles.
Une immersion qui, à force de ne jamais regarder au-delà de ses œillères, empêche toute perspective plus large sur un sujet complexe, condamne les personnages à rester prisonniers du déterminisme et peut provoquer un effet non souhaité de distanciation totale. Distanciation ici d’autant plus ressentie que les dialogues un peu trop écrits des frères Dardenne sortent peu naturellement de la bouche de l’actrice et de son jeune partenaire.
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"Nostalgia" de Mario Martone
Note: 3/5
Alors qu’il a, pour des raisons nébuleuses, fui Naples quarante ans auparavant, puis s’est marié au Caire et s’est converti à l’islam, Felice Lasco (Pierfrancesco Favino) revient pour la première fois dans sa ville natale afin de rendre visite à sa mère mourante. Ses souvenirs le replongent dans le passé d’une ville qui n’a guère changée et dans sa relation fusionnelle avec Oreste Spasiano, désormais chef de gang redouté du quartier de La Sanita.
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Adaptant un roman d’Ermanno Rea, le cinéaste italien Mario Martone (présent à Cannes en 1995 avec "L’amour meurtri") explore les rues labyrinthiques de Naples en bondissant du présent au passé (par des images au style super-8 un peu artificielles) et ramène son héros vers le moment de rupture de son existence.
La relative beauté du film provient, contrairement à ce que son titre indique, non pas d’une impression de nostalgie, mais de continué immuable, comme si l’histoire avortée de la jeunesse de Felice n’attendait que de reprendre au point où elle s’était arrêtée quarante ans auparavant. La performance de Pierfrancesco Favino (déjà exceptionnel dans "Le traître" de Marco Bellocchio) reste le point fort de ce film sur lequel pèse le destin et la tragédie, sans toutefois trouver toute la profondeur émotionnelle et thématique qu’on pouvait en attendre.
"Les bonnes étoiles" de Hirokazu Kore-eda
Note: 5/5
A Busan, en Corée du Sud, une jeune femme abandonne son bébé au pied de la "baby boxes", sorte de cocon sécurisé dédié aux nourrissons, à l’entrée d’une église. Deux hommes, décidés à ne pas laisser l’enfant à un orphelinat, récupèrent illégalement le bambin pour le revendre à une nouvelle famille. Mais un couple de policières a observé la scène et file le parcours du bébé, attendant d’arrêter les deux malfaiteurs en flagrant délit. Qui plus est, la mère du nouveau-né revient et suit les hommes afin de s’assurer que son enfant aura la vie qu’il mérite.
Palme d’or en 2018 avec "Une affaire de famille", le cinéaste japonais Hirokazu Kore-eda s’exile en Corée du Sud, le temps d’un film, pour cette déambulation rocambolesque qui éclaire avec une finesse prodigieuse des thématiques comme l’enfance, l’abandon, la maternité et la solidarité. En formant autour du nourrisson une étrange famille recomposée, "Les bonnes étoiles" jongle avec aisance entre légèreté comique et émotion discrète pour une fable d’une délicatesse souveraine.
"Leila et ses frères" de Saeed Roustaee
Note: 5/5
Téhéran. Esmail, un vieil homme, se rend à l’enterrement du "parrain". Ses cousins cherchent le successeur de ce dernier, Esmail rêve de cet honneur, mais il est perçu comme un homme faible, pauvre et sans envergure. De son côté, sa fille Leila, qui a sacrifié sa vie pour sa famille, tente d’agir contre l’inertie de ses quatre frères endettés jusqu’au cou à cause de la crise économique.
Elle propose l’achat d’une boutique, bientôt construite à la place des toilettes d’un centre commercial, pour lancer une affaire avec eux. C’est sans compter la résistance des quatre hommes lâches et résignés à leur sort comme de celle d’un patriarche qui ne pense qu’à être élu comme nouveau "parrain".
Une tragicomédie familiale
Après l’excellent "La loi de Téhéran", le cinéaste iranien Saeed Roustaee orchestre, avec une modestie formelle qui relève avant tout la richesse de ses personnages, une tragicomédie familiale où le marasme économique iranien et les contradictions entre tradition et modernité explosent avec fracas.
Sur près de 2h45, le réalisateur sature son récit de dialogues qui deviennent autant de joutes verbales hallucinantes et pousse dans ses derniers retranchement cette fascinante Leila confrontée à la passivité désarmante de sa famille qui se complait dans une logique de l’échec. Les comédiens sont au diapason et tirent vers des hauteurs inattendues cette autopsie stupéfiante d’un clan comme d’un pays.
"Pacifiction" d’Albert Serra
Note: 3/5
Sur l’île de Tahiti, le Haut-Commissaire de la République française De Roller (Benoît Magimel) passe ses journées entre la boîte de nuit de la région, les réceptions officielles, des compétitions de surf et les réunions avec les représentants de la population locale. Il doit faire face à une rumeur persistante, qui prétend que les essais nucléaires reprendraient bientôt. La grogne d’une poignée d’autochtones, instrumentalisés par des représentants d’autres pays, met à mal l’art de la diplomatie de De Roller.
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Connu pour des œuvres radicales comme "La mort de Louis XIV" ou "Liberté", le cinéaste et producteur espagnol Albert Serra prend ici tout son temps, 2 heures 45, pour exposer un microcosme représentatif des tensions post-coloniales. Par des séquences qui semblent improvisées, parfois burlesques, décalées ou politiquement cinglantes, "Pacifiction" s’affirme sans doute comme l’œuvre la plus accessible de son auteur, même si sa durée conséquente pourra effrayer le public le moins téméraire. D’une beauté formelle évidente, appuyé par la performance très libre de Benoît Magimel, le résultat n’en reste pas moins tout à fait réussi, aussi drôle que pathétique.
"Stars at Noon" de Claire Denis
Note: 3/5
Coincée au Nicaragua en raison d’un passeport confisqué, Trish, une jeune journaliste américaine, végète dans un pays au bord de la guerre civile. Elle vend ses charmes à un policier du Costa Rica avant de s’attacher à un businessman anglais opaque, chargé d’un projet humanitaire, qui lui promet de la faire sortir du pays. Mais l’arrivée d’un agent de la CIA complique les choses.
Sous des dehors de thriller politique, "Stars at Noon" est avant tout un film de Claire Denis qui préfère laisser l’efficacité du genre et la clarté du récit à d’autres.
Adaptant un roman de Daniel Johnston, la cinéaste française semble ici un peu coincée entre le contexte narratif de son film, qui ne renvoie plus à l’époque sandiniste des années 80 comme dans le roman, mais à une réalité contemporaine vague et générale, et sa mise en scène portée intégralement sur la sensualité, les corps, les atmosphères, les sensations.
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Un peu perdu dans cette pérégrination au but nébuleux et aux fulgurances cinématographiques trop rares, on reste surtout fasciné par la présence et l’énergie bouillonnantes de l’actrice Margaret Qualley, la fille de Andie MacDowell.
"Close" de Lukas Dhont
Note: 5/5
Notre Palme est toute trouvée avec cette déflagration de cinéma à l’état pur qui déborde d’une émotion dévastatrice comme on en ressent très rarement.
Caméra d’or en 2018 avec "Girl", le réalisateur belge Lukas Dhont entre pour la première fois en compétition et devrait en toute logique décrocher le Graal ce samedi.
Avec "Close", il suit l’amitié fusionnelle entre Léo et Rémi, deux ados de 13 ans. Mais lorsque l’école commence, les commentaires blessants sur leur relation éloigne Léo de Rémi. Heurté par le rejet de son meilleur ami, qui cherche à ne pas être ostracisé par les autres élèves, Rémi se renferme. Jusqu’à un événement terrible qui trace une séparation définitive entre les deux amis et plonge la mère de Rémi, Sophie (Emilie Dequenne), dans l’incompréhension.
