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Positif et consensuel, "Barbie" s'est fait une place inattendue au box-office chinois

Le film Barbie cartonne au box-office chinois. [Keystone - Wu Hao]
Le film "Barbie" dépasse le milliard de dollars au box-office mondial / Tout un monde / 7 min. / le 8 août 2023
En trois semaines d'exploitation, le film "Barbie" affole le box-office mondial. Et de façon plutôt étonnante, il cartonne également en Chine, malgré le conservatisme et la méfiance envers les films étrangers. Un succès dû à une campagne publicitaire réussie mais aussi à un "féminisme soft" qui touche un large public.

Difficile d'échapper ces jours à la "vague rose" qui s'empare des écrans du monde entier. Le long-métrage de la réalisatrice Greta Gerwig a franchi la barre du milliard de dollars de recettes, une première pour la Warner qui n'avait jamais dépassé ce cap symbolique en aussi peu de temps. Il devrait vraisemblablement devenir bientôt le plus gros succès commercial du vénérable studio.

Cette réussite, le film co-produit par Mattel - la société qui vend les fameuses poupées - le doit d'abord à une campagne de publicité hors du commun, inventive et omniprésente. Un "travail de communication très malin" qui a permis "un matraquage réel de promotion" à travers différents moyens de communication, observe Frédéric Maire, directeur de la Cinémathèque suisse, dans l'émission Tout un monde.

>> Lire à ce sujet : Le film Barbie ou l'exemple d'une stratégie de communication réussie

Par ailleurs, à travers sa proposition d'être une oeuvre "féministe", "Barbie" est aussi un film "qui déculpabilise toutes celles et ceux qui ont joué, petites filles ou petits garçons, avec des Barbies ou des Ken" et qui ont pu être touchées par les critiques liées au sexisme de ces poupées, estime-t-il.

Féminisme soft

Car aux yeux de la réalisatrice Greta Gerwig, féministe revendiquée, la poupée Barbie est une figure ambivalente. Une "icône complexe", pleine de clichés mais "parfois en avance sur la société", estimait-elle au moment du lancement du film sur la chaîne ABC.

Pour la sociologue française Christine Castelain Meunier, le film sort aussi après la vague #MeToo, dans une société "très clivée autour de la question du genre". Mais "on sent bien que ça peut interpeller autant les personnes qui sont au coeur de la théorie du genre que les personnes qui défendent l'idée qu'il faut revenir à l'affirmation [...] de la féminité par des critères esthétiques très normés, très stéréotypés".

Le film proposerait donc une sorte de "féminisme soft" dans lequel chacun ou chacune y trouverait son compte.

Succès en Chine

C'est d'ailleurs peut-être pour cette raison qu'il bénéficie d'un accueil inattendu en Chine, où il est devenu un véritable phénomène en se classant rapidement dans le top-5 du box-office, à l'heure où les films étrangers – en particulier américains – sont souvent censurés et dont la distribution est drastiquement limitée.

Les succès commerciaux de ces dernières années en Chine étaient plutôt des œuvres guerrières, pétries de propagande ultra-nationaliste. Très loin donc de l'univers de ce "Barbie", qui attire pourtant en salles un large et jeune public. Le phénomène est d'autant plus surprenant que le droit des femmes est un sujet sensible dans une société chinoise, très patriarcale et où le féminisme est qualifié de "complot occidental" par les autorités.

Dans ce contexte, le fait que ce film n'ait pas été censuré constitue une petite lueur à laquelle se raccrochent les féministes chinoises, d'autant que le film suscite parfois des réactions outrées parmi la gent masculine. Il permet en tout cas de susciter discussions et débats dans une certaine frange de la société. Quant à la presse officielle, elle salue une œuvre "équilibrée" qui promeut "raisonnablement" le droit des femmes sans tomber dans l'excès. Soit un film inoffensif qui se contenterait de dénoncer une caricature.

Le film Barbie génère des ventes, mais aussi du débat auprès dans la société chinoise. [Keystone - Andy Wong]
Le film Barbie génère des ventes, mais aussi du débat auprès dans la société chinoise. [Keystone - Andy Wong]

Deux salles, deux ambiances

Cet aspect inoffensif contribue également au succès du long métrage, positif et réconfortant, qui fait du bien au moral. Néanmoins, Frédéric Maire relève que le film "Oppenheimer", beaucoup plus sombre, connaît lui aussi un réel engouement.

"C'est très intéressant que les deux films soient sortis en même temps. On a d'un côté un film qui rassure, qui amuse et qui détend tout le monde. Et de l'autre, on a le succès d'Oppenheimer - moins important mais quand même immense - qui parle justement de la guerre, de la violence, de l'Homme qui se détruit lui-même. [...] Ce croisement est passionnant sur l'envie des gens d'aller au cinéma" pour différentes raisons, s'enthousiasme-t-il.

>> Voir aussi le commentaire de RTS Culture sur le film Oppenheimer : "Oppenheimer", l'histoire du père de la bombe atomique version Christopher Nolan

Au final, "Barbie" de Greta Gerwig est "un film plaisant et agréable, rose bonbon, relativement moderne", juge le spécialiste du 7e art. "Ce n'est de loin pas un chef d'oeuvre, mais c'est bien que les gens aillent au cinéma!"

Patrick Chaboudez/Michaël Peuker/jop

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