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"The Creator", toute la beauté de la science-fiction

Scène tirée du film "The Creator" de Gareth Edwards. [© 20th Century Studios]
Scène tirée du film "The Creator" de Gareth Edwards. - [© 20th Century Studios]
Androïdes et humains se livrent une guerre planétaire dans "The Creator", film spectaculaire de Gareth Edwards qui pose un regard original et passionnant sur l'intelligence artificielle. Un prototype de science-fiction d'une ampleur, d'une émotion et d'une richesse miraculeuses.

Dans un futur proche, humains et intelligence artificielle cohabitent jusqu'au jour où une explosion nucléaire dévaste Los Angeles. Accusée d'avoir voulu détruire l'humanité, l'IA devient l'ennemie à abattre pour l'armée américaine. Grâce à un vaisseau volant, le Nomad, les militaires états-unisiens surveillent et anéantissent les androïdes, ainsi que n'importe quelle forme d'intelligence artificielle encore autorisés en Nouvelle-Asie.

Au milieu de cette guerre entre l'humanité et les forces de l'intelligence artificielle, Joshua (John David Washington), soldat infiltré dans les réseaux pro-AI, est envoyé en Nouvelle-Asie. Sa mission: trouver et tuer le Créateur qui travaillerait sur une arme massive capable de détruire le Nomad et d'éradiquer l'espèce humaine. Sur place, Joshua découvre que l'arme en question est une fillette de six ans, Alphie. Au lieu de l'éliminer, il s'interroge sur la nature réelle de sa mission et sur les intentions véritables des rebelles pro-AI.

De la SF réaliste

Auteur des passionnants "Monsters", "Rogue One: A Star Wars Story" et "Godzilla", le réalisateur britannique Gareth Edwards fait des miracles avec un budget de 80 millions de dollars, à peine le tiers des blockbusters récents. La dimension épique, l'ampleur et l'audace de son film prouvent qu'il est possible de sortir des sentiers battus tout en se hissant à des coudées au-dessus des produits les plus coûteux qu'Hollywood fabrique à la chaîne.

Passé un canevas global un peu éculé, sur fond de héros sacrificiel en quête de rédemption et de thématiques philosophico-religieuses (tendance bouddhiste), "The Creator" s'impose comme l'œuvre de science-fiction la plus stimulante vue depuis longtemps. D'une beauté éclatante, l'esthétique globale du film prend le contrepied des productions hollywoodiennes habituelles en incrustant harmonieusement ses images de synthèse dans des décors naturels au lieu de greffer des visages humains dans une bouillie numérique. L'effet de réalisme frappe d'emblée et autorise une identification accrue du spectateur, concerné par les personnages autant que par les situations qui lui sont révélés.

L'ennemi américain

Cumulant les références, de "Matrix"  à "Akira", en passant par "Ghost in the Shell" et même "Apocalypse Now", le résultat trouve par ailleurs sans peine sa tonalité propre et étonne encore davantage en renversant les idées reçues autour de l'AI. Les ennemis de cette histoire apparaissent rapidement comme les militaires américains, obsédés par un contrôle mondial qui renvoie à l'époque post-11 septembre, alors que l'intelligence artificielle, au lieu d'être diabolisée, devient la victime des projections et des fantasmes occidentaux.

Dès lors, les séquences de débarquements d'hélicoptères et de soldats américains sur des plages ou près de villages asiatiques convoquent la guerre du Vietnam, "The Creator" assumant un point de vue politique assez radical et foncièrement anticolonialiste.

Des androïdes bouleversants

Très éloigné des sempiternelles considérations technophobes, "The Creator" trouve son ultime atout dans l'émotion qu'il parvient à faire émerger de créatures au crâne à moitié métallique. Le trouble que l'on éprouve devant la première apparition d'Alphie, la fillette androïde, reste encore logique, mais l'attachement progressif que l'on ressent à son égard, jusqu'à être bouleversé par ses larmes, tient de l'exploit. Au point de rendre le héros du film, dont la progression au sein du récit apparaît plus balisée et prévisible, nettement plus insipide.

Il faut remonter à "A.I." de Steven Spielberg et à "Blade Runner" de Ridley Scott pour se souvenir d'une telle empathie à l'égard d'une forme de vie artificielle, signe de la réussite enthousiasmante de ce "Creator" qui porte à l'écran, avec une sincérité totale, l'idée d'une utopie transhumaniste prônant la symbiose entre humains et A.I.

Rafael Wolf/sc

"The Creator" de Gareth Edwards, avec John David Washington, Gemma Chan, Ken Watanabe. A voir actuellement dans les salles romandes.

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