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Déjouant constamment les directions attendues qu’appelle son histoire (non, ce ne sera ni un récit initiatique sur les premiers émois homosexuels entre deux ados, non, ce ne sera pas non plus un film sur le harcèlement scolaire), "Close" impose d’emblée une mise en scène totalement organique, focalisée sur les visages, les corps en mouvement, les regards, les non-dits.
Avec une virtuosité jamais stérile, Lukas Dhont montre plutôt qu’il n’explique et trouve, dans les zones enfouies de son récit, une profondeur humaine et émotionnelle proprement prodigieuses. Soutenu par le comédien Eden Dambrine (Léo), révélation foudroyante du film, le résultat nous emmène très loin et incarne ses thématiques avec une force inouïe, posant la question du pardon, de la culpabilité, de comment continuer à vivre après une séparation.
Il faut voir ces instants de pur grâce, un échange de regard entre Léo et la mère de Rémi lesté de tout le poids de ce qui ne peut être encore exprimé, une course dans un champ de fleurs, l’absence qui pèse et imprime ses réminiscences dans chaque plan, pour saisir la grandeur de ce film dont on sort les yeux embués par tant de beauté. A ce stade, ça s’appelle un chef-d’œuvre.
"Un petit frère" de Léonor Serraille
Note: 3/5
Venant de quitter la Côte d’Ivoire, Rose arrive à Paris avec deux de ses enfants, Jean et Ernest. Elle s’installe dans un appartement en banlieue et gagne sa vie comme femme de ménage. Nous sommes en 1989 et dans cette famille monoparentale, on presse Rose de trouver un homme pour la soutenir. Elle refuse, se focalisant sur la réussite scolaire de ses deux enfants.
Dix ans plus tard, Jean a quitté l’école et végète, exprimant toute la colère qu’il a accumulé contre sa mère. De son côté, Ernest cherche, dans le contact avec son frère, un lien essentiel et fondateur. Plusieurs années après, la famille a éclaté et Ernest retrouve sa mère, l’occasion d’exprimer toutes les rancœurs et les déceptions passées.
Après le très réussi "Jeune femme", emporté par le tourbillon Laetitia Dosch, Léonor Serraille s’intéresse au parcours, sur près de vingt ans, de cette famille monoparentale immigrée en trois chapitres, le premier focalisé sur la mère, Rose, le second sur l’aîné, Jean, le troisième sur le cadet, Ernest. Une construction qui, en plus d’ellipses trop brutales, empêche une réelle adhésion aux personnages, le film passant de l’un à l’autre dans une sorte de chronique décousue qui embrasse à la toute fin, et un peu tard, l'étendue émotionnelle que son histoire promettait. Une déception.
"Showing Up" de Kelly Reichardt
Note: 3/5
Lizzie (Michelle Williams) vit seule avec son chat dans une existence qui semble stagner. Mais la préparation d’une prochaine exposition de ses sculptures pourrait changer son destin. Immergée dans les ateliers d’artistes de Portland, Lizzie commence à exacerber un sentiment de jalousie et de concurrence avec sa voisine, sa propriétaire, artiste elle aussi. L’arrivée d’un pigeon blessé n’arrange rien à la pression que se met sur les épaules la sculptrice solitaire.
Neuvième long-métrage de la cinéaste indépendant américaine Kelly Reichardt ("Certaines femmes", "First Cow"), "Showing Up" adopte les allures d’une exploration aigre-douce des milieux artistiques en marge de New York. Avec son style habituel, minimalisme de la mise en scène, lenteur (parfois rébarbative) du récit, la réalisatrice parvient à former un amusant duo dépareillé, entre Lizzie et sa voisine, lié par le pigeon dont chacune s’occupe à tour de rôle. Sans tomber dans la moquerie attendue des milieux de l’art, le film s’intéresse avant tout aux petites rivalités souterraines, à la frustration et au manque de reconnaissance dont souffrent l’héroïne, et finit par former, par touches discrètes et subtiles, le portrait d’artistes mineurs, mais sincères, guidés par la routine d’expositions peu spectaculaires.
La palmarès personnel de notre critique Rafael Wolf
Pronostics
Palme d’or: "Close" de Lukas Dhont
Grand Prix: "Eo" de Jerzy Skolimowski
Prix de la mise en scène: "Holy Spider" d’Ali Abbasi
Prix du jury: "Les bonnes étoiles" de Hirokazu Kore-eda
Prix du scénario: "Boy from Heaven" de Tarik Saleh
Meilleure actrice: Taraneh Allidousti pour "Leila et ses frères" de Saeed Roustaee
Meilleur acteur: Pierfrancesco Favino pour "Nostalgia" de Mario Martone
Adèle Exarchopoulos omniprésente sur la Croisette
A l'affiche de 2 films
Révélé il y a près de 10 ans à Cannes, l'actrice Adèle Exarchopoulos est à l'affiche de deux films présentés cette année à Cannes, "Les cinq diables" de Léa Mysius et "Fumer fait tousser" de Quentin Dupieux. En neuf ans, elle a tourné une vingtaine de long-métrages.
"Les bonnes étoiles", le retour de Hirokazu Kore-eda à Cannes
Un drame sur des bébés abandonnés en Corée
Le réalisateur japonais, Palme d'or 2018 pour "Une affaire de famille", sur un groupe de marginaux pauvres de Tokyo qui forment une famille alternative, tente un doublé avec un autre récit sur la famille.
Produit en Corée, "Les bonnes étoiles" se penche sur les boîtes à bébés, où les mères pouvaient abandonner anonymement leurs nouveau-nés, afin d'éviter le poids d'être une mère célibataire dans une société conservatrice et patriarcale.
Dans le cadre de ses recherches, le cinéaste japonais, qui a été salué pour ses explorations sensibles et contemplatives des relations familiales, a rencontré des enfants dans des orphelinats. Selon Kore-eda, ces enfants se demandaient si, en tant que bébés non désirés, il aurait été préférable pour eux de ne pas naître.
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"Les boîtes à bébés existent aussi au Japon", a déclaré le cinéaste lors d'une conférence de presse à Séoul début mai. "J'ai voulu dépeindre le voyage d'un groupe de personnes, certaines avec de bonnes intentions et d'autres plus malveillantes, avec diverses histoires autour d'un bébé qui a été laissé dans une boîte à bébé".
Le film est une rare collaboration entre Kore-eda et un casting de stars sud-coréennes, dont les acteurs de premier plan Song Kang-ho ("Parasite"), Bae Doo-na, Gang Dong-won, et la mégastar de la K-Pop Lee Ji-eun.
L'empreinte de la Suisse à la Quinzaine des réalisateurs
Grâce à Paolo Moretti et Anne Delseth
Depuis respectivement quatre et dix ans, ils participent au succès de la Quinzaine des Réalisateurs, et tous deux sont liés à la Suisse.
L'Italien Paolo Moretti, délégué général de la manifestation, vit à Genève où il dirige les cinémas du Grütli,
Anne Delseth quant à elle, est vaudoise, programmatrice au cinéma City Club de Pully et à la Quinzaine.
Une Quinzaine, créé par un autre suisse de renom en 1968, Jean-Luc Godard. Avec François Truffaut et une poignée de cinéastes insurgés, ils obtiennent l’annulation du Festival de Cannes, et créent dans la foulée la Quinzaine des réalisateurs: une section dédiée au cinéma d’auteurs qui se distingue par son aspect non compétitif et sa liberté de ton.
Aujourd'hui, pour créer sa programmation, Paolo Moretti peut compter sur son comité de sélection composé d’un homme et quatre femmes, dont Anne Delseth. A eux six, ils visionnent près de 3000 films.
