"Le consentement", l'adaptation bouleversante du récit de Vanessa Springora

Le 2 janvier 2020 sortait en librairie "Le consentement" de Vanessa Springora (Ed. Grasset). Dans ce livre, la directrice des éditions Julliard raconte comment elle a été séduite à 13 ans, dans les années 1980, par Gabriel Matzneff (cité que par ses initiales G.M.), alors écrivain quinquagénaire de renom.

En 1986, à Paris, la jeune adolescente devient l'amante et la muse de cet homme célébré par le monde culturel et politique. Se perdant dans la relation, elle subit de plus en plus violemment l'emprise destructrice que ce prédateur exerce sur elle.

A sa sortie, le livre de Vanessa Springora fait l'effet d'une bombe, à tel point qu'il fait réagir la justice qui lance alors une enquête pour viols sur mineurs à l'encontre de Matzneff. "Le consentement" provoque aussi un véritable séisme dans le milieu de l'édition et déclenche "une avalanche de repentirs dans les médias, longtemps complaisants", écrivait à l'époque la journaliste de RTS Culture Marie-Claude Martin.

>> A lire : Oui, "Le Consentement" de Vanessa Springora est une oeuvre littéraire

Mettre en images un récit bouleversant

"Je me souviens, la première fois quand j'ai découvert ce récit, j'étais en larmes, j'étais en colère", confie la réalisatrice Vanessa Filho dans l'émission Vertigo du 6 décembre. Bouleversée par ce récit, la cinéaste décide de s'en emparer pour en faire un film. "J'ai ressenti l'urgence et la nécessité de mettre en image ce récit", ajoute-t-elle.

J'ai ressenti l'urgence et la nécessité de mettre en image ce récit

Pour Vanessa Filho, porter cette histoire au cinéma doit permettre au public une autre compréhension, une autre identification. Ce que l'image peut révéler selon elle, c'est aussi ce qu'est l'emprise, des mots, du corps. "Et il y avait aussi chez moi une intention très profonde de poursuivre le combat initié par Vanessa Springora", explique la cinéaste dans l'émission Vertigo.

Dans le rôle de Vanessa Springora, une actrice de 20 ans, Kim Higelin, absolument parfaite, fascinante et bouleversante. Face à elle, Jean-Paul Rouve qui incarne magistralement Gabriel Matzneff dans toute sa perversité.

La génération TikTok s'empare du film

Le succès du film est arrivé comme une vague, une déferlante d'une ampleur rare. Sur le réseau social  TikTok, des centaines de jeunes se filment avant d'entrer dans la salle, puis en la quittant, rigolards d'abord, défaits ensuite.

Ces vidéos ont cumulé près de trente millions de vues. Résultat: le nombre d'entrées pour "Le consentement" a augmenté de 40% entre sa première et sa deuxième semaine de projection, et de 70% entre sa deuxième et sa troisième semaine d'exploitation. Un phénomène inédit pour un film français.

"C'est un sujet qui convoque l'intime de chacun et je pense qu'il place les spectatrices et spectateurs presque dans une position d'acteurs. Je pense qu'il y a une expérience qui est vécue et qui est traversée", explique Vanessa Filho.

Le film, parfois très cru, interpelle la jeunesse, c'est ce qu'espérait la cinéaste. "S'il y avait aussi dans cette réalisation une intention de faire oeuvre de prévention, évidemment qu'on ne peut être plus heureux de ce qui arrive, car ce sont ces jeunes gens qui sont les acteurs de demain", poursuit Vanessa Filho.

>> A voir: le sujet du 19h30 du 6 décembre sur le film "Le consentement" :

Avec ce film, comme Vanessa Springora l'a fait avec son livre, la réalisatrice dénonce l'hypocrisie et la complaisance, le déni collectif d'une société de l'intelligentsia qui, au moment de cette histoire, prônait la transgression et qui laissait Gabriel Matzneff faire librement l'apologie de la pédocriminalité sur les plateaux télévisés, sous couvert d'aura littéraire. "Le consentement", film bouleversant et nécessaire, est voué à marquer les esprits.

Propos recueillis par Anne Laure Gannac

Adaptation web: Lara Donnet

"Le consentement" de Vanessa Filho, avec Jean-Paul Rouve, Kim Higelin et Laetitia Casta. A voir dans les salles romandes depuis le 6 décembre 2023.