Quand Cannes s’empare des attentats de Paris
"Revoir Paris" et "Novembre" évoquent les faits
"Revoir Paris", film émouvant d’Alice Winocour avec Virginie Efira et Benoît Magimel, a été projeté samedi au Festival de Cannes, avant la présentation dimanche de "Novembre" de Cédric Jimenez, autre long métrage sur les lendemains des attentats de Paris en 2015.
"Revoir Paris", à la Quinzaine des réalisateurs, suit le parcours de deux rescapés de l'attaque terroriste d'une brasserie, qui se croisent dans un groupe de parole revenu sur les lieux quelques mois plus tard. "Novembre", hors compétition, est une plongée au cœur de l'anti-terrorisme les jours suivant les évènements.
Survenus le 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis, ces attentats ont fait 130 morts, dont 90 dans la salle du Bataclan avec un assaut en plein concert.
Recoller les morceaux
Dans "Revoir Paris", Alice Winocour s'est inspirée de l'histoire de son frère, un rescapé du Bataclan et de la communauté des survivants qu'elle a pu approcher. Mia, jouée par Virginie Efira, ne se souvient plus de l'attaque quand Thomas, incarné par Benoît Magimel, se souvient de tout.
"L'attentat est comme un trou noir, le miroir a éclaté, après il faut recoller les morceaux, elle le fait dans cette relation et dans toute une sorte de chaîne (de rencontres d'autres survivants)", a expliqué à l'AFP la cinéaste après la projection. "Les personnages de Mia et de Thomas sont un peu pour moi comme des fantômes, un peu dans les limbes, ne font plus partie de la communauté humaine". "Elle déambule dans sa mémoire mais revient petit à petit dans le monde réel", ajoute la réalisatrice.
Le sujet est lourd mais jamais cafardeux. Alice Winocour, dont "Revoir Paris" est le 4 long-métrage, a choisi Virginie Efira car elle collait à ce personnage "qui ne s'apitoie pas sur elle-même".
Benoît Magimel s'est également retrouvé dans Thomas. "Avec le temps, j'aime bien trouver des rôles en résonance avec des choses que je peux avoir vécues, là j'y ai trouvé des choses que je comprenais, comme se réparer à plusieurs, et puis il ne se victimise pas". L’acteur a puisé dans son histoire personnelle, lui qui a longtemps combattu ses addictions à la drogue. Très juste dans son rôle, l’acteur a par ailleurs décroché un César pour son interprétation dans le film.
"Traumatisme inouï"
"Novembre" s’immerge quant à lui dans la vie des policiers qui ont traqué durant cinq jours les terroristes du 13 novembre. Cédric Jimenez (à qui l’on doit notamment "Bac Nord)" a choisi Jean Dujardin et Sandrine Kimberlain pour incarner le duo d’inspecteurs de la police judiciaire.
"Un traumatisme d'une violence inouïe" qui rend ce film "important", a jugé Cédric Jimenez lors d'une conférence de presse tenue lundi, au lendemain de la projection officielle à Cannes. Hésitant à l'idée d'aborder ce sujet ultra-sensible, Jimenez s'est laissé convaincre par le scénario d'Olivier Demangel, qui laisse totalement hors champ les attentats eux-mêmes.
Un contre-point de vue qui a aussi rassuré Sandrine Kiberlain, qui a avoué sa "réticence" au départ à accepter le rôle d'Héloïse, qui dirige la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire, "par rapport à la proximité des faits".
Polar efficace, les coups de fil stressés, les gardes à vue et les perquisitions musclées s'enchaînent à un rythme soutenu. Des bâillements et des coups de sang trahissent par moment la fatigue des personnages, sous pression de retrouver les hommes les plus recherchés de France avant qu'ils ne commettent d'autres attaques. Comme les policiers après les attentats, les personnages de "Novembre" sont dans un "tunnel", "au service de l'enquête" pendant cinq jours : le film ne montre rien de leur vie privée ou des sentiments qui les traversent.
"Elvis", biopic de Baz Luhrmann
Le phénomène Austin Butler
"Elvis", biopic réalisé par le flamboyant Baz Luhrmann, a été présenté ce mercredi. Avec l'acteur Austin Butler dans le rôle-titre, et Tom Hanks, dans la peau du manager.
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On y voit surtout l'Américain Austin Butler qui a la lourde tâche d'incarner le "King" pendant 20 ans, soit l'essentiel de la carrière de l'interprète de "Blue Suede Shoes", décédé à 42 ans en 1977.
"C'est son moment"
Le Californien de 30 ans a plusieurs atouts. Comme partager certains traits poupins et sensuels avec l'Elvis Presley des débuts. Savoir chanter aussi, puisque c'est sa voix qu'on entend, selon ce qui a déjà filtré dans la presse internationale.
Sans oublier un joli petit parcours dans le show-biz. Cet acteur, également mannequin, tourne depuis son adolescence dans des séries Disney. Il est considéré comme l'une des étoiles montantes d'Hollywood.
Il a également tourné dans une dizaine de films dont "Once Upon a Time... In Hollywood" de Quentin Tarantino ou encore "The Dead Don't Die" de Jim Jarmusch.
"C'est son moment", comme on dit dans l'industrie du spectacle puisque son apparition au récent Met Gala à New York, au bras du mannequin Kaia Gerber, a été très remarquée.
Pour "Elvis", Austin Butler a cherché à "trouver l'humain dans l'icône", comme il l'a dit à The AU Review, média australien.
Le projet lui a pris trois ans de sa vie. Car après avoir été retenu au casting, il a travaillé pendant un an, avant le tournage, pour caler sa voix avec des coachs vocaux et experts.
Priscilla Presley, la veuve de l'interprète de "Heartbreak Hotel", n'a dit que du bien du biopic sur ses réseaux sociaux. Bon ou mauvais signe?
Et la petite-fille du "King", Riley Keough qui vient de présenter à Cannes "War Pony", ses premiers pas à la réalisation, a avoué qu'elle a pleuré "cinq minutes après le début du film". Après ça, "je n'ai pas arrêté, donc il faut que je le revoie", a-t-elle confié sur la Croisette.
Baz Luhrmann abat en tout cas un autre as au générique avec Tom Hanks en Colonel Parker, manager d'Elvis au parcours opaque, selon les biographes du rock, personnage trop rarement exploité à l'écran.
"Elvis" sortira en Suisse le 22 juin.
Jerry Lee Lewis, documentaire entre octaves et graves
D'Ethan Coen
"C'est un grand showman, hors-norme, avec des hauts, des bas": Ethan Coen a présenté en séance spéciale "Jerry Lee Lewis: Trouble in Mind", son premier projet en solo, monté par sa femme Tricia Cooke. Un documentaire sur ce pianiste-rock, entre succès et scandale.
Il signe ce film sur une proposition du producteur et guitariste T-Bone Burnett. Ce dernier avait travaillé en 1989 sur une transposition de la vie du "Killer", surnom du pianiste, pour le cinéma avec "Great Balls Of Fire" (un de ses tubes), réalisé par Jim McBride avec Denis Quaid dans le rôle-titre.
"T-Bone Burnett n'était pas très heureux du résultat, il faut dire que ce film n'est pas bon du tout", rebondit Ethan Coen. On comprend que les deux hommes ont voulu aller au-delà des clichés. Montrer que le pianiste (marié 7 fois entre 16 et 76 ans), après sa traversée du désert, s'est réinventé dans le country, avec succès.
"Ce que j'ai appris avec ce film, c'est qu'il n'est pas seulement ce pianiste-fou de 'Great Balls Of Fire' (jouant avec les coudes, les pieds, les fesses) il est bien d'autres choses", complète Ethan Coen.
Le documentaire n'élude toutefois pas d'autres côtés sombres, comme quand il blessa par balle son bassiste ou ses nombreuses addictions. Le musicien (86 ans, diminué et qui ne s'exprime plus publiquement) confie dans une archive qu'à un moment, il prenait "des cachetons pour toute une ville et une bouteille de Tequila pour dessaouler".
Moins avant-gardiste que "Moonage Daydream", documentaire sur David Bowie également à Cannes, Ethan Coen dribble toutefois les habituels experts filmés en studio. "Qui fait encore des documentaires comme ça?" tacle le réalisateur.
L'écrivaine Annie Ernaux: "Je pense qu'après ce film, on me verra différemment"
"Les années super 8", récit d'une tranche de sa vie
L'une des plus grandes voix de la littérature française, véritable icône féministe pour plusieurs générations, Annie Ernaux se met à nu dans "Les années Super 8", un film composé d'archives familiales. "Je pense qu'après ce film, on me verra différemment. On verra ce que j'ai pu être et comment, à un moment donné, j'ai été conduite à écrire", raconte l'écrivaine de 81 ans à la RTS.
Un livre d'images écrit et lu par Annie Ernaux elle-même et qu'elle a réalisé avec son fils David.
"Gagner ma liberté"
On y voit une jeune mère écartelée entre sa vie bourgeoise et son envie d'écrire, un besoin auquel elle s'adonne en secret. "C'est une jeune femme très éloignée de ce que je suis maintenant, ajoute Annie Ernaux. Une femme très solitaire, en proie à beaucoup de questions. Ce sont des années de lutte, mais j'ai une sorte de volonté tenace d'aller vers quelque chose que je ne connais pas encore".
Et ce quelque chose, c'est l'écriture. Des récits qui seront personnels, politiques et puissants et qui inspireront toute une génération.
Présenté lundi à la Quinzaine des réalisateurs, cet opus d'une heure est né de l'envie de se réapproprier des dizaines de films super 8 tournés entre 1972 et 1981 par son ex-mari, aujourd'hui décédé.
"C'est à la fois le récit de ma vie, mais aussi celui de milliers de femmes", conclut l'écrivaine. Pas un film de souvenirs uniquement donc, mais un film qui témoigne d'une époque, d'une classe, et d'une femme banale qui ne l'est pas.
Trois films suisses présentés à Cannes
Lionel Baier, Elena López Riera et Jan Gassmann
"La dérive des continents (au sud)" du cinéaste romand Lionel Baier, co-production de la RTS a été présenté dimanche soir en avant-première mondiale à la Quinzaine des réalisateurs, une sélection parallèle du Festival de Cannes qui a pour vocation de faire découvrir de nouvelles et nouveaux cinéastes à un large public.
Le film est produit par les Genevois Pauline Gygax et Max Karli, aussi présents à Cannes."D'être passé par Cannes est témoin, à juste titre ou pas d'ailleurs car tout cela est très relatif, d'un niveau d'excellente et de qualité qui va donner une valeur au film au fur et à mesure de sa vie en festivals, en marché et en salles", explique Pauline Gygax à la RTS.
Mais c'est aussi un risque: suite aux projections cannoises, les premiers articles publiés vont donner une tendance qui aura une grande influence sur le succès futur du film. Pour le dernier long métrage de Lionel Baier, la pression a pu toutefois redescendre suite aux bons retours de la première projection de presse.
"La dérive des continents (au sud)" est le troisième opus de la tétralogie "caustique et sentimentale" du réalisateur suisse Lionel Baier sur la construction européenne, une exploration des quatre points cardinaux de l’Europe, démarrée en 2006 avec "Comme des voleurs (à l’est)" suivi en 2013 par "Les Grandes Ondes (à l’ouest)".
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Pour Lionel Baier, avoir son film à la Quinzaine des Réalisateurs est "une très belle reconnaissance pour toute l'équipe du film." Et du point de vue économique, être à Cannes a aussi un grand intérêt. "On peut en quelques jours présenter son travail à la totalité des acheteurs et vendeurs du monde entier", confie-t-il à la RTS
Deux autres films suisses
Egalement co-produit par la RTS, "El agua", le premier long métrage d'Elena López Riera, a été retenu par la section Quinzaine des Réalisateurs. On y suit une bande de jeunes qui essaie de survivre à la lassitude de l’été.
"99 Moons" du Zurichois Jan Gassmann, qui raconte l'histoire d'un amour fou, est quant à lui présenté dans la sélection ACID Cannes. Depuis 1993, l'Association pour le cinéma indépendant ACID sélectionne à chaque fois neuf longs métrages pour Cannes.
129 victimes de féminicides s'affichent sur le tapis rouge à Cannes
"Riposte féministe"
Une immense banderole avec le nom de victimes de féminicides en France a été déployée dimanche sur le tapis rouge cannois par des membres d'un collectif féministe. Les colleuses sont à l'honneur d'un documentaire présenté dans l'après-midi sur la Croisette.
Angélique, Evelyne, Sofya, Nadia, une femme... Les noms ou identités des 129 victimes de féminicides en France, "depuis le dernier Festival de Cannes" en juillet 2021, se sont affichés sur les marches du Festival. Vêtues de noir, les militantes ont ensuite pris la pose, le poing levé, avant d'utiliser des fumigènes, nimbant le tapis rouge de fumée noire.
La scène a été immortalisée par le photographe Raymond Depardon, dont le fils Simon a réalisé, avec Marie Perennès, le documentaire "Riposte féministe", qui suit ces militantes collant, souvent de nuit, des messages sur les murs des villes pour dénoncer les violences sexistes, le harcèlement de rue et apporter des messages de soutien aux victimes d'agressions sexuelles.
Fumigènes dans les sous-vêtements
Avant la projection du film, présenté dimanche en séance spéciale, les colleuses ont une nouvelle fois levé le poing quand la réalisatrice a égrené leur prénom.
"On est en noir parce qu'on est endeuillées", ont expliqué les colleuses à l'AFP après la projection, "On n'allait pas venir à Cannes pour poser, on n'a pas voulu monter les marches en souriant, mais comme des activistes, pas comme des actrices", qui ont caché les fumigènes dans leurs sous-vêtements.
"En fait à Cannes aussi on se réapproprie l'espace comme on se réapproprie la rue", a estimé Thaïs Caprio. "En fait les féministes débarquent à Cannes et pas que sur l'écran".
Une autre action coup de poing féministe a marqué le 75e Festival de Cannes: une militante dénonçant les viols commis par des Russes en Ukraine avait fait irruption, torse nu et culotte tachée de sang, vendredi sur le tapis rouge, avant d'être stoppée par les services de sécurité. L'action avait ensuite été revendiquée sur Twitter par le mouvement Scum, qui se définit comme féministe "radical".
"Novembre" sur les attentats de Paris accueilli par un triomphe
Un film signé Cédric Jimenez
Le film policier français de Cédric Jimenez sur les attentats de novembre 2015 à Paris, décrivant la traque des terroristes dans les jours ayant suivi le drame, a fait un triomphe dimanche soir au Festival de Cannes (sud), où il était projeté hors compétition.
Après "Bac Nord" (présenté à Cannes en 2021) sur la police de Marseille (sud), et "La French", Cédric Jimenez s'inspire de nouveau de faits réels pour "Novembre", avec une nouvelle immersion chez les forces de l'ordre.
L'histoire débute le 13 novembre 2015 au siège de la Sous-direction anti-terroriste de la police judiciaire, quand une dizaine de téléphones se mettent à sonner simultanément.
Ce soir-là, en quelques heures à peine, des commandos jihadistes ont fait 130 morts et 350 blessés à Paris et en banlieue, près du Stade de France, sur des terrasses de la capitale et dans la salle de spectacle du Bataclan.
Plus de six ans après les faits, un autre long-métrage présenté à Cannes se consacre à la tragédie du 13 novembre 2015, "Revoir Paris", d'Alice Winocour, qui adopte lui le point de vue des survivants.
Dans le film de Jimenez, c'est le travail de la police qui est mis en lumière: sous les ordres d'Héloïse (Sandrine Kiberlain) et Fred (Jean Dujardin), ils entament une traque tous azimuts, en France, au Maroc, et sur internet, pour mettre la main sur les terroristes.
Cinq jours durant, les résultats espérés par la France entière se font attendre: les policiers luttent contre des accès de fatigue et de colère et accumulent les fausses pistes. Un témoignage d'une amie de la "logeuse" des islamistes va finalement s'avérer décisif.
Le spectateur ressort assourdi et aveuglé après la scène de l'assaut final -déluge d'armes et de feu- dans l'appartement de Saint-Denis où se terrent les terroristes.
A la fin de la projection dans le Grand théâtre Lumière, l'équipe du film, présente, a été très longuement applaudie, par un public debout.
En 2021, "BAC Nord", qui revenait sur des accusations de corruption dans la police marseillaise, avait été un gros succès en salles mais avait provoqué la polémique, quand un syndicat policier ainsi que des politiques de droite et d'extrême droite l'avaient "récupéré" pour justifier leurs préoccupations sécuritaires, au grand dam de Cédric Jimenez.
Des films du Maghreb sur des sociétés qui "empêchent de vivre"
"Nos pays sont très beaux, mais les gens étouffent à l'intérieur"
Tels sont les propos de la réalisatrice Erige Sehiri qui, comme plusieurs autres cinéastes du Maghreb présents cette année à Cannes, dépeint une jeunesse au bord de l'explosion. Dans "Sous les figues", son premier long-métrage présenté samedi à la Quinzaine des réalisateurs, la cinéaste franco-tunisienne plante le décor dans un champ de figuiers de la Tunisie rurale où travaillent majoritairement des femmes. "J'avais envie de dire: 'Regardez, c'est beau mais c'est tout'. Nos pays sont comme ça, ils sont très beaux mais les jeunes étouffent à l'intérieur", explique la réalisatrice à l'AFP. Dans ce film choral, les femmes sont traquées, harcelées, certaines échappant de justesse à une agression sexuelle.
Quant au film de la réalisatrice marocaine Maryam Touzani, "Le Bleu du Caftan", il raconte l'impossibilité de pouvoir vivre son homosexualité au Maroc. Le film sera présenté hors compétition dans la section "Un certain regard".
L'acteur Adam Bessa prête ses traits à Ali dans le film du réalisateur américain Lotfy Nathan, "Harka", qui a été présenté jeudi dans la sélection officielle mais également hors compétition. A travers le destin d'Ali, jeune Tunisien qui vivote de l'essence de contrebande qu'il vend sur un bout de trottoir, le film interroge l'héritage de la révolution tunisienne qui avait précipité le Printemps arabe. Plus de 10 ans après l'immolation de Mohamed Bouazizi, les choses ont-elles changé?
Le film montre "le désespoir d'une génération qui se sent empêchée de vivre", analyse auprès de l'AFP le réalisateur Lotfy Nathan. "J'ai voulu décrire une société qui emprisonne, qui ne laisse pas vraiment d'échappatoire".
"Plus que jamais"
L'au revoir sur grand écran de Gaspard Ulliel
Une longue ovation et des larmes... La projection samedi à Cannes de "Plus que jamais", le dernier film tourné avec l'acteur français Gaspard Ulliel, décédé brutalement en janvier, a bouleversé la Croisette samedi, déjà éprouvée par un film sur les attentats de 2015.
La projection du film, sélectionné à Un Certain regard, a été saluée par de longues minutes d'applaudissements et l'émotion visible de l'équipe du film, dont l'actrice Vicky Krieps et la réalisatrice Emily Atef. Pudique à l'image de son film, la réalisatrice franco-allemande s'est dite à plusieurs reprises "heureuse" de pouvoir enfin le montrer.
"Il y a un an, on était encore en Norvège pour le tourner", a-t-elle dit, sans revenir sur la mort brutale de l'acteur, décédé en janvier suite à un accident de ski.
"Plus que jamais" se penche sur un couple soudé mis à l'épreuve par la maladie: condamnée par un grave problème pulmonaire, Hélène hésite à se soigner avant de refuser la greffe qui pourrait être sa voie de salut. Sur un coup de tête, elle part seule en Norvège, près d'un fjord, après avoir échangé avec un inconnu tenant un blog sur lequel il évoque sa maladie (un cancer). Une décision incompréhensible pour Matthieu (Gaspard Ulliel), le mari d'Hélène, qui ne parvient pas à se faire à cette idée de son départ, et encore moins à l'idée de sa mort.
"Boy From Heaven" de Tarik Saleh, en compétition
Polar et luttes de pouvoir au sommet de l'islam sunnite
La compétition cannoise a plongé vendredi dans les eaux troubles de la religion et de la politique, avec "Boy From Heaven", un thriller complexe au sommet de l'université Al-Azhar du Caire, la principale institution de l'islam sunnite.
Réalisé par Tarik Saleh ("Le Caire confidentiel"), le film se déroule après le décès du grand imam d'Al-Azhar, autorité qui fait référence pour des millions de croyants.
Qui va lui succéder? Religieux, Frères Musulmans prometteurs d'un islam politique, services de sécurité de l'Etat, dirigé par le maréchal Al-Sissi, en concurrence avec le pouvoir spirituel des imams... La nomination du successeur est un jeu d'échecs dans lequel chacun veut avoir son mot à dire, et où tous les coups sont permis.
Comme un pion au milieu de cet échiquier, se retrouve un modeste fils de pêcheur tout juste arrivé à l'université, Adam. Tout va déraper lorsqu'un étudiant, contraint de jouer les agents infiltrés pour la très redoutée sûreté de l'Etat, est assassiné dans l'université.
Pour prendre la relève, un officier de la sûreté de l'Etat, Ibrahim, force Adam à travailler en sous-marin à son tour pour la police. Qui manipule qui? Tarik Saleh joue pendant plus de deux heures entre fausses pistes et faux-semblants, revisitant les classiques du polar dans un décor rarement filmé, des cafés "à l'américaine" du Caire, où policier et infiltré ont rendez-vous autour d'un latte, aux travées de l'établissement religieux.
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Lui-même né à Stockholm, d'une mère suédoise et d'un père égyptien, Tarik Saleh qui se dit "indésirable" en Egypte depuis son précédent film, et n'a pas pu tourner dans la prestigieuse université aux centaines de milliers d'étudiants, se repliant dans le splendide décor de la mosquée Süleymaniye d'Istanbul.
Après son précédent polar, le très remarqué "Caire Confidential" (2017, Grand Prix du Jury à Sundance), qui décrivait un régime policier violant et corrompu, le réalisateur change de focale, se concentrant davantage sur les luttes entre pouvoir politique et spirituel, mais conserve son regard sans concession sur l'Egypte. L'idée du film lui est venue en relisant "Le nom de la rose", le classique d'Umberto Eco, qui se déroule dans une abbaye.
Au casting, il retrouve son acteur fétiche, le Libanais vivant en Suède Fares Fares, dans le rôle de l'officier de police. Et dans le rôle principal, celui du jeune Adam, Tawfeek Barhom, né en Israël, et qui vient de terminer le prochain film de Terrence Malick sur la vie du Christ.
"Boy From Heaven" sortira le 9 novembre en France.
"Corsage" de Marie Kreutzer
A Cannes, une Sissi "victime de son image" comme les Instagrameurs
Scrutée et sommée de se taire, l'impératrice Sissi était "victime de son image" comme le sont les Instagrameurs aujourd'hui, a déclaré dans une interview à l'AFP l'actrice Vicky Krieps qui incarne la souveraine autrichienne dans "Corsage", présenté vendredi à Cannes.
"Les photos Instagram nous rendent de plus en plus victimes de notre image, comme Sissi l'était aussi", a déclaré à Cannes l'actrice luxembourgeoise qui enfile les robes de la femme de François-Joseph 1er dans cette nouvelle version, féministe et crépusculaire, de la vie de l'impératrice.
Quinze ans après "Marie Antoinette", rhabillée par la réalisatrice Sofia Coppola version Converse et macarons, en reine rongée par l'ennui et la déprime, c'est au tour d'un autre mythe, celui de "Sissi", qui a rendu Romy Schneider célèbre, d'être revisité.
Sur une idée de Vicky Krieps, l'Autrichienne Marie Kreutzer s'est emparée de l'histoire de l'impératrice d'Autriche, sommée de se taire, de sourire, de ne pas s'ingérer dans les affaires de l'Empire, et qui sombre dans la mélancolie à la quarantaine.
Avec ses décors anachroniques, mêlant meubles d'époque et lampes électriques, et sa bande-son signée par la chanteuse et compositrice Camille avec des tubes rocks repris à la harpe, le film entend aussi parler d'aujourd'hui. Avec les réseaux sociaux notamment, "dans toutes les fonctions qu'on prend, dans tous les environnements professionnels, la beauté prend un rôle et ça, ce n'est pas bien du tout! Si on est belle ou beau, on prend plus de place, on vous écoute mieux, on vote pour mieux, et ça c'est le pire", regrette l'actrice révélée dans "Phantom Thread".
Pour le rôle, Vicky Krieps a dû porter un corset, comme Sissi, femme "au bord de la crise de nerfs et de l'effondrement". "C'était dur, ça serre le plexus solaire, là où tous les nerfs sont accrochés. Ca enlève les émotions, j'étais bloquée dans mes émotions, je ne pouvais pas sortir ma tristesse ou ma joie", témoigne-t-elle.
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Le film doit sortir en France en décembre.
"Revoir Paris" d'Alice Winocour, un film sur la résilience
Quinzaine des Réalisateurs
"Revoir Paris" est le nouveau film de la réalisatrice Alice Winocour, avec Virginie Efira et Benoît Magimel. Il est présenté à la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2022. Comme c'est le cas de nombreux films présentés à Cannes, la réalisatrice vient tout juste de terminer son long-métrage.
"Revoir Paris" raconte l'histoire de Mia (Virginie Efira), victime d'un attentat dans une brasserie. Trois mois plus tard, alors qu'elle n'a toujours pas réussi à reprendre le cours de sa vie et qu'elle ne se rappelle l'évènement que par bribes, Mia décide d'enquêter dans sa mémoire pour retrouver le chemin d'un bonheur possible.
Le scénario n'est pas sans rappeler les événements survenus à Paris le 13 novembre 2015. Pourtant, même si elle s'en est inspirée, Alice Winocour a choisi, dans "Revoir Paris", de raconter un attentat fictif.
"Tout ça part, comme souvent dans mes films et là peut-être encore plus, de quelque chose de personnel. Il se trouve que mon petit frère était dans les attentats du Bataclan. Il a survécu. Le film s'est vraiment construit à partir de toutes les discussions que j'ai pu avoir avec lui dans les jours qui ont suivi, les mois qui ont suivi. Et aussi, évidemment, avec tous les survivants et ce monde auquel j'ai eu accès grâce à lui", explique la réalisatrice à la RTS. En réalité, selon Alice Winocour, le film ne parle pas vraiment d'attentat. Il s'agit d'un film sur la résilience et sur le fait de se reconstruire et se retrouver après un tel événement.
Avec "Revoir Paris", Alice Winocour livre un film d'enquête sur un processus de reconstruction individuelle, mais surtout collective.
"Mariupolis 2"
La vie sous les bombes en Ukraine montrée à Cannes
Emotion à Cannes après la projection en séance spéciale jeudi de "Mariupolis 2". Il s'agit du dernier film du Lituanien Mantas Kvedaravicius, tué fin mars en Ukraine, en tentant de quitter la ville-martyre assiégée par les Russes d'où il documentait la guerre.
Le film qui a failli ne jamais exister "donne à voir la vie qui continue sous les bombes" et compile les images tournées par le documentariste juste avant sa mort, selon les termes du Festival.
Un témoignage rare montré alors que des centaines de militaires ukrainiens retranchés dans l'aciérie Azovstal - l'ultime poche de résistance à Marioupol face à l'armée russe - sont en train de se rendre.
Mantas Kvedaravicius avait déjà tourné un premier film à Marioupol, pendant la guerre du Donbass. Il y était retourné, après l'invasion russe en Ukraine de février dernier, "pour retrouver les personnes qu'il avait rencontrées et filmées entre 2014 et 2015".
Sans voix off, ni musique, ce nouveau documentaire alterne entre des longs plans montrant des paysages de désolation et des scènes de la vie quotidienne d'habitants tentant de survivre, comme ces réfugiés dans le sous-sol d'une église.
Bruits de tirs incessants
Le film les montre prenant l'air, cuisinant ou tentant des expéditions dans des quartiers détruits, pour récupérer de la nourriture ou un générateur d'électricité. Les bruits de tirs et de bombardements sont incessants au cours des 1h45 que dure le film.
Si la mort est peu présente à l'écran, dans une scène, un homme dans le sous-sol de l'église évoque le "théâtre", dans lequel s'étaient abrités des femmes et des enfants avant d'être bombardé en mars, et le sort de l'"usine" Azovstal.
Le film a été ajouté à la dernière minute par les organisateurs du Festival. Ils avaient promis une 75e édition où l'Ukraine serait "dans tous les esprits", déjà marquée lors de la cérémonie d'ouverture par l'intervention, depuis Kiev, du président et ancien acteur Volodymyr Zelensky.
Après la mort du documentariste, confirmée début avril, "sa fiancée, Hanna Bilobrova, qui l'accompagnait, a pu rapporter les images tournées là-bas et les assembler avec Dounia Sichov, la monteuse de Mantas", a précisé le Festival.
L'Ukraine sera présente via d'autres réalisateurs de ce pays: "The Natural History of Destruction" de l'habitué Sergei Loznitsa, sur la destruction des villes allemandes par les Alliés pendant la Seconde Guerre mondiale (en séance spéciale) et deux premiers films: "Butterfly Visions" de Maksim Nakonechnyi (Un certain regard) et "Pamfir" (Quinzaine des réalisateurs) de Dmytro Sukholytkyy-Sobchuk.
Kirill Serebrennikov: "Chaque oeuvre d'art a un contenu politique"
Le réalisateur russe a enfin pu monter les marches
"Non à la guerre! (...) Je suis absolument convaincu que les gens de la culture sont capables de faire que cette guerre cesse... Cette fin va arriver et on vivra dans la paix", a déclaré, ému, l'enfant terrible du cinéma russe Kirill Serebrennikov, 52 ans, connu pour ses créations audacieuses et son soutien aux personnes LGBT+.
Celui qui a enfin pu fouler le tapis rouge après des années d'assignation à résidence, lors d'une montée des marches tout en sobriété, a présenté son nouveau film "La femme de Tchaïkovski" qui a été ovationné par le public durant de longues minutes.
Le film qui inaugurait la compétition cannoise offre un aperçu intimiste du bref et désastreux mariage du compositeur Piotr Ilitch Tchaïkovski.
Un film politique? "Chaque oeuvre d'art a un contenu politique", a-t-il déclaré lors de la montée des marches.
C'est la deuxième année de suite que le réalisateur brigue une Palme d'or. Assigné à résidence à Moscou, il avait l'an dernier présenté à distance son long métrage "La fièvre de Petrov". Dans le palais des festivals, le fauteuil frappé de son nom était resté vide, comme en 2017 lors de la présentation de "Leto".
Tom Cruise reçoit une Palme d'or d'honneur
"Je fais des films pour le grand écran"
Les appareils photo ont chauffé pour la montée des marches de Tom Cruise qui a présenté mercredi en fin de journée, hors compétition, "Top Gun: Maverick", 36 ans après le premier opus, escorté par la Patrouille de France.
Les pilotes ont survolé les marches cannoises pendant la montée de l'acteur de 59 ans qui a, selon leurs termes, "inspiré une génération" dans les cockpits.
Juste avant la projection, l'acteur a reçu une Palme d'or d'honneur. "Surprise!" a tweeté le Festival en annonçant cette récompense.
Auparavant, il avait animé une masterclass durant laquelle il a pris la défense des salles de cinéma contre les plateformes de streaming.
"Je fais des films pour le grand écran. Mes films ne sortiront pas directement sur les plateformes. Aller au cinéma, c'est partager une expérience, quelle que soit notre culture ou notre langue. Je vais voir les films en salles quand ils sortent. Je mets ma casquette (pour ne pas être reconnu)", a déclaré la star, ovationnée par un parterre de 1000 personnes.
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"Coupez!" de Michel Hazanavicius, avec Bérénice Bejo et Romain Duris
La critique de Rafael Wolf
"Coupez de Michel Hazanavicius, oscarisé pour "The Artist", a été présenté en film d’ouverture, hors compétition. Il est sorti simultanément en salles.
Le public de cette délirante comédie zombiesque, remake presque à l’identique de la comédie japonaise "Ne coupez pas!" (2017) de Shin'ichirō Ueda, doit être averti: il est impératif de ne pas quitter la salle avant les trente premières minutes du film, composées d’un long plan-séquence où une équipe de cinéma tourne un nanar avec des zombies perturbé par l’arrivée de vrais morts-vivants. Une demi-heure où Michel Hazanavicius relève le pari de jouer avec la patience de son spectateur confronté au pastiche d’une série Z consternante.
Passé ce préambule, "Coupez!" retourne aux origines du projet, remake d’un film japonais proposé à un cinéaste peu ambitieux (Romain Duris). L’essentiel, comme le dit la productrice nippone, étant de faire un film "rapide, pas cher et dans la moyenne". A partir de là, le récit révèle toutes les contrariétés précédant le tournage, jusqu’au moment où le fameux plan-séquence démarre à nouveau, mais revu d’un point de vue extérieur.
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On comprend dès lors que tel comédien jouait réellement ivre en vomissant sur ses partenaires, que l’épouse du réalisateur (Bérénice Bejo), une ancienne actrice adepte de krav-maga, s’était tellement prise au jeu qu’elle menaçait le tournage dans son ensemble, et que le preneur de son était dominé par ses problèmes d’intestin.
Tel le making-of d’un tournage chaotique, "Coupez!" s’avère à ce stade d’une drôlerie irrésistible, en plus de rendre un hommage touchant au travail commun d’une équipe se démenant pour mener à son terme un film frappé par une cascade d’accidents et d’imprévus.
Avec, au final, le portrait sans cynisme d’un cinéaste minable qui retrouve un peu de sa passion grâce à sa fille, une aspirante réalisatrice incarnée par la propre fille de Michel Hazanavicius, Simone.
Volodymyr Zelensky ouvre le festival de Cannes depuis Kiev
Le président ukrainien invoque "Le Dictateur" de Chaplin
"Il nous faut un nouveau Chaplin qui prouvera que le cinéma n'est pas muet" face à la guerre: le Festival de Cannes a donné d'emblée une tonalité politique à sa 75e édition en offrant une tribune au président ukrainien Volodymyr Zelensky, lui-même acteur avant son élection.
Son apparition surprise sur l'écran du Palais des Festivals, en habits militaires, a été suivie d'une longue ovation par le gratin du cinéma mondial, réuni pour la cérémonie d'ouverture d'un festival qui a promis que la guerre serait "dans tous les esprits".
Il nous faut un nouveau Chaplin qui prouvera que le cinéma n'est pas muet face à la guerre
"Nous allons continuer de nous battre, nous n'avons pas d'autre choix (...). Je suis persuadé que le 'dictateur' va perdre", a poursuivi le président ukrainien en référence au président russe Vladimir Poutine et au film de Charlie Chaplin, qu'il a cité à plusieurs reprises.
En Ukraine, "des centaines de personnes meurent tous les jours. Ils ne vont pas se relever après le clap de fin. (...) Est-ce que le cinéma va se taire, ou est-ce qu'il va en parler? S'il y a un dictateur, s'il y a une guerre pour la liberté, de nouveau, tout dépend de notre unité. Alors, est-ce que le cinéma peut rester hors de cette unité?", a-t-il encore lancé.
En Ukraine, des centaines de personnes meurent tous les jours et ne vont pas se relever après le clap de fin. Est-ce que le cinéma va se taire, ou est-ce qu'il va en parler?
Son intervention écrit une nouvelle page dans la longue histoire politique du Festival, fondé en 1939 pour s'opposer à la Mostra de Venise de l'Italie fasciste, mais dont la première édition, guerre mondiale oblige, n'a pu se tenir qu'en 1946.
"Le Festival n'a cessé d'accueillir, de protéger et de réunir les plus grands cinéastes de leur temps", a souligné auparavant le président du jury, Vincent Lindon, rappelant la "ligne artistique et citoyenne" de cet évènement mondial. "Pouvons-nous faire autre chose qu'utiliser le cinéma, cette arme d'émotion massive, pour réveiller les consciences et bousculer les indifférences? Je ne l'imagine pas!", a-t-il lancé.
Pouvons-nous faire autre chose qu'utiliser le cinéma, cette arme d'émotion massive, pour réveiller les consciences et bousculer les indifférences? Je ne l'imagine pas!
Outre le bannissement des délégations officielles russes, annoncé après l'invasion, la sélection officielle porte elle aussi cette année l'ombre de la guerre.
Un peu plus tôt, à 19h, la cérémonie d'ouverture a été présidée par Virginie Efira - attendue également à l'écran pour son rôle de survivante d'un attentat dans "Revoir Paris".
Ancienne animatrice de télévision, l'actrice a prévenu lundi qu'elle ne s'interdirait "pas de faire rire", lors de l'évènement retransmis sur France 2, et par Brut. "Je vais essayer de faire court", a-t-elle promis.
Avant le déluge de films, de stars et de paillettes
Ultimes préparatifs
Le 75e Festival de Cannes s'ouvre officiellement mardi soir. La Croisette s'apprête à recevoir la planète cinéma et retrouve ses airs de fête après deux saisons marquées par la pandémie.
Des cordistes ont déployé dimanche l'affiche de la 75e édition, inspirée de la scène finale du film "The Truman Show", sur le fronton du Palais des festivals.
Lundi, les premiers festivaliers ont commencé à débarquer, du monde entier, ou presque: peu de professionnels russes sont attendus, le Festival ayant annoncé dès l'invasion de l'Ukraine qu'il n'accueillerait pas de "délégations" officielles ou de structures liées au gouvernement.
Et certains pays comme la Chine pourraient être moins présents que d'habitude, en raison de la situation sanitaire sur place. Mais à Cannes, la page de l'épidémie de Covid semble tournée: le Festival a retrouvé ses dates habituelles et il n'y aura ni masques obligatoires ni pass sanitaires.
Dès mardi soir, la fête et le 7e art retrouvent leurs droits, après l'arrivée du jury, présidé par l'acteur français Vincent Lindon, qui succède à Spike Lee.
Forest Whitaker, Palme d'or d'honneur
L'une des premières stars internationales à monter les marches sera l'acteur Forest Whitaker ("Ghost dog", "Le dernier roi d'Ecosse"). Une Palme d'or d'honneur lui sera remise lors de la cérémonie d'ouverture mardi soir, présentée par l'actrice Virginie Efira.
Beaucoup d'autres stars suivront: Kristen Stewart, qui montera les marches aux côtés de Léa Seydoux et Viggo Mortensen pour le dernier film de David Cronenberg, le prometteur Austin Butler et le vétéran Tom Hanks, qui interprètent Elvis et son manager dans un biopic évènement, et bien sûr Tom Cruise pour le dernier "Top Gun".
21 films en compétition
Côté compétition, 21 films sont en lice pour succéder à "Titane", Palme d'or gore et sans concession de la Française Julia Ducournau, deuxième réalisatrice couronnée dans l'histoire du Festival.
Parmi les cinéastes attendus: David Cronenberg ("Crash"), qui promet une nouvelle fois de secouer le public avec "Les crimes du futur", Park Chan-wook ("Old boy") qui revient avec une enquête sulfureuse ("Decision to leave") ou James Gray qui présentera "Armageddon Time", avec Anthony Hopkins et Anne Hathaway.
Plusieurs cinéastes déjà couronnés sont en course dont les frères Dardenne ("Rosetta") avec "Tori et Lokita", Ruben Östlund, le plus grinçant des cinéastes suédois ("The Square") avec "Sans filtre", ou le Japonais Kore-eda ("Une Affaire de famille"), qui a cette fois tourné "Broker" avec la star sud-coréenne de "Parasite", Song Kang-ho. Ainsi que de jeunes talents prometteurs, nommés Lukas Dhont ou Leonor Serraille, tous deux en compétition pour leur deuxième film.
Le Festival a aussi promis de ne pas oublier l'Ukraine et a ajouté la semaine dernière en sélection le film posthume du réalisateur lituanien Mantas Kvedaravicius, tué début avril à Marioupol. Sa fiancée qui l'accompagnait a pu rapporter les images tournées là-bas et les assembler.
La compétition s'ouvre mercredi avec "La femme de Tchaïkovski"
Le film présenté à l'issue de la cérémonie d'ouverture est "Coupez!", une parodie sanguinolente de comédie de zombies signée Michel Hazanavicius - le roi du pastiche oscarisé pour "The Artist". Au casting, on retrouve Romain Duris et Bénédicte Bejo.
Quant à la compétition, elle s'ouvre mercredi avec"La femme de Tchaïkovski", dernier film de Kirill Serebrennikov, devenu symbole des artistes russes en rupture avec le régime depuis qu'il a pu rejoindre légalement l'Europe après le déclenchement de la guerre.
Le bilan du président Pierre Lescure
Président pour la dernière fois du plus grand festival de cinéma au monde, Pierre Lescure se réjouit de la quinzaine de la 75e édition qui s'ouvre ce mardi. Il est revenu notamment dans la Matinale de la RTS sur son bilan.
"J'ai essayé de faire en sorte que Thierry Frémaux, délégué général du Festival de Cannes, ait encore plus de liberté et d'ouverture dans sa programmation, pour que tous les genres de cinéma et tous les pays du monde soient représentés à Cannes dans des premiers films ou films confirmés", explique Pierre Lescure qui avoue avoir beaucoup d'attentes cette année sur la présentation hors compétition du biopic dédié à Elvis.
Vincent Lindon, président du jury
Cinq hommes et quatre femmes
Vincent Lindon, qui avait fait une apparition remarquée dans le film "Titane" de Julia Ducourneau, Palme d'or 2021, prend la suite du réalisateur américain Spike Lee à la présidence du jury du Festival de Cannes.
Il est épaulé dans cette mission par l'actrice et réalisatrice anglo-américaine Rebecca Hall ("Vicky Cristina Barcelona"), la Suédoise Noomi Rapace, révélée en 2009 dans la première adaptation de la saga "Millenium", l'Italienne Jasmine Trinca, dont le premier long métrage "Marcel!" sera présenté en séance spéciale, et l'Indienne Deepika Padukone.
Quatre réalisateurs complètent ce jury: l'Iranien Asghar Farhadi dont le film "Un héros" à remporté le Grand Prix l'année passée, le Français Ladj Ly ("Les misérables", prix du jury 2019 à Cannes), l'Américain Jeff Nichols, qui avait présenté son film "Loving" en 2016 sur la Croisette, et le Norvégien Joachim Trier ("Julie en 12 chapitres, prix d'interprétation féminine en 2021).
Le tiktokeur le plus suivi d'Europe, Khaby Lame, éclipsera-t-il Tom Cruise? Pour sa 75e édition, le Festival de Cannes s'est lancé dans une quête éperdue d'une nouvelle jeunesse.
Le Festival a bazardé son partenariat historique avec Canal+, chaîne emblématique du cinéma dans les années 1980 et 1990, qui retransmettait notamment les cérémonies d'ouverture et de clôture. A la place: un attelage surprenant entre service public (France Télévisions) et Brut, qui doit permettre de s'adresser, notamment, aux jeunes générations.
Ce média vidéo fondé il y a cinq ans (par Renaud Le Van Kim, un ancien de Canal+), tourné vers les formats courts, est présent également en Inde, en Egypte, en Côte d'Ivoire ou au Japon. Il revendique 500 millions de spectateurs dans plus de 100 pays, majoritairement chez les 18-34 ans.
Faire éclore de jeunes pousses
Tout un symbole, à l'heure où le cinéma en salles prend un coup de vieux, subissant de plein fouet la concurrence des séries et du streaming. Beaucoup de jeunes ne se rendent plus en salles que pour les films de superhéros, de Marvel ou DC Comics.
Pourtant, "les thématiques abordées (dans les films de) Cannes résonnent beaucoup avec la jeunesse du monde entier", explique à l'AFP le patron de Brut, Guillaume Lacroix, qui voit dans le partenariat le moyen de rendre le festival "encore plus inclusif générationnellement, et en termes de diversité".
Plusieurs dispositifs permettent déjà de faire éclore de jeunes pousses, comme la Cinéfondation ou La Fabrique Cinéma, et le Festival vient de recentrer la sélection "Un Certain Regard" sur les nouveaux talents.
Réseau social préféré des ados et paradis de la vidéo ultra courte, TikTok, nouveau partenaire officiel lui aussi, retransmettra chaque jour la montée des marches, tandis qu'Instagram profitera du buzz cannois pour mettre en avant certains de ses influenceurs - sans rapport d'ailleurs avec le 7e art.
Et, consécration, un "jury TikTok", où siégera Khaby Lame, 100 millions d'abonnés, départagera des vidéos de 30 secondes à 3 minutes pour un prix officiel, remis le 20 mai des mains du délégué général, Thierry Frémaux.
Retour sur la précédente édition
Le triomphe de "Titane"
Après une édition annulée en 2020, le Festival de Cannes s'était tenu l'année passée, non en mai comme traditionnellement, mais du 6 au 17 juillet en raison de la pandémie.
Quelque vingt-quatre films étaient en compétition pour la Palme d'or, dont une majorité de productions françaises. C'est finalement "Titane" de la réalisatrice française Julia Ducournau, véritable électrochoc de cette 74e édition, qui s'est vu décerner la Palme d'or.
Le prix de l'interprétation masculine était revenu à l'Américain Caleb Landry Jones, pour sa performance dans "Nitram". Et c'était la Norvégienne Renate Reinsve qui avait décroché le prix d'interprétation féminine pour sa performance dans "Julie en 12 chapitres" de Joachim Trier.